Au XIXe siècle, Alphonse de Lamartine, qui avait le sens de la formule, écrivait qu’«il y a des amitiés foudroyantes qui fondent les âmes d’un seul éclair». Mais si Alphonse de Lamartine avait vécu aujourd’hui, à l’heure où l’on change si facilement de ville ou de vie, et où les gens se sentent de plus en plus seuls, peut-être aurait-il constaté que les éclairs se font parfois rares. C’est ainsi que 42,3% des Suisses disent éprouver «parfois», «souvent» ou «très souvent» de la solitude.
Et force est de constater que si toutes les générations sont concernées, il est plus difficile de se faire de nouveaux amis lorsqu’on a terminé ses études. L’école, les études ou la prise d’un premier poste sont autant d’occasions de rencontrer des gens. Mais «quand vous êtes adulte, il peut être difficile de nouer ou maintenir de nouvelles amitiés en raison de changements de vie, comme commencer un nouveau travail, avoir des enfants ou déménager dans une autre ville», souligne Roxy Zarrabi, psychologue clinicienne américaine, dans la revue «Psychology Today». Mais pas de panique, la spécialiste donne cinq astuces pour s’en sortir.
À lire aussi sur la solitude
Evaluer ses besoins
En amitié comme pour beaucoup de choses, Roxy Zarrabi conseille de commencer par le commencement, c’est-à-dire l’évaluation précise de ses besoins et ses envies. Mieux vaut donc se poser des questions indispensables: quels types d’amis est-ce que vous recherchez? Est-ce que vous voulez rencontrer une ou deux nouvelles personnes ou est-ce que vous espérez former un groupe de proches que vous verrez tout le temps? Est-ce que vous voulez des amis pour pratiquer des activités ou pour avoir des discussions profondes et refaire le monde?
Les réponses se trouvent parfois dans ses anciennes amitiés. «Qu’est-ce qui caractérisait celles que vous avez le plus appréciées?», demande Roxy Zarrabi. «Il faut réfléchir aux qualités qui vous semblent importantes chez un ami et le type d’amitié alignée avec vos valeurs.»
S’inscrire à des activités… et sur des applis
Pour rencontrer des gens, il n’y a pas de secret: il faut sortir de chez soi, et pas seulement pour se rendre au bureau ou faire ses courses. Selon Roxy Zarrabi, l’idéal est de trouver des activités régulières, qui se tiennent par exemple toutes les semaines ou tous les mois, comme un cours de cuisine ou de sport. Et ce pour deux raisons: d’abord, parce que vous n’aurez pas la pression de tout de suite vous rapprocher de quelqu’un. «Vous pouvez démarrer une conversation au fil du temps au sein d’un groupe qui se réunit plusieurs fois», souligne la psychologue.
Ensuite, parce que cette régularité produit un phénomène psychologique, qu’on appelle «l’effet d’exposition». Celui-ci veut que plus vous êtes exposé à quelque chose (ou, en l’occurrence, quelqu’un), plus vous êtes susceptible de développer des sentiments positifs à l’égard de cette chose (ou cette personne). Pour vous donner quelques pistes, voici cinq idées d’activités à rejoindre.
Roxy Zarrabi conseille également de viser les applications, qui ne sont pas réservées aux rencontres amoureuses. Sur Facebook, il existe des dizaines et des dizaines de groupes pour réunir les passionnés de quasiment tout ce qui existe, depuis le tricot jusqu’à la rando!
Créer des opportunités sans forcer les choses
Dans la vie, il y a ceux qui font confiance et aux hasards et ceux qui provoquent le destin. Et la psychologue recommande de se ranger dans la seconde catégorie, par exemple en organisant des moments de rencontre avec les amis de ses amis, ou les amis de ses connaissances. «Rencontrer l’ami d’un ami peut accélérer la socialisation», explique-t-elle. «Vous serez déjà à un certain niveau de confort et de familiarité du fait d’avoir un ami commun qui vous met en relation.»
Roxy Zarrabi recommande aussi de ne pas se décourager si les premières tentatives ne donnent rien. «C’est comme le dating, il peut être décevant de se forcer à être sociable et de ne pas trouver le type d’amitié qui nous convient. Mais ne jetez pas l’éponge. Il faut rester ouvert aux opportunités.» Et exactement comme dans la recherche de l’amour, l’experte encourage à poser ses limites. Vous ne vous sentez pas d’affinité avec votre camarade de pilate? Inutile de se forcer. D’autant que ne pas s’accrocher à une relation qui ne vous satisfait pas complètement permettra de «faire de la place» pour une autre plus plaisante.
Et si vous avez du mal à savoir si vous êtes trop difficile ou si ce n’est tout simplement pas un bon «match» amical, concentrez-vous sur ce que vous ressentez après avoir passé du temps avec la personne. Plutôt plein d’énergie, neutre ou vidé? Dans le troisième cas, est-ce que vous vous sentez toujours comme ça après des interactions sociales ou est-ce spécifique à certaines personnes? «Ecouter votre corps, vos niveaux d’énergie et votre réponse émotionnelle vous donnera beaucoup d’informations pour déterminer si une nouvelle amitié vous convient.»
Rester lucide sur sa capacité à nouer des amitiés
L’amitié, ce n’est pas uniquement recevoir. C’est aussi donner, notamment de son temps. Rien que nouer une amitié prend en moyenne… 200 heures, selon une étude menée en 2018 par l’Université du Kansas, aux États-Unis. «Il est important d’évaluer honnêtement votre capacité à en construire une et l’espace que vous avez dans votre vie pour ça», rappelle Roxy Zarrabi. Si vous n’avez pas l’espace mental suffisant, il sera compliqué d’aller au-delà du stade de la connaissance pour devenir réellement ami.
Faire attention aux autres
«Regardez mieux qui se trouve autour de vous.» Le dernier conseil de la psychologue peut sembler évident, et pourtant. Il arrive souvent qu’un collègue, un partenaire de salsa ou une autre membre du club de lecture soit tout aussi disposé que vous à aller prendre un café et discuter plus longuement. Encore faut-il garder les yeux ouverts.
Roxy Zarrabi conseille également de saisir chaque opportunité de démarrer une conversation, que ce soit en attendant le bus ou en faisant de la poterie. «Vous pouvez potentiellement trouver un ami et, si ce n’est pas le cas, c’est toujours un bon entraînement pour plus tard.»