Nous connaissons les influenceurs classiques: Ceux qui lancent les tendances de maquillage, de mode, d'entraînement physique ou qui mettent en scène leur vie.
Découvrez à présent une nouvelle génération: les influenceurs du Christ, ceux qui partagent leur foi sur Instagram.
«La pandémie a catapulté l'Église 100 ans en avant en termes de réseaux sociaux», déclare Priscilla Schwendimann. La jeune femme, lesbienne, a acquis une certaine notoriété ces derniers mois en tant que première «pasteure arc-en-ciel». Avec sa collègue, Claudia Steinemann, elle parle de foi, sexualité, genre ou maladies mentales sur sa chaîne «Holy Shit». Le tout filmé de manière décontractée, dans un studio improvisé de l'église de Kölliken, en Argovie.
Elles ont rejoint une plus vaste tendance. En France, le nombre de pasteurs et de prêtres actifs sur Tik Tok a explosé depuis le Covid, alors que les services religieux n'étaient plus autorisés. Les églises ont alors cherché à rester en contact avec leurs fidèles en ligne.
Avec succès: lorsque le tiktoker vedette français Matthieu Jasseron, de l'archevêché de Sens-Auxerre, fait une vidéo «déballage» (sauf qu'au lieu de se maquiller avec du maquillage qu'on lui a envoyé, il expose des bougies), il est regardé par 400'000 personnes. L'essor est tel que la Conférence des évêques de France a réuni un groupe de travail sur Tiktok.
Chercher le contact avec les gens
L'Église catholique de la ville de Zurich a également lancé récemment sa propre chaîne YouTube et Instagram appelée Urbn.K. Un acte de désespoir pour empêcher l'Église de mourir? «Nous voulons entrer et rester en contact avec les gens. La foi est liée à la relation entre l'Église et les fidèles», déclare Uwe Burrichter, co-doyenne. Les vidéos d'Urbn.K sont conçues dans un style pop, le langage est direct. Les présentateurs posent la question suivante: «Avons-nous encore besoin de l'Église?»
Dieu et Instagram font bon ménage, estime Uwe Burrichter: «Les réseaux sociaux permettent aux gens de se connecter, de créer des réseaux, de partager. C'est une communauté, et la communauté fait partie de la foi. D'ailleurs, je pense qu'il est très probable que Jésus serait sur Instagram et YouTube aujourd'hui! Il a construit une communauté et tous ceux qui l'ont suivi étaient des «followers», au sens propre du terme.»
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Les moines de Sainte-Hyacinthe sur Instagram
Le fait que quelque chose se passe dans les églises est également démontré par l'exemple de la paroisse réformée de Langenthal (BE): la recherche d'un nouveau pasteur a récemment été menée via un podcast Spotify.
Les ordres religieux s'inscrivent également dans le présent. Les dominicains du monastère de Saint-Hyacinthe, à Fribourg, se relaient devant la caméra pour expliquer l'évangile du jour sur Instagram.
Le besoin de spiritualité numérique est grand, affirme Priscilla Schwendimann. Elle assure désormais la pastorale via Insta-message: «Beaucoup de gens trouvent plus facile de me poser certaines questions derrière leur écran qu'à l'église.» En outre, le seuil d'inhibition pour un premier contact est plus faible: «Il est plus facile de cliquer sur une vidéo que d'assister seul à un service religieux pour la première fois.»
À l'avenir, la foi 2.0 ne se fera-t-elle que sur le net? «Non», dit Priscilla Schwendimann. Oliver Krüger, spécialiste des religions à l'Université de Fribourg, pense également que la tendance au tout virtuel ne prendra pas: «Instagram ou Tiktok créent des premiers points de contact, mais les réseaux ne remplaceront pas les rencontres physiques.»
Les «Christfluencers» connaissent un grand succès à l'étranger
Les Églises libres utilisent les réseaux sociaux de manière efficace depuis longtemps. Leo Bigger, par exemple, pasteur de l'International Christian Fellowship à Zurich, compte plus de 27'000 followers sur Instagram. Pour Oliver Krüger, ce n'est pas surprenant que les églises évangélistes aient de l'avance: «Les structures hiérarchiques des églises nationales font que les décisions concernant les nouveaux projets prennent du temps. En outre, les hommes, souvent plus âgés, qui siègent dans les comités ne sont généralement pas très au fait des réseaux sociaux.»
Le succès des «Christfluencers» prend parfois des dimensions surnaturelles. Aux Philippines, le prêtre évangéliste Fiel Pareja compte deux millions d'abonnés sur Tiktok. Un culte de la personnalité virtuel dans l'Église, n'est-ce pas contradictoire? Oliver Krüger: «bien sûr, on peut le critiquer, mais d'un point de vue missionnaire, il est bon que les églises aient des figures de proue populaires sur le net. Autrefois, les pasteurs écrivaient un livre, aujourd'hui ils publient sur Instagram, Twitter ou YouTube.»
Les influenceurs locaux célèbrent actuellement des succès encore plus modestes. La vidéo la plus regardée d'Urban.K a généré 48'000 vues. Mais peut-être que la grande avancée pour les catholiques de Zurich se fera également sur Tiktok, comme le confirme la co-doyenne Uwe Burrichter: «Un projet est dans les starting-blocks».