Boom du hate-watching
La haine envers Meghan Markle devient un véritable mode de vie

Avec sa nouvelle série Netflix «With Love, Meghan», la duchesse Meghan déclenche un boom du visionnage alimenté par la haine. Voici pourquoi la belle-fille du roi Charles III est visée.
Publié: 09.03.2025 à 22:30 heures
1/5
La nouvelle série «With Love, Meghan» s'attire les critiques médiatiques et une shitstorm sur les réseaux sociaux.
Photo: JAKE ROSENBERG/NETFLIX
RMS_Portrait_AUTOR_766.JPG
Flavia Schlittler

La duchesse Meghan pourrait sauver un chiot des flots et on lui reprocherait de porter une montre Cartier de 24'000 francs. Tout ce que la belle-fille du roi britannique Charles III dit, fait ou ne fait pas est décortiqué dans les moindres détails, jeté sur la place publique, piétiné et détesté.

Depuis le 4 mars, sa série lifestyle en huit épisodes «With Love, Meghan» est disponible sur Netflix. Vendredi, la plateforme de streaming a annoncé que la série avait été renouvelée pour une deuxième saison. Dans une propriété de luxe qu'elle loue, l'ex-actrice américaine fait griller du bacon, gonfle des ballons et fabrique des glaçons avec des fleurs comestibles.

Pour beaucoup de spectateurs, c'est too much. Le «Telegraph» britannique a qualifié le show d'un «un étalage de narcissisme», «The Times», lui reproche de présenter son «extrême richesse et son style de vie exclusif», «comme si cela était accessible à tous». Le «Daily Mail» calcule ses tenues de luxe et arrive à un total de 156'208 euros.

La cuisine en vêtements clairs: no way !

Le fait que la duchesse, vêtue de vêtements clairs, cuisine des spaghettis à la tomate sans se tacher semble en froisser plus d'un. On peut aimer ou non «With Love, Meghan», se détendre ou s'énerver pendant son inoffensive série de cuisine et de bricolage. Mais avec son émission, la duchesse déclenche un boom de ce qu'on appelle le hate-watching, soit: regarder avec haine. Le spectateur regarde un certain contenu parce qu'il le rejette et le déteste. 

«
Celui qui se moque de Meghan Markle signale à l'extérieur une attitude claire, que ce soit en tant que spectateur prétendument intelligent, moralement supérieur ou de bon goût
Pamina Syed Ali, collaboratrice scientifique à l'Institut des sciences de la communication de l'université de Zurich
»

Pamina Syed Ali, collaboratrice scientifique à l'Institut des sciences de la communication et de la recherche sur les médias de l'université de Zurich, explique: «Le hate-watching offre à de nombreuses personnes une possibilité d'identification sociale. Celui qui se moque de Meghan Markle signale à l'extérieur une attitude claire, que ce soit en tant que spectateur prétendument intelligent, moralement supérieur ou de bon goût.»

La haine forme les groupes

A cela s'ajoutent des mécanismes de formation de groupes et d'intégration. «Le fait de se moquer ou de haïr ensemble renforce le sentiment d'appartenance à une communauté. Le plaisir de nuire joue également un rôle. En psychologie des médias, on parle d'un mécanisme dans lequel les gens apprécient que des personnes prétendument supérieures se retrouvent dans une situation embarrassante ou vulnérable», explique Pamina Syed Ali.

«
Ce mécanisme est particulièrement visible dans les débats en ligne, où les critiques de Meghan sont souvent intégrées dans des récits racistes et misogynes
»

Selon elle, le hate-watching à l'égard de la duchesse est aussi le reflet de préjugés sociaux. «En tant que femme noire occupant une position privilégiée, elle ne répond pas aux attentes traditionnelles en matière de féminité et de conformité, ce qui crée un malaise chez de nombreuses personnes. Ce mécanisme est particulièrement visible dans les débats en ligne, où les critiques de Meghan sont souvent intégrées dans des discours racistes et misogynes.»

La colère est devenue une nouvelle monnaie

Ferris Bühler, expert en relations publiques et médias, résume le boom alimenté par Meghan Markle. «Comme de la malbouffe pour notre âme, nous savons que ce n'est pas sain, mais nous ne pouvons tout simplement pas nous empêcher d'être en colère contre elle. Aujourd’hui, la colère est une monnaie d’échange. Détester Meghan est presque devenu un mode de vie», dit-il.

«
Ceux qui n'aiment pas Meghan cliquent quand même sur les articles la concernant et assurent ainsi précisément le succès que ses détracteurs ne lui accordent pas
»

«Les réseaux sociaux et les plateformes de streaming vivent de l'attention, et rien ne retient davantage les gens que les contenus qui les mettent en colère», poursuit Ferris Bühler. Dans ce contexte, les algorithmes renforcent cet effet: plus il y a de réactions négatives, plus il y a de visibilité. «Ceux qui la détestent cliquent quand même sur les articles et vidéos à son sujet, alimentant ainsi son succès.»

Un véritable marché

L'auteur et historien Leonhard Horowski estime que «depuis quelques années, les circonstances politiques et sociales sont globalement si dramatiques et inquiétantes que l'autoproduction de Meghan en fée du bien-être semble hors du temps. Alors que le monde brûle autour de nous, une multimillionnaire explique aux téléspectateurs que nous pouvons tous rendre nos vies bien meilleures en bricolant des décorations à partir de produits extrêmement chers pour le prochain dîner dans notre villa de super riches.» Pour lui, il est donc déjà intégré dans le concept de base de la série «que beaucoup vont s'en moquer».

Entre-temps, il existe un véritable marché pour l'aversion envers la duchesse de Sussex, selon Ferris Bühler. «Les mèmes, les commentaires haineux et les critiques acerbes assurent des recettes publicitaires, à ses dépens. Ce n'est pas juste pour Meghan. Au final, ce phénomène en dit plus sur nous que sur la personne que nous regardons.»

Découvrez nos contenus sponsorisés
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la