La Commission d'audit a présenté à 17h son rapport concernant les fuites liées à la Covid-19 au sommet de la Confédération. Ce groupe de travail devait clarifier quelles «indiscrétions» se sont produites, qui les a causées et qui en a été le destinataire.
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La Commission de contrôle et de gestion (CDG) affirme qu'il y a eu de nombreuses indiscrétions mais qu'elle «n'a pas été en mesure de répondre de manière concluante aux questions de l'enquête en raison de sources incomplètes». Durant sa prise de parole, le conseiller aux États Philippe Bauer, membre de la Commission d'audit, avoue un certain échec: «Nous n'avons pas été capables d'identifier tous les auteurs ni tous les destinataires de ces indiscrétions».
Fuites identifiées
La CDG note que divers médias détenaient fréquemment des «informations classifiées» et en faisaient rapport. Marc Walder, CEO de Ringier AG, qui édite également Blick, a reçu des informations confidentielles classifiées de l'ancien chef de la communication du ministère de l'Intérieur.
«L'évaluation des reportages des médias n'a révélé aucune indication sur l'utilisation des informations transmises dans les reportages, indique le communiqué de presse. De plus, sur la base des sources disponibles, ni les autres destinataires, ni les auteurs, ni les complices des indiscrétions ne peuvent être identifiés.»
Des informations traitées «à la légère»
L'ancien chef de la communication du Département fédéral de l'Intérieur (DFI) a notamment fait effacer ses mails privés. Philippe Bauer a toutefois ajouté que, selon les commissions de gestion, d'autres mails envoyés par ou destinés à l’ancien chef de la communication du DFI laissent penser que les informations classifiées ou non publiques étaient traitées «à la légère». Il n’était pas rare que des informations soient sciemment partagées avec des personnes extérieures ou des médias.
Interrogé sur sa définition d'une indiscrétion, l'ancien chef de la communication Peter Lauener a indiqué que des renseignements pouvaient sans problème être partagés avec des journalistes afin de leur donner des informations contextuelles. Mais cette conception ne correspond pas aux prescriptions, indiquent les commissions dans leur rapport. Le Neuchâtelois a cependant précisé: «Nous avons voulu garder la proportionnalité.» Il n'est pas possible de contrôler toutes les adresses mails privées et publiques de toutes les personnes susceptibles d'avoir été concernées.
Berset savait et n'a rien fait
L'autre conclusion de l'audit est qu'Alain Berset était conscient des contacts réguliers entre son responsable de la communication et Marc Walder. «Le groupe de travail ne dispose cependant d'aucune preuve qu'il ait été informé du contenu précis de cet échange ou que les indiscrétions aient été faites en son nom.»
Pour la Commission, il n'est que partiellement compréhensible qu'Alain Berset, au courant des indiscrétions liées aux affaires du ministère de l'Intérieur, n'ait pris aucune mesure particulière dans son département. Tous les conseillers fédéraux ont souligné que la «tolérance zéro» s'appliquait face à de potentielles fuites.
200 articles concernés
Quelque 200 articles publiés par 24 titres de presse concernant le Covid-19 ont été rédigés sur la base d'indiscrétions. Et 38 séances sur 50 du Conseil fédéral ont été «contaminées», a précisé Thomas de Courten (UDC/BL). Les commissions ont étudié environ 500 articles et 50 séances du gouvernement. Seules douze d'entre elles n'ont pas été sujettes à indiscrétions. Dans les 38 autres cas, les décisions du Conseil fédéral avaient été publiées avant la séance.
Ce sont surtout les médias alémaniques, en premier lieu les médias de Ringier et de Tamedia, qui ont profité des indiscrétions de l'administration fédérale et obtenu des informations classifiées. Blick, le «Tages-Anzeiger» et la «SonntagsZeitung» ont publié chacun 60 articles sur la base d'informations confidentielles, contre seulement six pour «Le Temps» et «24 heures».
Dans certains cas, ces journaux alémaniques étaient les premiers à publier des projets de mesures ou des contenus de propositions ou de co-rapports. D’autres journaux ont ensuite explicitement fait référence à ces premières publications dans leurs propres articles.
Perte de confiance
Le Conseil fédéral a essayé de prendre un certain nombre de mesures à cet égard, qui se sont «vite révélées relativement vaines», a poursuivi Philippe Bauer, citant par exemple l'augmentation du degré de classification des documents. Au final, le gouvernement «s'est résigné». Cela a conduit à une perte de confiance de la part de certains conseillers fédéraux, qui ont renoncé à déposer des co-rapports, ou alors ceux-ci étaient simplifiés.
En janvier dernier, les commissions de gestion ont décidé d’enquêter sur les indiscrétions liées aux affaires du Conseil fédéral relatives au Covid-19, y compris sur le rôle du chef du Département fédéral de l’intérieur.
(Avec l'ATS)