Alors que la guerre fait rage
Plusieurs émissaires espèrent arracher une trêve à Khartoum

Les combats faisaient rage lundi à Khartoum et dans d'autres régions du Soudan entre les camps des deux généraux rivaux. Les discussions sur une trêve entre leurs représentants piétinent en Arabie saoudite.
Publié: 08.05.2023 à 20:40 heures
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Dernière mise à jour: 08.05.2023 à 20:41 heures
Les combats ont provoqué un vaste exode des habitants des régions touchées, l'ONU parlant de 335'000 déplacés et 117'000 réfugiés. Ici, un camp de réfugiés au Soudan du Sud.
Photo: PETER LOUIS

Dans la capitale, cinq millions d'habitants vivent pour la quatrième semaine consécutive barricadés chez eux, par peur des balles perdues.

Sans eau ni électricité, avec des stocks de nourriture quasiment à sec et de moins en moins d'argent en poche, ils survivent sous une chaleur écrasante grâce à des réseaux de solidarité entre voisins et proches.

Le réseau téléphonique ou internet va et vient au gré des efforts des compagnies de télécommunications qui peinent à trouver du carburant pour faire tourner les générateurs.

Depuis le 15 avril, les combats opposent le camp du chef de l'armée Abdel Fattah al-Burhane et celui du patron des Forces de soutien rapide (FSR) Mohamed Hamdane Daglo, qui avaient pourtant mené ensemble un putsch en 2021.

Les nombreuses trêves annoncées n'ont quasiment pas été respectées et l'ONG Acled dénombre déjà plus de 750 morts dans le pays. Les autorités soudanaises recensent quant à elles 5000 blessés.

Négociations difficiles en Arabie saoudite

De l'autre côté de la mer Rouge, à Jeddah en Arabie saoudite, les émissaires des deux camps sont censés négocier une trêve. Ces «pré-discussions» sont uniquement «techniques», tempèrent depuis plusieurs jours les négociateurs soudanais et internationaux.

Elles ne concernent aucun volet politique dans un pays en plein marasme depuis le putsch de 2021. Elles se limiteront, assurent les experts, à dégager des corridors sécurisés pour l'aide humanitaire qui arrive sur la côte est, à Port-Soudan, afin de nourrir et soigner les civils pris au piège à Khartoum et au Darfour, autre région très touchée par les affrontements, située dans l'ouest frontalier du Tchad.

Dans ces deux zones, quasiment plus aucun hôpital ne fonctionne et les réserves humanitaires ont été bombardées ou pillées dans leur majorité.

Les pourparlers à Jeddah n'ont cependant pas débouché sur des «progrès majeurs» pour l'instant, affirme à l'AFP un diplomate saoudien au deuxième jour des discussions. Le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, arrivé dimanche à Jeddah, a demandé à y participer.

Pour la spécialiste du Soudan Kholood Khair, le manque de résultat n'est pas surprenant. Avec ces pourparlers, les deux camps cherchent surtout «à s'attirer les bonnes grâces des Saoudiens et des Américains, plutôt que d'arriver à un accord», dit-elle à l'AFP.

De plus, les partisans d'un pouvoir civil, écartés depuis le putsch et qui font le lien avec les humanitaires sur le terrain, ne sont pas représentés à Jeddah. Tout comme les acteurs qui pourraient changer la donne, comme les Emirats arabes unis, grands alliés de Daglo, et l'Egypte, partenaire historique de l'armée soudanaise. Ces deux pays «sont les seuls qui sont parvenus jusqu'ici à arracher une trêve et à la faire respecter, dit-elle.

La guerre a débuté le 15 avril après l'échec des négociations politiques sur l'intégration des FSR à l'armée.

Tentatives fragiles de l'Union africaine pour rétablir le dialogue

Parallèlement aux Américains et Saoudiens, l'Union africaine, qui a suspendu le Soudan en 2021 et n'a donc plus de grands leviers de pression, et l'Igad, le bloc régional d'Afrique de l'Est dont fait partie le pays, tentent d'organiser des discussions sous l'égide du président du Soudan du Sud, Salva Kiir.

Ce dernier a reçu lundi à Juba un émissaire du général Burhane, pour qui les discussions de Jeddah ne diminuent pas «le rôle que l'Igad et le président Salva Kiir» pourrait jouer dans les négociations entre les deux généraux.

Les combats ont provoqué un vaste exode des habitants des régions touchées, l'ONU parlant de 335'000 déplacés et 117'000 réfugiés. En pleine crise économique, l'Egypte a déjà accueilli plus de 60'000 réfugiés soudanais.

Son chef de la diplomatie, Sameh Choukri, était lundi au Tchad, un autre voisin du Soudan, qui a accueilli plus de 57'000 personnes fuyant la guerre.

(ATS)

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