Déprime et angoisse nocturne
Oui, c'est normal que tout semble plus catastrophique quand on rumine pendant la nuit

Les éveils nocturnes ou autres phases d'insomnies peuvent donner lieu à des pensées angoissantes et à une exagération involontaire de certains tracas. Vous connaissez? Une experte souligne qu'il s'agit d'un phénomène normal.
Publié: 03.11.2024 à 21:21 heures
«C'est un phénomène très observé, confirme la Dre Tifenn Raffray, psychiatre et psychothérapeute FMH. Quand on se retrouve éveillé au milieu de la nuit, on peut avoir une vision plus catastrophique des choses.»
Photo: Shutterstock
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Quand on a le malheur de se trouver éveillé au cœur de la nuit, il se produit toute une série de phénomènes étranges. D'abord, le temps passe plus lentement, alors que chaque minute nous rappelle cruellement qu'on ne dort toujours pas. Ensuite, nos pensées changent de teinte, devenant plus sombres, chassant toute once de persévérance et d'optimisme. Les to-do listes se transforment en sentences, les impératifs du lendemain semblent insurmontable et les soucis de la veille nous hantent comme des spectres flottant au-dessus de l'oreiller. On finit par penser à des angoisses qui n'auraient probablement jamais effleuré notre esprit à la lumière du jour.

Vous reconnaissez cette situation? Cette impression que tout est pire quand on y pense durant la nuit? Alors sachez qu'il ne s'agit pas d'une pure invention, puisque des spécialistes du sommeil internationaux étudient le phénomène. Parfois surnommé «dépression nocturne», il se caractérise par une modification de l'humeur survenant durant les phases d'insomnie, qui s'estompe avec le premier chant du coq. Une étude réalisée en 2020 démontre également que les émotions désagréables connaissent un apogée durant la nuit. 

«Il s'agit d'une forme de tristesse, décrit notamment la Dre Therese Miskimen Rivera, présidente de l'Association américaine des psychiatres, auprès du "New York Times". Ce sentiment impacte le mental autant que le corps, surtout quand ces émotions nous empêchent de dormir suffisamment.» 

Pourquoi la déprime nocturne nous impacte-t-elle?

Ainsi que le souligne l'experte au média américain, ce phénomène pourrait être lié à de nombreux facteurs, tels que la solitude, l'insomnie, la consommation d'alcool ou encore une perturbation du rythme circadien, notamment due à des horaires irréguliers ou un changement de saison

Or, la Dre Tifenn Raffray, psychiatre et psychothérapeute FMH au Centre du Sommeil de Florimont, à Lausanne, souligne que pour l'instant, aucune étude scientifique n'a pu déterminer les raisons exactes de cette baisse d'humeur nocturne: «C'est toutefois un phénomène très observé, confirme-t-elle. Quand on se retrouve éveillé au milieu de la nuit, on peut ressentir une distortion de notre perception du temps, accompagnée d’une vision plus catastrophique des choses.»

La raison peut donc être purement physique ou largement mentale: notre intervenante estime en effet que la déprime nocturne peut traduire une anxiété latente ou une période de la vie trop chargée, qui ne nous permet pas de prendre suffisamment soin de nous.

Le cerveau n'a pas fini son travail son «tri»

«Même un réveil très bref peut causer des troubles du sommeil, car le réveil est une embuscade puissante, qui permet à toutes les inquiétudes latentes de s’engouffrer dans la brèche», poursuit la Dre Raffray.

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Quand on n’a pas eu le temps de digérer certaines choses avant de s’endormir, elles peuvent nous rattraper pendant la nuit
Dre Tifenn Raffray, psychiatre et psychothérapeute FMH au Centre du Sommeil de Florimont
»

Si vous traversez une période particulièrement chargée et que la charge mentale s'entasse dans votre cerveau telle une pile de briques, l'experte conseille d'instaurer une période de transition, qui sépare le stress de la journée et le moment du coucher. Cela peut en effet aider le cerveau à terminer son travail de «tri», avant le sommeil: «Parfois, quand on n’a pas eu le temps de classer ou ‘digérer’ certaines choses durant la journée ou avant de s’endormir, elles nous rattrapent pendant la nuit, explique notre intervenante. Le cerveau continue à mouliner et trier, puisqu’il n’a pas eu le temps de le faire durant les heures d’éveil, ce qui peut causer des ruminations.»

Comment s'en protéger?

Pour y parvenir, l'experte recommande des exercices de méditation juste avant de dormir ou encore de garder un petit carnet et un stylo tout près du lit, afin de pouvoir noter les soucis qui risquent de nous tarauder durant la nuit: «On peut aussi se demander quelles mesures pourraient nous aider à mieux gérer ces choses, ajoute-t-elle. Prend-on assez de pauses durant la journée, par exemple?» En facilitant la tâche du cerveau avant de rejoindre Morphée, il devrait être plus à même de nous laisser tranquilles avant l'aube. 

Mais si les ruminations nocturnes sont intenses, qu'elles impactent votre qualité de vie, vous empêchent régulièrement de dormir ou détériorent vos journées entières, n'hésitez pas à vous adresser à un ou une spécialiste du sommeil, qui saura vous aider à identifier un éventuel trouble et retrouver un sommeil paisible. 

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Si vous vous inquiétez pour vous ou un-e de vos proches, contactez de manière confidentielle 24h/7j

147: La ligne d’aide pour les jeunes (147.ch)
143: La main tendue, ligne d’aide adultes (143.ch)
144: Les urgences médicales

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