Maria H.*, originaire de l'Oberland zurichois, a grandi dans une communauté chrétienne fondamentaliste. Ses parents en étaient des membres dirigeants. Ils prenaient la parole de Dieu très au sérieux et l'appliquaient à toute leur vie, y compris à l'éducation de leurs trois filles. «Les châtiments corporels, les abus psychologiques et les intimidations étaient normaux dans notre communauté religieuse, raconte Maria à Blick. Moi aussi, j'ai reçu des coups.»
Elle se souvient: «Les coups étaient toujours donnés dans la salle de bain sur les fesses nues, à la main, avec une louche ou une tapette à tapis. En grandissant, j'ai surtout subi des violences psychologiques. On m'isolait ou on m'ignorait. Pour moi, c'était presque pire.»
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Un secret de polichinelle
Les récents reportages sur l'église libre de Kaltbrunn (SG), l'école qui en fait partie et son internat ont ramené Maria à ses propres traumatismes. En effet, peu après son ouverture, Maria a fréquenté l'établissement à l'âge de treize ans pour une année intermédiaire. «On ne m'a pas frappée. Mais même en première année, les élèves murmuraient déjà qu'on les frappait. C'était un secret de polichinelle.»
Sa communauté était à l'époque en relation étroite avec celle de Kaltbrunn, selon elle: «Nous avons assisté aux sermons des uns et des autres. J'ai ainsi déjà pu écouter Jürg Läderach.» Les deux communautés étaient très semblables dans leurs structures: «Elles avaient toutes les deux des caractéristiques proches de celles d'une secte. Elles acceptaient la parole de Dieu comme la seule vérité.»
Les châtiments corporels étaient repris de la bible
C'est également à partir de la Bible que les enfants auraient été éduqués. «Les membres reprenaient les passages mot pour mot. Les châtiments corporels en faisaient partie.» L'objectif de cette éducation stricte: préparer les enfants à servir Dieu. «Une obéissance inconditionnelle était attendue. Vis-à-vis des parents, vis-à-vis de Dieu, poursuit Maria. En même temps, les parents eux-mêmes veulent servir Dieu de manière inconditionnelle, donc ils ne remettent pas en question les pratiques au sein de la communauté ou les versets bibliques.»
Il n'y avait pas vraiment de relation entre les parents et les enfants. Ceux-ci étaient abandonnés en pleurs, privés de proximité et châtiés physiquement.
Harcèlement moral et pensées suicidaires
En raison des violences vécues, Maria a eu des pensées suicidaires à l'adolescence, notamment parce que d'autres élèves l'avaient harcelée à l'école: «J'avais l'air différente. Dans notre communauté, nous avions un code vestimentaire. Les femmes avaient les cheveux longs, mais jamais détachés, portaient des jupes longues et les hauts devaient couvrir les épaules. Les bijoux et le maquillage étaient interdits.»
Le point de bascule se serait produit après l'école: «J'ai fait ce qu'on appelle une année d'apprentissage ménager dans une famille tout à fait normale. Ce fut jusque-là la plus belle année de ma vie. J'ai découvert un tout nouveau monde.» L'apprentissage d'infirmière qui a suivi a également été significatif pour elle: «J'ai appris à penser par moi-même, à remettre les autres en question.»
Beaucoup de travail à faire
Elle s'est de plus en plus éloignée de sa communauté. Lorsqu'elle est devenue mère pour la première fois à l'âge de 22 ans, elle a réalisé qu'elle ne voulait pas de ce monde pour son enfant: «Je voulais un lien avec ma fille et une éducation aimante. Mais ce n'était pas possible à long terme dans cet environnement.»
Elle et son ex-mari ont donc suivi leur propre voie, avec de plus en plus d'assurance, au sein de la communauté religieuse. «Cela a entraîné des changements et la communauté a évolué», explique cette mère de trois enfants. «La coupure définitive est arrivée en 2017. J'ai alors remarqué que j'avais besoin de distance pour assimiler ce que j'avais vécu.»
Bien qu'elle ait effectué un important travail d'assimilation, elle doit encore aujourd'hui lutter contre les conséquences de la violence physique et psychique qu'elle a subi: «Ce que j'ai vécu me revient toujours en pleine figure. Je dois toujours me rappeler qu'il est normal d'être soi-même. Je n'ai pas pu le faire pendant longtemps, analyse-t-elle. Mais je suis fière d'avoir brisé ces schémas et d'avoir suivi mon propre chemin.»
Entre-temps, son ancienne communauté aurait évolué de manière positive et ses parents aussi. «En tant que famille, nous avons pu tout nous dire et nous avons une très belle relation. Pour moi, c'est une réussite très importante.»
*Nom d'emprunt