Le 15 août 2021 a été un dimanche noir pour l'Afghanistan. Il y a un an jour pour jour, les talibans profitaient du retrait précipité des troupes américaines et de leurs alliés pour s'emparer du pouvoir grâce à une attaque éclair.
Les fondamentalistes islamistes ont eu beau affirmer qu'ils respecteraient (cette fois) les droits de l'homme, qu'ils lutteraient contre le terrorisme ou qu'ils laisseraient les femmes aller à l'école, leurs promesses sont restées sans effet.
Voilà un an que le Front national de résistance d'Afghanistan (FNR) tente depuis de chasser les talibans et de créer un Etat de droit. Blick a pu s'entretenir avec son chef des relations extérieures, Ali Maisam Nazary, qui gère la résistance au niveau international depuis Washington et se trouve actuellement à Douchanbé, la capitale du Tadjikistan.
A lire aussi
Depuis que les talibans ont pris le pouvoir il y a exactement un an, on n'entend plus beaucoup parler de l'Afghanistan. La situation s'est-elle calmée? Les nouveaux dirigeants ont-ils tout sous contrôle?
Pas du tout. Les massacres n'ont jamais cessé. Au lieu d'apporter la paix et la stabilité, les talibans ont plongé le pays dans une crise humanitaire et économique. Il n'y a plus de système de santé. Ils se sont eux-mêmes divisés en plusieurs groupes qui s'affaiblissent mutuellement.
Les talibans avaient promis que les filles pourraient continuer à aller à l'école. Qu'en est-il?
Leurs promesses étaient nombreuses, mais ils n'en ont tenu aucune. Les femmes ne peuvent ni travailler ni étudier: elles ont été tout simplement écartées de la vie publique. De nombreuses femmes sont enlevées et vendues sur les marchés internationaux. Plus l'Occident insiste sur les droits de l'homme, plus les talibans se comportent de manière agressive.
Combien d'Afghans ont-ils fui le pays?
Plus de 700'000. Les talibans les utilisent comme un moyen de pression sur l'Occident: ils monnaient l'arrêt de cette vague d'émigration contre un soutien.
Il y a quelques jours, les Américains ont tué le chef d'Al-Qaïda, Aiman al-Sawahiri, à Kaboul avec un drone. Avez-vous aidé les Etats-Unis à le retrouver?
Non, nous n'étions pas impliqués. Mais nous savions qu'il se trouvait dans le pays.
Quelle est l'importance de cette frappe contre Al-Qaïda?
Elle montre à quel point Al-Qaïda est liée aux talibans: Aiman al-Sawahiri vivait en plein quartier diplomatique, à un kilomètre à peine de l'ancien palais présidentiel! Sa mort ne signifie absolument pas la fin de l'organisation terroriste.
Dans quelle mesure Al-Qaïda est-elle présente et active en Afghanistan aujourd'hui?
Depuis la prise de pouvoir des talibans, plus d'un millier de membres d'Al-Qaïda sont entrés dans le pays. Les talibans leur ont confié de nombreux postes clés, dont celui de gouverneur. Ils sont formés au terrorisme dans plusieurs camps et équipés d'armes provenant de l'Occident. Ils sont aujourd'hui plus forts que jamais.
Pensez-vous qu'Al-Qaïda prépare de nouveaux attentats à l'étranger?
Les talibans équipent les djihadistes de passeports et de cartes d'identité. Dans quel but, selon vous? Pour qu'ils puissent infiltrer d'autres pays. Si l'Occident continue d'ignorer cette évolution, il risque d'en subir les conséquences comme lors du 11-Septembre. L'objectif des terroristes reste la lutte contre les infidèles.
Ali Maisam Nazary, 32 ans, est chef des relations extérieures du Front de résistance nationale d'Afghanistan (NRF) et conseiller du commandant Ahmad Massoud (33 ans). Il a étudié les sciences politiques à Los Angeles et à la prestigieuse London School of Economics.
Le 18 août 2021, trois jours après la prise de Kaboul par les talibans, les principaux dirigeants se sont séparés pour organiser la résistance: Ali Maisam Nazary a été chargé de piloter la résistance dans le monde entier depuis Washington D.C., pendant qu'Ahmad Massoud combat les talibans en Afghanistan sur différents fronts.
Ali Maisam Nazary, 32 ans, est chef des relations extérieures du Front de résistance nationale d'Afghanistan (NRF) et conseiller du commandant Ahmad Massoud (33 ans). Il a étudié les sciences politiques à Los Angeles et à la prestigieuse London School of Economics.
Le 18 août 2021, trois jours après la prise de Kaboul par les talibans, les principaux dirigeants se sont séparés pour organiser la résistance: Ali Maisam Nazary a été chargé de piloter la résistance dans le monde entier depuis Washington D.C., pendant qu'Ahmad Massoud combat les talibans en Afghanistan sur différents fronts.
On entend davantage parler d'Al-Qaïda que de l'Etat islamique. Que devient-il?
L'État islamique se fait régulièrement remarquer par des attentats, comme il y a quelques jours où il y a eu plusieurs morts. Mais il ne s'agit plus que d'une minorité.
Vous êtes conseiller et ami proche du célèbre résistant Ahmad Massoud. Comment la résistance progresse-t-elle?
Il y a un an, nous avons commencé dans deux des 34 provinces. Aujourd'hui, nous sommes présents dans douze d'entre elles et en contrôlons six. Dans le nord, nous avons gagné tous les combats contre les talibans, avec en prime de lourdes pertes pour eux.
Et le gouvernement déchu il y a un an, qu'est-il devenu?
Il n'y a plus de gouvernement. L'ex-vice-président, Amrullah Saleh, est aujourd'hui l'un des leaders de la résistance.
Recevez-vous un soutien de la scène internationale pour la résistance?
Non, aucun Etat ne nous aide.
Ne voyez-vous pas de possibilité de chercher à coopérer avec les talibans ?
Non. Tant que les talibans soutiennent le terrorisme, commettent des massacres et ne respectent pas les droits de l'homme, il n'en est pas question. Nous voulons une démocratie avec des élections — ce n'est que lorsqu'ils l'accepteront que nous serons ouverts aux négociations.
Et s'ils ne le veulent pas, quelle est votre solution?
Les éliminer. Nous nous battrons jusqu'à ce que nous ayons libéré l'Afghanistan. Il ne faut pas reconnaître les terroristes comme en Syrie ou en Irak.
Pensez-vous que cela soit un scénario plausible?
Les talibans sont affaiblis et en recul dans plusieurs endroits. Leur fin est proche.