«C'est un peu Nestlé city»
Nappes à sec, pollution, grève: à Vittel, Envoyé spécial enquête sur la présence de Nestlé

L'émission Envoyé spécial s'est penchée sur la «mainmise» de Nestlé Waters sur Vittel, dans les Vosges. Propriétaire de sources d'eau qui se tarissent, la multinationale suisse prévoit de supprimer un quart des postes de travail. Ses employés, en colère, sont en grève.
Publié: 16.09.2023 à 15:56 heures
Envoyé spécial a débarqué à Vittel pour enquêter sur l'emprise de Nestlé sur la petite ville.
Photo: AFP/Sébastien Bozon/France2
Léo Michoud

Ce reportage à la source fait grand bruit. Les équipes de l'émission Envoyé spécial, animée par Élise Lucet, se sont rendues dans la ville thermale de Vittel dans les Vosges. L'épisode diffusé jeudi sur France 2 s'intitule «Vittel: buvez, éliminez… la nappe!»

Là-bas, l'eau de source réputée pour ses bienfaits coule pour l'instant à flot... et finit embouteillée. Filiale «eau en bouteille» de la multinationale suisse, Nestlé Waters est à la fois le plus grand employeur et le plus grand propriétaire terrien des villes voisines de Vittel et Contrexéville. C'est de là que viennent les marques Vittel, Contrex et Hépar, vendues dans le monde entier.

Suppression de 171 postes à venir

Coup de théâtre en mai dernier. Nestlé suspend deux forages liés à Hépar, puis annonce la suppression de 171 emplois, «d'ici à la fin de l'année». Ce plan social concerne un quart des employés de l'usine. Aujourd'hui, environ 80% des 712 salariés vosgiens sont en grève.

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Une décision «essentiellement motivée par les conséquences de l'arrêt de la commercialisation de la marque Vittel en Allemagne», entraînant une «baisse significative des volumes de production», souligne le groupe dans un communiqué transmis à l'AFP au début du mois.

Nestlé Waters a en effet décidé de se retirer d'Allemagne après le «non-renouvellement» de ses contrats avec les supermarchés Lidl.

Nestlé prend le contrôle

À partir de ces constats, le reportage de la télé publique française a choisi divers protagonistes:

  • Des employés de Nestlé qui seront peut-être licenciés. «Ça va être compliqué d'assurer l'avenir de nos enfants, se confie anonymement une mère de famille. Il n'y a pas d'autre travail dans le coin, il faudrait déménager.» Christophe Babel ne veut pas critiquer son employeur: «Tout le monde a peur, parce qu'on se connait tous. Vittel ce n'est pas une grande ville. C'est un peu Nestlé city.»
  • Des habitants du «Collectif Eau 88» en croisade contre Nestlé. Ils accusent le minéralier de trop puiser dans les nappes phréatiques et les autorités de le soutenir aveuglément. Le journaliste et les trois opposants visitent une immense fosse remplie de bouteilles en plastique vide datant de plusieurs décennies. Nestlé aurait promis de dépolluer la zone.
  • L'héritière de la richissime famille Bouloumié, qui a fondé la société des eaux de Vittel et est donc à l'origine de l'exploitation des nappes phréatiques aussi bien que du développement industriel et touristique de la localité de 4'000 habitants. «En 1991, le groupe Nestlé, jusque-là actionnaire minoritaire, prend le contrôle de la société familiale, de ses terres et de ses forages», avance la voix-off.
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Le spectre d'un départ de Nestlé a de quoi être effrayant pour la santé économique des municipalités. «Un quart du budget de Vittel est assuré par Nestlé», continue le reportage. Dans un e-mail, l'entreprise suisse assure à Envoyé spécial «qu'elle continuera à s'impliquer dans le tissu économique et social de la région.»

Les syndicats veulent «zéro licenciement»

Une manifestation est prévue ce samedi. Les exigences des syndicats sont les suivantes: «zéro licenciement» en privilégiant des aménagements de fin de carrière et des départs volontaires.

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«Nous comprenons l'émotion que peut susciter l'annonce de ce projet de réorganisation auprès de la population locale», a indiqué Nestlé Waters dans un communiqué paru au début du mois. Le géant suisse de l'alimentation tâcherait de «proposer les meilleures solutions d'accompagnement possibles aux salariés concernés» et estime avoir «investi plus de 63 millions d'euros dans cette usine au cours des trois dernières années».


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