Faut-il absolument se coucher avant minuit, sept heures avant la sonnerie du réveil, ou seulement lorsqu'on se sent fatigué? Préparez vos tisanes et vos pantoufles: une étude réalisée fin 2021 et citée par la Société européenne de cardiologie, vient de clarifier cette épineuse question.
«Le corps possède un rythme circadien, soit une horloge interne enclenchée 24 heures sur 24, qui contribue à réguler le fonctionnement de l'organisme», déclare David Plans, chercheur à l'université britannique d'Exeter et l'un des principaux auteurs de la recherche. Pour cette raison, bien que l'étude épidémiologique ne permette pas d'établir un lien de cause à effet, il semblerait que le fait de se coucher trop tôt ou trop tard soit plus susceptible d'endommager le rythme circadien et d'avoir des effets négatifs sur la santé cardiovasculaire.
L'horaire optimal: entre 22 et 23 heures
Pour aboutir à cette conclusion, les chercheurs ont analysé les données de 88'026 personnes issues du registre britannique «UK Biobank», enregistrées entre 2006 et 2010. L'âge moyen des participants, dont 58% étaient des femmes, s'élevait à 61 ans.
Ces informations, obtenues au moyen de questionnaires détaillés, ont ensuite été comparées à la fréquence d'apparition de maladies cardiovasculaires telles que l'infarctus du myocarde, l'accident vasculaire cérébral et les cardiopathies ischémiques chroniques.
Résultat: l'apparition d'une maladie cardiovasculaire a été enregistrée chez 3'172 participants, soit 3,6%, au cours d'une période d'observation moyenne de 5,7 ans. Le taux le plus faible a été observé chez les personnes s'étant régulièrement couchées entre 22h et 23h.
Se coucher trop tôt est tout aussi néfaste
Ainsi que le souligne la plateforme de l'université américaine Harvard, l'habitude de se coucher trop tard (soit après 23h) est tout aussi contreproductive que celle de s'endormir trop tôt (avant 22h).
En effet, les personnes qui se glissaient sous la couette après minuit voyaient leur risque de contracter une maladie cardiovasculaire augmenter de 25%. Celles qui se couchaient entre 23h et 24h présentaient déjà un risque accru de 12%.
Or, étonnamment, les participants qui tendaient à rejoindre leur lit avant 22h n'étaient pas mieux lotis pour autant: leur risque s'élevait à 24%, soit presque autant que les couche-tard. «S'endormir à partir de 24 heures s'est avéré être le plus risqué, peut-être parce que cela empêche de voir la lumière du jour matinale, indispensable à la régulation de l'horloge interne», résume David Plans.
Les femmes sont plus affectées
Autre constat significatif: dans l'ensemble, l'étude souligne que les effets néfastes d'un coucher tardif sont nettement plus importants pour les femmes que pour les hommes. Ainsi que le précisait la Fondation américaine du sommeil en mars 2024, les rythmes circadiens des hommes et des femmes sont sensiblement différents, dans la mesure où ces dernières ont besoin de dormir davantage.
D'un point de vue purement biologique, les femmes tendent effectivement à présenter un sommeil plus fragmenté (surtout à certains moments du cycle menstruel), bien que leurs phases de sommeil profond soient plus longues et que leurs taux de mélatonine connaissent des pics plus importants. Sans oublier que certaines exigences et pressions sociales, comme l'allaitement et le soin des jeunes enfants, contribuent aussi à accroître leur dette de sommeil, dans de nombreux cas.