En automne, deux équipes s'affrontent: la team pumpkin spice qui se pavane joyeusement entre les arbres coiffés de couronnes dorées, et la team zombie qui met quarante-cinq minutes à se lever et démarre chaque journée en grognant. Spoiler: ce sont souvent les deuxièmes qui gagnent...
Car hormis les indéniables atouts de séduction dont peut se vanter la saison froide (deux mots: fromage fondu), la science a maintes fois démontré qu'elle perturbe notre horloge interne et mine notre moral, en raison d'une baisse d'exposition à la lumière du soleil. Et les choses ne sont pas près de s'arranger, puisque nous venons de changer d'heure, signifiant que la nuit continuera de grignoter le jour jusqu'au solstice d'hiver...
En plus de tous les impacts bien connus du blues d'automne, on peut se demander si cette chute de luminosité influence également la libido, potentiellement délaissée au profit de soirées pyjamas-pantoufles dans le canapé. Les études scientifiques parues à ce sujet ne sont malheureusement pas très claires. En d'autres termes, elles sont aussi nombreuses que contradictoires.
Un phénomène largement individuel
Une recherche parue en 2012 observe notamment une explosion des recherches de sites pornographiques durant l'hiver, tandis qu'une autre étude réalisée en 2011 souligne une augmentation des taux de testostérone, une hormone liée au désir sexuel, durant l'automne. Les œstrogènes, en revanche, connaissent parfois un pic en été pour baisser légèrement en hiver, bien que ces variations hormonales soient hautement personnelles et pas toujours présentes, selon les individus.
Jusqu'ici, la saison froide semble plutôt booster le désir. Or, une publication plus récente parue en 2021 affirme que les changements de saison et de luminosité n'impactent pas du tout le désir sexuel des hommes. En 2017, des chercheurs californiens ont également souligné que le manque de lumière peut influencer négativement l'humeur et la libido.
«Le désir est quelque chose de très complexe, tempère la Dre Felice Gersh, gynécologue et autrice, auprès du média Bustle. Il reste encore beaucoup d'inconnues, donc il est important de ne pas faire de généralisations lorsqu'il s'agit du lien entre la météo et le sexe. La température extérieure joue clairement un rôle, mais il ne s'agit que d'un facteur parmi beaucoup d'autres.»
Le risque des libidos désynchronisées
L'impact est toutefois possible, ainsi que le confirme Anne-Claude Rossier Ramuz, thérapeute de couple et sexologue à Vevey: «Parfois, l'un ou l'autre des partenaires peut évoquer la saison froide comme une période redoutée en lien à des facteurs 'chrono biologiques' qui affectent l’humeur, l’énergie vitale et donc la libido, analyse-t-elle. Face à la baisse des températures, au manque de lumière et aux journées plus courtes, les personnes plus sensibles à ces variations saisonnières vont ressentir une différence dans leur désir sexuel.»
Rappelons que si la saison des plaids tricotés en mailles géantes et des chaussons à oreilles de castor diminue votre envie de sexe, ce n'est absolument pas grave! Tant que vous n'en souffrez pas et que votre partenaire est aussi favorable que vous à une petite hibernation, il n'y a pas de réel problème. Les choses se compliquent cependant lorsque la situation suscite un déséquilibre, une forme de souffrance ou de frustration chez l'un ou l'autre.
Notre experte estime en effet que ce genre de phase, lorsque les partenaires vivent un écart dans leur désir, sont à l'image d'autres moments de la vie, comme les périodes de maladie, de déprime, de préoccupations familiales ou de souffrance au travail: «Ces phases peuvent en effet être source de malentendus, avec des sentiments de rejet et de frustrations d’un côté ou de culpabilité et de repli de l’autre.»
Ce n'est pas une catastrophe!
À ce propos, la sexologue se montre rassurante, rappelant que les partenaires peuvent accueillir ces phases comme quelque chose qui fait partie de la vie de leur relation: «Plus ils et elles pourront communiquer sur leurs ressentis, leurs besoins, leurs envies et leurs limites, moins ils courront le risque que la frustration réciproque ne conduise à un 'gel de l’intimité', précise Anne-Claude Rossier Ramuz. Ces phases plus sombres peuvent aussi être une occasion pour découvrir d’autres manières de nourrir le lien, de s’apporter du réconfort et du plaisir, même si la météo n'est pas au beau fixe.»
Et cela vaut évidemment pour n'importe quelle période de l'année, que cette baisse de désir temporaire soit causée par une météo glaciale ou un événement de vie particulier.
Relâcher la pression pour retrouver le désir
Une période constituée de désirs désynchronisés, peu importe la saison, peut en outre représenter une véritable opportunité de grandir ensemble et de renforcer la relation, tant que nos besoins sont clairement exprimés: «Ces phases peuvent aussi offrir l’opportunité de découvrir que le désir sexuel peut prendre des formes et des couleurs différentes en fonction de ce que l’on traverse, ajoute notre intervenante. Si la sexualité est teintée d'une notion de performance qui doit conduire systématiquement à la satisfaction de l’autre, il va être difficile d’accepter les modulations du désir.» En d'autres termes, si on parvient à lâcher la pression, le désir a plus de chances de ressurgir.
Notre experte souligne par ailleurs que le désir ne se manifeste pas toujours de manière spontanée: «Il est aussi amené ou réveillé lorsque les partenaires peuvent s’inviter et se rencontrer pour le plaisir de la tendresse, du corps-à-corps, de la connexion érotique qui ne se résume pas à l’orgasme.»
Ne jamais hésiter à communiquer ouvertement
Comme souvent, lorsqu'il s'agit des relations de couple, la thérapeute encourage chaque partenaire à communiquer, afin d'éviter l'enracinement de rancœur, de sentiment de culpabilité ou de colère: «Lorsque les partenaires se sentent suffisamment sécures dans leur lien, il est plus facile de communiquer sur ce qui se passe, d’identifier les causes d’une période où le désir sera moins spontané ou réduit, de partager et accueillir ses ressentis. Cela favorise un climat d’acceptation mutuelle et permet d’éviter une culpabilité néfaste.»
Si vous rencontrez des difficultés pour aborder le sujet ou que la situation devient pesante, n'hésitez jamais à vous tourner vers une ou un professionnel qui saura vous apporter l'aide nécessaire. En cas de chute de désir soudaine, inexpliquée et très inhabituelle, n'hésitez jamais à consulter votre médecin, qui pourra vérifier la présence d'un éventuel trouble de la santé physique ou mentale.