Longtemps délaissé, on ne jure désormais plus que par lui. Lui, c’est le flan, ce délicieux dessert composé de crème pâtissière vanillée couchée sur une pâte sucrée. En portion individuelle ou en format à partager, il est devenu incontournable.
Adoré par les uns pour sa gourmandise, honni par d’autres pour son côté bloblotant trop marqué en œuf, ce symbole de la pâtisserie française trône plus fièrement que jamais derrière les vitrines des pâtisseries d’ici et d’ailleurs. Voici 4 arguments pour y succomber encore et encore.
Il a le goût de la nostalgie
Dans le cœur des Français, il n’occuperait, selon un sondage OpinionWay pour le Salon de la pâtisserie en juin 2023, que la quatrième place derrière les tartes aux fruits, l’éclair et le millefeuille. Pourtant, outre Jura et ici-bas, tout comme sur les réseaux sociaux dénués de frontières, on ne voit que lui.
Un temps boudé, le flan pâtissier a bien failli ne jamais regagner ses lettres de noblesse. Un statut de dessert chic pourtant bien acquis depuis ses origines, puisqu’il semble que l’entremets ait été créé au XIV siècle pour régaler les convives présents lors du couronnement de Henri VI d’Angleterre en 1399. Une custard tart toujours aussi chère au cœur des Royals de l’autre côté de la Manche, puisque Elisabeth II elle-même l’a voulu en point final du repas célébrant ses 80 ans.
Adoptée par les pâtissiers français, la gourmandise s’est même vue accaparée par les Parisiens, qui, ne reculant devant rien - un peu comme les Genevois avec le Léman - ont voulu y associer leur nom. Chez les connaisseurs, on distingue d’ailleurs désormais le flan pâtissier sans pâte, du flan parisien, avec pâte. Une dénomination il faut l’avouer bien peu respectée.
A travers les années, ce dessert facile à préparer, à base d'ingrédients simples, est devenu un habitué des boulangeries de quartier et des carnets de recettes de la ménagère, perdant peu à peu de son prestige. Réduit à sa version industrielle à base de poudre de flan, il est tombé bien bas: coupé en tranche et nonchalamment posé un morceau de papier gaufré, il a été réduit à incarner la touche sucrée à avaler après son jambon beurre au menu des take away d’autoroute.
Son retour, c’est au confinement qu’il le doit, quand l’humanité en quête de réconfort s’est tournée à nouveaux vers les choses, et les saveurs, simples. Aux côtés de desserts d'antan comme le riz au lait ou la tarte tatin, réinventé, modernisé, upgradé, il a refait sa révolution de palais.
On a le choix de la pâte
«Flan: entremets, crème moulée sucrée à base d'œufs, de lait et de vanille que l’on fait prendre au four» Comme le décrit sobrement la définition prise dans le Dictionnaire de la Gourmandise, il n’y a pas plus simple que le flan. Le secret? Avoir de bons ingrédients, soit, du lait entier, une crème liquide à au moins 30% de matière grasse, des œufs frais, de la vanille. A laquelle on ajoute un peu de fécule de maïs. Voilà pour l’indispensable appareil.
Côté pâte, chacun sa préférence. Au Comptoir Woodward à Genève, le flan pâtissier est devenu l’un des best-sellers, magnifié par Titouan Claudet. Pro de la pâte feuilletée, le talentueux chef du Woodward a bien sûr craqué pour cette option bien beurrée:« J’ai toujours trouvé que dans les flans à base de pâte sablée, au bout de 4-5 heures, celle-ci avait tendance à se détremper. Le côté sympa de la pâte feuilletée, c’est que les couches supérieures du feuilletage bien cuites isolent et permettent de garder du croquant.»
Chez Accaré, à Lausanne, Arnaud Dousse a choisi la pâte sablée, bien plus gourmande à son goût. Quant à Thibaut Honajzer, de The Sweet Sage à Lausanne, qui décline le flan pâtissier en version fruité ces week-ends de printemps, il confie ajouter une petite couche de sablé breton sous son appareil pour absorber l'excédent d’humidité.
Tous les pâtissiers en sont fous
Tout rond, tout blond, le flan pâtissier a fière allure derrière les vitrines. De Christophe Michalak à Pierre Hermé en passant par nos pâtissiers locaux préférés, tous y vont de leur version. Ce dessert, déjà parfait dans sa recette classique, se prêtant à toutes les interprétations. Pour Titouan Claudet, ajouter le flan pâtissier à la gamme du Comptoir Woodward s’est tout naturellement imposé: «Je sais que le flan est apprécié au même titre que des classiques comme la tarte tatin ou la tarte au citron. C’est une pâtisserie élémentaire, un bout de France, un joli clin d’œil aux bases que j’ai pu apprendre. Une pâte feuilletée, un bel appareil qui doit se tenir sans une texture trop coagulée… C’est un dessert si simple en apparence, mais qui requiert de très bons ingrédients et un savoir-faire.»
Proposé actuellement dans sa version «classique», le flan de Titouan devrait laisser libre cours à créativité de son créateur: «On peut tout à fait le décliner, en proposer des versions fruitées, à la pulpe de fruits, garni d’un insert. J’imagine très bien de l’abricot, de la framboise.» Quant à savoir si ce dessert pourrait trouver sa place au cœur du très chic hôtel Woodward dans lequel il officie, et notamment à la table du doublement étoilé Atelier Robuchon, le chef ne voit pas de limites: «Pourquoi pas pour le tea time? Dans une version plus moderne, avec une crème travaillée au siphon, en émulsion.»
Chez Acarré à Lausanne, le flan pâtissier s’inscrit tout à fait dans la démarche d’authenticité: «Pour Antoine et moi, les choses les plus simples sont les meilleures et le flan illustre parfaitement ce qu’on aime faire et manger.» explique Arnaud Dousse. Particularité de la recette du duo créatif? L’absence d'œuf: «Cela nous permet de présenter nos flans aux côtés de nos viennoiseries dans notre vitrine non réfrigérée. Et cela lui apporte une texture bien crémeuse, exempte de cet aspect coagulé qui rebute parfois les gens. On déteste les flans qui ont un goût d’omelette. Pour nous, l’appareil doit être bien crémeux, le dessus bien caramélisé et présenter un bon goût de vanille. Notre secret, c’est une infusion à froid de la vanille pendant 48 heures dans le mélange lait et crème.»
Il cartonne aussi sur Instagram
Bien moulé, bien caramélisé et facile à trancher, le flan coche toutes les cases pour jouer les beaux gosses sur les réseaux sociaux. Précurseur en la matière, le pâtissier amateur Ju Chamallow a été celui qui a lancé la tendance en publiant les versions de son entremet préféré sur Instagram pendant le confinement. Autour de deux livres sur le sujet parus aux éditions de la Martinière (Mes flans Pâtissiers 1 et 2), cet accro au flan décline la gourmandise sous toutes ses formes.