100 millions depuis deux ans
La Suisse paie-t-elle assez pour abolir la faim dans le monde?

La Confédération soutient le Programme alimentaire mondial avec des contributions record depuis deux ans. Mais la pression pour augmenter la part des subventions suisses s'accroît.
Publié: 24.07.2022 à 21:04 heures
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Paysans ukrainiens lors de la récolte dans les environs d'Odessa.
Photo: EPA
Simon Marti

Vendredi, des représentants de l’Ukraine et de la Russie se sont engagés à Istanbul à rouvrir la mer Noire aux exportations de céréales. Avec la conclusion de cet accord, des millions de tonnes de céréales, bloquées depuis le début de la guerre, pourraient enfin être exportées. Une denrée dont de nombreux pays ont un besoin urgent.

Malgré cette avancée positive, le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU continue d’appeler la communauté internationale à augmenter ses contributions. Cette année, le PAM estime à plus de 22 milliards de dollars américains les coûts nécessaires pour éviter le pire dans des pays comme l’Afghanistan, le Yémen, le Soudan ou la Somalie – des pays où la faim fait rage même lorsque la situation du marché est stable. Mais il n’est pas certain que les fonds nécessaires soient réunis. Seule la moitié a été effectivement allouée jusqu’à présent.

Mêmes contributions qu’en 2021

L’engagement de la Suisse est également discuté. C’est la Direction du développement et de la coopération (DDC) du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) d’Ignazio Cassis qui est responsable de la contribution de la Confédération.

Contacté par Blick, le département explique que la Suisse vise pour 2022 des contributions totales de 100 millions de francs au PAM. Soit la même somme qu’en 2021. Jamais la Suisse n’a contribué davantage. «Si la situation de 2022 devait se poursuivre en 2023, ce qui est à prévoir, la DDC pourrait décider de contributions d’un montant similaire», prévoit le DFAE.

La famine menace 350 millions de personnes

La pression exercée sur la Confédération pour qu’elle ajoute rapidement des fonds s’accroît. Le Suisse Jakob Kern est vice-chef d’état-major du PAM. Dans le podcast suisse «Agrarpolitik», spécialisé dans la politique agricole, Jakob Kern y assure que la Suisse aurait pu absorber l’interruption des livraisons ukrainiennes à elle seule. Mais de nombreux pays ont ensuite réduit leurs exportations par prudence. La spirale de l’augmentation des prix ne s’est pas arrêtée. Près de 350 millions de personnes sont désormais menacées par la famine dans le monde. Des moyens supplémentaires de la part de la Suisse seraient les bienvenus, estime le vice-chef d’état-major du PAM.

Fin juin, la Commission de politique extérieure du Conseil national a pourtant rejeté de justesse la proposition d’augmenter rapidement l’engagement du PAM de 200 millions de francs. Douze parlementaires ont voté pour, treize contre. Le débat au Parlement se poursuivra en septembre: son issue reste encore incertaine.

«La Suisse a une responsabilité»

Dans ce contexte, les choses doivent aller vite, affirme la conseillère nationale des Verts Christine Badertscher. «En tant que pays riche, la Suisse a une responsabilité dans cette situation.» Comme le processus parlementaire s’étend jusqu’à la fin de l’année, il serait indiqué que le Conseil fédéral accélère le rythme avec une proposition, souligne la Bernoise.

Actuellement, la discussion tourne autour du financement de l’aide d’urgence, pointe la conseillère nationale. «Mais nous ne pouvons pas éviter de réfléchir à la manière de rendre les États concernés moins dépendants des importations de denrées alimentaires.» Il faut des mesures qui soient encore efficaces lorsque les exportations de l’Ukraine auront repris.

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