Ces dernières années, on les a vus fleurir dans les entreprises. Ici, des ateliers de méditation sur la pause déjeuner. Là, un cours de yoga. Pour certains, des séminaires autour de la gestion du stress. Pour d’autres, des salles de sieste. Pour d’autres encore, des applications de gestion du sommeil. Partout, ou presque, des initiatives destinées à améliorer le bien-être au travail. Avec, en ligne de mire, une meilleure productivité.
Mais est-il vraiment efficace de transformer les salles de réunion en salles de sport pendant les pauses? Une étude britannique menée sur plus de 46’000 salariés vient d’être publiée dans la revue «Industrial Relations Journal». Et son résultat est sans appel: il n’existe aucune différence notable entre les salariés qui bénéficient effectivement de ces ateliers bien-être par rapport à ceux qui n’y participent pas.
«Ces programmes ne fonctionnent pas»
William Fleming, docteur en sociologie, chercheur à l’Université d’Oxford et auteur de l’étude, a sélectionné les salariés dans 233 groupes britanniques. Ce qui est particulièrement pertinent puisqu’au Royaume-Uni, plus de la moitié des structures disent avoir mis en place des initiatives pour améliorer le bien-être de leurs travailleurs. Tous ont ensuite évalué leur niveau de stress, de satisfaction au travail, ou encore leur sentiment d’appartenance à l’entreprise. Et les résultats ne montrent globalement pas de différence sur la santé mentale entre les participants et les non-participants à ces initiatives.
Pire encore, c’est parfois l’inverse! Les salariés qui participent à des formations sur le management au stress ou la résilience sont plus susceptibles de déclarer qu’ils subissent une pression abusive sur leurs deadlines, ou qu’ils travaillent dans un environnement stressant. «Ce sont des résultats très controversés, mais ces programmes pourtant populaires ne fonctionnent pas», tranche William Fleming dans les colonnes du «New York Times». Il existe une seule exception: le fait de participer à des actions de charité, ou de faire du bénévolat, améliore en effet la santé mentale, mais dans des proportions très faibles.
Vers des changements plus structurels
Pour le sociologue, ce n’est pas très surprenant. «Il y a un consensus de plus en plus fort autour de l’idée que les entreprises doivent changer l’environnement de travail, pas seulement les travailleurs.» Autrement dit, le problème des siestes et du yoga, c’est qu’il s’agit d’initiatives au niveau individuel. «Je rejoins les chercheurs dans le domaine, pour qui ce sont les interventions au niveau de l’organisation de l’entreprise qui sont les plus efficaces pour améliorer le bien-être au travail», écrit William Fleming dans les conclusions de son étude.
Le spécialiste cite notamment «les changements d’organisation du temps de travail et des pratiques managériales», mais aussi la gestion des effectifs et l’évaluation des performances des salariés. «Il faut se focaliser sur les bénéfices à tirer des changements organisationnels plutôt qu’individuels», résume William Fleming.