Les réactions au discours du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, devant le Congrès des États-Unis montrent le fossé entre les républicains. D'un côté, certains veulent continuer à soutenir financièrement la lutte de l'Ukraine contre la Russie, et de l'autre côté, d'autres voient d'un œil de plus en plus critique les milliards de l'aide américaine. Washington a déjà injecté près de 50 milliards de dollars dans la guerre en Ukraine, et 45 milliards supplémentaires doivent être votés ce vendredi.
«Est-ce suffisant? Pas vraiment», a déclaré le président ukrainien. Dans les rangs des républicains, ces mots ont parfois suscité l'irritation. Alors que les démocrates ont rendu hommage à Volodymyr Zelensky en bloc par une standing ovation. Chez les conservateurs, certains auditeurs sont restés ostensiblement assis, notamment Lauren Boebert, Matt Gaetz et Jim Jordan.
Contre les «chèques en blanc»
Les détracteurs soupçonnent notamment un manque de contrôle dans l'utilisation des fonds alloués. Au vu des promesses sans cesse renouvelées, ils qualifient les paiements de «chèques en blanc». D'autres font remarquer qu'ils préféreraient utiliser l'argent dans leur propre pays.
«Pas assez? Qu'est-ce qui est suffisant? J'en ai assez», s'énerve le député républicain Andy Biggs sur Twitter. «Pas de chèque en blanc pour l'Ukraine», demande-t-il. Le républicain Matt Gaetz critique le fait que des milliards de dollars d'impôts soient dépensés pour l'Ukraine alors que les Etats-Unis sont en crise. «C'est la définition de 'l'Amérique en dernier'», déclare-t-il.
Il fait ainsi allusion à la promesse électorale «America first» («l'Amérique d'abord») de l'ex-président américain Donald Trump. Il qualifie les applaudissements pour le président ukrainien au Congrès de «théâtre digne de la Corée du Nord».
La très controversée représentante républicaine Marjorie Taylor Greene est restée totalement à l'écart du discours de Volodymyr Zelensky. Sur Twitter, elle avait déjà critiqué la visite de ce dernier aux États-Unis. À cette occasion, elle a également adressé une pique au président américain démocrate, Joe Biden, en l'accusant d'être piloté par l'Ukrainien. «Bien sûr, le président fantôme vient au Congrès et explique pourquoi il a besoin de milliards de dollars des contribuables américains pour le 51e État, l'Ukraine, a écrit Taylor Greene sur Twitter. C'est absurde. Faites passer l'Amérique en premier!»
Changement de pouvoir à la Chambre des représentants
Victoria Spartz, 44 ans, une républicaine née en Ukraine et membre du Congrès, affirme qu'elle pense que les républicains poursuivront leur soutien à l'Ukraine. Mais dans le même temps, elle se joint à d'autres membres de son parti pour demander à l'administration Biden de rendre davantage de comptes sur la manière dont les fonds alloués par le Congrès sont dépensés.
La critique de certains conservateurs est encore plus explosive, puisque la Chambre des représentants sera contrôlée l'année prochaine par les républicains. Ces derniers disposeront d'une majorité, avec 222 sièges contre 212 pour les démocrates. Le Sénat restera quant à lui dirigé par les démocrates. Compte tenu de la division du Congrès, il devrait devenir plus difficile de voter des dépenses à partir de l'année prochaine.
McCarthy sous pression
Volodymyr Zelensky a tenté de tenir compte de cette situation. Dans un appel aux législateurs, il a déclaré mercredi que l'aide à l'Ukraine n'était pas de la charité, mais «un investissement dans la sécurité et la démocratie mondiales, que nous gérons de manière très responsable».
Il n'a ainsi que partiellement convaincu le député Kevin McCarthy. Le républicain veut se faire élire comme nouveau président de la Chambre des représentants. Il a besoin pour cela des voix de ceux parmi ses collègues de parti qui sont critiques vis-à-vis de l'aide à l'Ukraine.
«C'était un très bon discours, a déclaré Kevin McCarthy à CNN après la visite de Volodymyr Zelensky. Il a énuméré les raisons pour lesquelles le monde libre veut continuer à soutenir son combat. Ma position n'a jamais changé. Je soutiens l'Ukraine, mais je ne signerai jamais de chèque en blanc.»