Ces derniers jours, les Ukrainiens ont intensifié leurs attaques sur le territoire russe. Aux dernières nouvelles, trois dépôts de carburant ont été touchés – dont deux au sud de la Russie et un en Crimée – et deux trains de marchandises ont déraillé à cause d'explosions. L'objectif de l'Ukraine derrière ces attaques? Affaiblir les infrastructures russes afin de préparer la contre-offensive. Et pour cause: le lancement de cette dernière devrait avoir lieu dans les prochains jours.
Or, si les attaques de trains et de dépôts de carburant sont déjà d'une importance majeure, ce n'est rien comparé à la dernière en date. Dans la nuit de mardi à mercredi en effet, des drones auraient également visé... le Kremlin! Selon Moscou, deux appareils ukrainiens auraient été abattus en plein Moscou et, qui plus est, leur utilisation aurait été expressément autorisée par les États-Unis. À noter que Kiev conteste tout cela avec véhémence.
Provoquer Poutine, est-ce vraiment une bonne idée? Le fait que l'Ukraine s'aventure de plus en plus sur le territoire russe inquiète l'Occident. En témoigne la déclaration de la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, après l'attaque sur le Kremlin. «Depuis le début du conflit, les États-Unis n'encouragent ni ne permettent en aucun cas à l'Ukraine de frapper au-delà de ses frontières. Nous avons été très clairs à ce sujet dès le début», a-t-elle affirmé.
Sur la guerre en Ukraine
Ce discours montre que les États-Unis nient fermement les affirmations de Moscou sur leur position dans ces attaques. Mais l'Ukraine agit-elle vraiment de son propre chef? Et dans quelle mesure est-elle disposée à mener à bien sa contre-offensive? L'expert militaire allemand Ralph D. Thiele, de l'Institut de conseil en stratégie, politique, sécurité et économie (ISPSW) à Berlin, a dressé pour Blick un tableau de la situation.
Ralph D. Thiele, l'Occident aide-t-il l'Ukraine à commettre des attentats en Russie?
Nous ne disposons pas de sources fiables à ce sujet. On entend tout de même dans les milieux des forces spéciales que quelques rares États occidentaux aident à préparer et soutiennent des actes de sabotage sur le sol russe grâce à leurs services de renseignement. En même temps, on s'inquiète de savoir si ces actions sont suffisamment réfléchies et mesurées et si certains acteurs ukrainiens ne risqueraient pas de dépasser les bornes. La véritable préoccupation de l'Occident est une escalade incontrôlée du conflit.
Y a-t-il un risque de réponse nucléaire de la part de la Russie?
D'un point de vue général, il y a un risque de double escalade, qu'elle soit successive ou simultanée. Cette escalade pourrait être verticale, c'est-à-dire qu'il y aurait une augmentation de troupes et d'armes ainsi que de plus en plus de dévastation et de violence, jusqu'à une première utilisation d'armes nucléaires tactiques. Mais cette escalade pourrait aussi être horizontale: il y aurait alors des embrasements généralisés qui seraient en mesure de toucher les pays voisins de l'Ukraine également et même des régions éloignées, comme en Afrique par exemple.
Les Ukrainiens sont-ils réellement capables d'attaquer le Kremlin?
Les drones utilisés lors de la dernière opération étaient trop petits pour parcourir les quelque 600 kilomètres qui séparent l'Ukraine de Moscou. Ils ont donc probablement été lancés depuis le sol russe. Par qui, cela reste toutefois sans réponse. Toujours est-il qu'il y a une semaine, un drone de type UJ-22 Airborne s'est mis en route depuis l'Ukraine en direction de Moscou, avant de s'écraser, apparemment par manque de carburant, peu avant la capitale russe.
Où en est l'armée ukrainienne concernant sa contre-offensive?
La situation est ambivalente. Les systèmes d'armes livrés, comme les chars et l'artillerie, suffisent pour des offensives tactiques uniquement, c'est-à-dire pour des offensives de petite envergure et locales. Les munitions restent rares, les stocks occidentaux sont épuisés. En outre, de nombreux soldats ukrainiens expérimentés ont perdu la vie. La contre-offensive se base surtout sur les riches informations des services de renseignement occidentaux, le moral des combattants ukrainiens ainsi que les négligences russes. Cette situation permet quelques surprises, mais ne constitue pas une base fiable pour le succès espéré par l'Ukraine.