Dans son dernier livre «Come Together», la sexologue américaine Emily Nagoski explique que l'idéalisation de la spontanéité nous empêche de prendre du plaisir au lit. Ou à l'inverse, à quel point nous pouvons prendre notre pied, si nous abandonnons les idées sociales entourant un bon rapport sexuel.
Selon elle, de nombreux livres consacrés au sexe dans les relations à long terme traitent de la préservation de «l'étincelle de la passion». Opposée à cette idée, l'experte souhaite mettre fin à l'imbroglio d'erreurs que nous commettons, le plus souvent sur la base d'idées ancestrales, dans le but de préserver une vie sexuelle épanouissante. En voici quelques exemples, qu'elle débusque dans son ouvrage:
- Au début d'une relation, nous devrions ressentir une «étincelle», un désir spontané et vertigineux d'intimité sexuelle. Ce désir peut même être ressenti comme obsessionnel.
- Le désir «étincelant» que nous devrions ressentir au début d'une relation est le seul type de désir correct, sain et normal. Si nous ne le ressentons pas, tout cela n'a aucune valeur.
- Si nous devons préparer ou planifier notre vie sexuelle d'une manière ou d'une autre, c'est que nous ne nous y intéressons secrètement pas assez.
- Si le ou la partenaire ne nous désire pas spontanément, du jour au lendemain, sans effort ni préparation, il ou elle ne nous désire pas vraiment.
Le danger des «impératifs de désir»
Ces impératifs de désir, ainsi que les appelle Emily Nagoski, nous font croire qu'il n'existe qu'une seule manière correcte d'éprouver du plaisir et que tout le reste ne compte pas. Ce qui est ironique, rappelle l'experte, c'est que les personnes qui s'inquiètent de la préservation de l'étincelle jaillissante créent elles-mêmes des obstacles au plaisir. Ce n'est pas la passion qui compte, ni même le désir: «Le plus important, c'est le plaisir», martèle la sexologue.
Emily Nagoski illustre cette opinion par un exemple tiré de sa propre vie. Alors qu'elle avait une vingtaine d'années, elle a entretenu une relation «on-off» avec un homme qui regrettait son ex-petite amie et espérait qu'elle revienne un jour vers lui.
Comme son attitude blessait les sentiments d'Emily, le duo décide d'interrompre la relation pour rester simplement amis. Or, après une fête, ils se retrouvent chez lui, où il se risque finalement à «faire le premier pas».
Le charme de l'interdit
Ainsi qu'elle le souligne dans l'ouvrage, Emily s'est immédiatement dit «J'en ai envie, mais je ne devrais pas», avant de rappeler à l'homme qu'ils s'étaient accordés sur une amitié platonique. Après une discussion, ils décident ensemble de ne faire l'amour qu'une seule et dernière fois.
Si le livre ne précise pas s'ils ont tenu parole ou non, la sexologue explique que son désir s'est envolé dès que la spontanéité et la tentation de l'interdit se sont dissipés, durant leur discussion. «Mais mon histoire ne s'arrête pas à la disparition de mon désir spontané, écrit-elle. Nous avons fait l'amour cette nuit-là, et c'était quand même très amusant. C'était léger, comme un jeu, et pas teinté de désespoir. Et le lendemain, il n'est pas retombé dans ses vieilles habitudes.»
En d'autres termes, Emily Nagoski estime que si elle avait consenti au rapport sexuel sans discuter, ses sentiments auraient été à nouveau blessés, tôt ou tard. Si elle s'était laissée guider par l'idée que seul le sexe passionné né de l'instant présent possède de la valeur, elle aurait fait ses valises et serait partie aussitôt. Elle n'aurait jamais su à quel point elle pouvait s'amuser avec du sexe discuté et «planifié», même en l'absence de l'étincelle rutilante que vantent les films.