Imaginez qu'il vous soit totalement interdit de brandir votre smartphone durant la journée. À aucun moment, même pendant votre pause-café tant attendue... Il vous faudrait sans doute un peu de temps pour vous y habituer, malgré la promesse d'une concentration et d'une humeur restaurées.
L'idée connaît pourtant une popularité croissante dans certains établissements scolaires publics au Royaume-Uni. En Suisse aussi, l'École internationale de Genève tente l'expérience: même les enseignants y doivent désormais s'abstenir d'utiliser leur téléphone en dehors de la salle des profs, ainsi que le soulignait La Matinale de la RTS.
Rappelons que 82% des Suisses (dont 64% des 18-25 ans) s'étaient prononcés en faveur d'une interdiction du smartphone à l'école, d'après un sondage de l'institut Sotomo diffusé fin 2024.
Or, une nouvelle étude britannique vient de jauger, pour la toute première fois, l'impact réel de ce type de mesure sur la santé mentale, la qualité du sommeil et les notes des élèves. Et les résultats ne sont un peu décevants.
L'interdiction à l'école est insuffisante
Réalisée par l'Université de Birmingham avec la participation de 1227 étudiants venus de 30 établissements secondaires différents, la recherche relève que les effets positifs espérés ne sont, la plupart du temps, absolument pas constatés. Même sans utiliser leur téléphone durant les cours, les temps de récréation ou les pauses de midi, les jeunes participants ne présentaient ni une santé mentale boostée, ni une capacité d'attention améliorée.
Ainsi que le précise la Dre Victoria Goodyear, responsable de l'étude, auprès de BBC, ces résultats ne contredisent pas l'utilité de ces nouvelles règles scolaires, mais suggèrent que «ces interdictions seules ne sont pas suffisantes pour contrebalancer les impacts négatifs» de l'utilisation excessive du smartphone.
D'après le rapport Jeunes et Médias, les adolescents suisses passent en moyenne 3 heures par jour sur leur smartphone, contre 4 heures par jour durant le weekend. À cela peuvent s'ajouter entre 1 et 2 heures de jeux vidéo par jour, en moyenne.
Réduire le temps passé sur le téléphone
Pour Victoria Goodyear, le focus doit désormais être placé sur les façons de réduire, de manière plus générale, le temps que les jeunes consacrent à leurs écrans: «On doit faire beaucoup plus que se contenter de les interdire à l'école», estime-t-elle.
La réelle urgence est là, puisque la recherche a pu démontrer un lien entre le nombre d'heures passées sur les réseaux sociaux et une détérioration de la santé mentale, avec une baisse de l'activité physique, de la qualité du sommeil et des notes obtenues à l'école. L'équipe de l'Université de Birmingham s'est également penchée sur les niveaux d'anxiété et le risque de dépression des participants, avant de se pencher sur leur niveau dans plusieurs matières, dont les maths et l'anglais.
Les résultats tendent tous à démontrer que davantage d'actions sont nécessaires, bien que BBC note une certaine réduction du harcèlement dans les établissements interdisant le smartphone.
«Le smartphone représente une part centrale de leur vie en dehors de l'école, constate Colin Crehan, directeur de l'école catholique Holy Trinity School, à Birmingham, auprès du média britannique. Cela signifie que ces tentatives d'interdictions dans la sphère scolaire nous engagent dans une bataille qu'on ne pourra gagner.» En d'autres termes, c'est aussi à domicile que les choses doivent changer.