Elle fâche les opposants au régime
L'ambassadrice suisse en Iran visite voilée un site religieux

L'ambassadrice suisse à Téhéran, Nadine Olivieri Lozano, légitimerait-elle la violence à l'encontre des manifestants en Iran? Sa visite voilée d'un monument religieux est exploitée à des fins de propagande, ce qui fâche les opposants au régime.
Publié: 23.02.2023 à 12:58 heures
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Dernière mise à jour: 23.02.2023 à 13:08 heures
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L'ambassadrice suisse Nadine Olivieri Lozano a visité un sanctuaire à Qom, en Iran, en portant un foulard.
Photo: Screenshot Instagram
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Pascal Tischhauser

Depuis des mois, le régime iranien réprime durement les manifestations qui ont commencé depuis la mort de Mahsa Jina Amini, arrêtée parce qu'elle laissait paraître des cheveux sous son voile, le 16 septembre. Et, malgré les exécutions et les arrestations, la contestation en son honneur n'a guère diminué.

Et voilà que l'ambassadrice suisse à Téhéran se voile. Nadine Olivieri Lozano fait les gros titres parce qu'elle a visité mercredi le sanctuaire sacré de Fatima Masuma, dans la ville de Qom, en portant le foulard.

Aubaine pour le régime

Le fait que la diplomate visite, couverte de cette manière, un sanctuaire féminin, légitime les actions brutales des mollahs, aux yeux des critiques du régime. «Que l'ambassadrice suisse visite ce sanctuaire est tout simplement choquant», déclare Saghi Gholipour, qui vit en Suisse, à Blick. «Le fait qu'elle se présente en tchador alors que des milliers de femmes se battent pour pouvoir retirer leur foulard» est encore pire.

Le régime ne pourrait guère souhaiter une plus grande aide extérieure. Surtout que les mollahs utilisent désormais les monuments religieux, dans le pays et à l'international, comme promotion de leur système «qui continue de torturer et de tuer quotidiennement», affirme la représentante de Free Iran Switzerland, qui a organisé en Suisse des manifestations contre le pouvoir iranien.

«Protocole respecté»

En plus, on trouve sur les réseaux sociaux des exemples démontrant que les dirigeants de Téhéran font de la propagande avec la présence de l'ambassadrice suisse. Pourtant, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) défend sa représentante. Et il n'aborde pas le reproche selon lequel celle-ci légitimerait les actions du gouvernement totalitaire.

«La visite de l'ambassadrice suisse à Qom avait pour but d'aller à la rencontre d'une institution académique active dans le domaine du dialogue interreligieux et qui permet à ses étudiants de participer à des séminaires dans le même but en Suisse», explique Pierre-Alain Eltschinger, du DFAE. Dans ce contexte, une brève visite d'un site religieux important aurait eu lieu. «Lors de celle-ci, le protocole vestimentaire en vigueur sur place pour les femmes a été respecté», précise le porte-parole du DFAE.

Prise de position claire de la Confédération

Avant d'ajouter que «le dialogue interreligieux est d'une grande importance dans le contexte actuel». La Suisse utilise tous les canaux existants pour promouvoir ce dialogue, notamment entre les États dans le cadre de ses bons offices.

Plus loin, le DFAE explique que «parallèlement, la Suisse prend clairement et à plusieurs reprises position sur les violations des droits de l'homme en Iran». Au cours des derniers mois, elle aurait condamné à plusieurs reprises et sans équivoque l'usage de la violence contre les manifestants à différents niveaux. Elle aurait en outre appelé les autorités iraniennes à choisir la voie de la désescalade et à rechercher le dialogue avec les manifestants.

«Qu'est-ce qui ne va pas avec la Suisse officielle?»

Cela ne devrait guère calmer le mouvement de protestation en Suisse. «Je me demande: qu'est-ce qui ne va pas avec la Suisse officielle?», a déclaré Saghi Gholipour. «Les félicitations du président de la Confédération Alain Berset la semaine dernière étaient déjà absolument à côté de la plaque!», tonne-t-elle. Le conseiller fédéral avait en effet félicité l'Iran à l'occasion de l'anniversaire de la révolution, en dépit de toute la brutalité actuelle et passée du régime.

En 2008, la ministre des Affaires étrangères de l'époque, Micheline Calmy-Rey, s'était rendue en Iran et y avait porté un foulard. En Suisse, elle avait déjà été sévèrement critiquée: on lui avait reproché de se laisser instrumentaliser par le régime. Elle avait rejeté ces accusations, en affirmant avoir défendu la position de la Suisse sur la thématique des droits de l'homme.

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