Dans différentes régions, en Grande-Bretagne et en Italie notamment, les experts ont constaté une augmentation des décès chez les patients âgés de 25 à 49 ans atteints d'un cancer de l'intestin. Une tendance plus qu'alarmante, à quelques jours de la journée mondiale contre le cancer.
Qu'en est-il de la situation actuelle en Suisse? Natalie Kuchen est spécialiste en chirurgie viscérale et oncologique à la clinique Hirslanden de Zurich. Elle observe cette évolution d'un regard plutôt inquiet: «Nous avons de plus en plus de jeunes patientes et patients atteints de cancer de l'intestin», confie-t-elle à Blick.
Les jeunes ne prennent pas leurs symptômes au sérieux
«L'évolution d'un cancer de l'intestin est souvent plus agressive chez les jeunes», explique la spécialiste. «C'est probablement parce que chez les jeunes patients, la tumeur est découverte plutôt plus tard, car les jeunes patients ne pensent pas immédiatement au cancer lorsqu'ils ont des douleurs abdominales.»
Selon la spécialiste, les jeunes personnes concernées viennent généralement la voir très tard: elles partent en général du principe qu'il s'agit de quelque chose d'inoffensif. «La maladie est souvent découverte à un stade avancé, ce qui limite les possibilités de traitement.»
Douleurs abdominales, sang dans les selles, perte de poids...
Ce type de cancer est particulièrement insidieux: les personnes concernées ne remarquent rien au début de la maladie. «Il n'y a pas de symptôme principal à proprement parler», explique la Doctoresse Kuchen. «La plupart des troubles n'apparaissent qu'à des stades avancés de la tumeur ou en cas de grosse tumeur.» Les symptômes sont par exemple des douleurs abdominales, du sang dans les selles, une occlusion intestinale ou d'autres irrégularités des selles, une anémie, une carence en fer et une perte de poids involontaire.
Selon les données de la Ligue suisse contre le cancer, le nombre de cancers du côlon chez les personnes de moins de 50 ans a légèrement augmenté en Suisse depuis 1996. Le nombre de décès chez les patients atteints de cancer du côlon entre 25 et 49 ans n'a toutefois pas augmenté.
La porte-parole de la Ligue suisse, Stefanie de Borba, reste prudente: «Même si l'augmentation du nombre de cancers du côlon chez les moins de 50 ans est plutôt faible en Suisse et qu'aucune augmentation des décès n'est enregistrée, la situation doit néanmoins être observée, notamment au regard des évolutions à l'étranger.»
Le mode de vie occidental serait en cause
D'où vient donc l'augmentation massive des taux de mortalité en Grande-Bretagne par rapport à 2018, alors que 38,6% de femmes et 26,1% d'hommes en plus meurent aujourd'hui d'un cancer de l'intestin? «Il est difficile de répondre à cette question», admet Natalie Kuchen. «Un des facteurs possibles pourrait être des délais d'attente beaucoup plus longs dans les systèmes de santé non suisses, qui entraînent de longs retards entre le diagnostic et le début du traitement.»
Les causes du cancer de l'intestin ne sont pas encore clairement établies. «On suppose qu'il est lié au mode de vie occidental», explique la spécialiste. Les raisons possibles seraient l'obésité, la restauration rapide, la consommation importante de viande rouge, l'alcool, la nicotine et le manque d'activité physique. «La distribution accrue d'antibiotiques pendant l'enfance fait également l'objet de discussions», glisse l'experte.
La Doctoresse Kuchen recommande un mode de vie sain, une alimentation équilibrée ainsi que beaucoup d'exercice physique pour éviter la maladie. Les personnes ayant des cas de cancer de l'intestin dans leur famille ou souffrant de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin devraient se soumettre à des examens de dépistage précoces. «Plus le cancer de l'intestin est détecté tôt, plus les chances de guérison sont élevées.»
Ablation des polypes en cas de dépistage précoce
En Suisse, le dépistage est normalement recommandé à partir de 50 ans, comme l'explique le gastroentérologue Stefan Groth, de la clinique Hirslanden à Zurich. «Le standard du dépistage précoce est la coloscopie. Le sens et le but de cet examen est d'examiner la muqueuse intestinale à la recherche de précurseurs du cancer de l'intestin, appelés polypes, et de les enlever aussitôt détectés.»
Une autre méthode serait les tests de recherche de sang dans les selles. Ils ne sont toutefois pas aussi précis que la coloscopie, car les polypes, surtout les plus petits, ne sécrètent généralement pas de sang. «Si le test des selles s'avère positif, une coloscopie est ensuite recommandée», rappelle Stefan Groth.