Vous êtes ensemble depuis peu et chaque jour, vous vous émerveillez devant l’être aimé, si parfait, attentionné, drôle, et, et… Toutefois, vous avez rapidement remarqué que niveau finances, vous ne vous trouvez pas vraiment dans la même réalité: tandis que votre partenaire ne lésine pas sur les dépenses «plaisir», dispose d’ores et déjà d’une épargne confortable et dine plusieurs fois par semaine au resto, de votre côté, vous avez au contraire tendance à devoir vous serrer la ceinture passé le 15 du mois. De plus en plus souvent, vous vous surprenez à cogiter: ces différences de milieu socioéconomique et de rapport à l’argent pourraient-elles finir par avoir raison de votre histoire?
Sécurité et statut social
Selon Mélanie Gaudet, médiatrice familiale FSM assermentée par le Conseil d'État genevois et codirectrice de l’Association Couple et Famille, l’argent demeure l’un des principaux sujets de friction, et ce même au sein des jeunes couples: «La thématique de l’argent est intimement liée à celle de la sécurité, de la capacité de «se mettre à l’abri», qui constituent de réels sujets de préoccupation même chez les plus jeunes».
Une analyse qui va dans le sens d’une étude américaine publiée en 2023 indiquant que 38% des membres de la génération Z déclarent qu’ils rompraient avec leur partenaire s’il ne partageait pas les mêmes valeurs financières qu’eux. Plus parlant encore, la même étude révèle que 35 % d’entre eux effectuent des recherches préalables sur la capacité financière de leur potentiel partenaire en vue de s’assurer de la compatibilité de leur style de vie et éviter de futures déconvenues.
Outre la sécurité, l’argent représente évidemment l’appartenance à une certaine classe socioéconomique. Or, selon Mélanie Gaudet, lorsque l’on ne dispose pas exactement des mêmes possibilités financières ou que l’on ne vient carrément pas du même monde, les embrouilles guettent: «Si on voit son copain ou sa copine dépenser sans compter et même si on l’adore, on peut être amené à éprouver du ressentiment face à une telle aisance si nous on galère en comparaison. De la même manière, on peut aussi se sentir coupable de ne pas pouvoir suivre l’autre dans son train de vie» explique la spécialiste.
Fausses bonnes idées
Que l’on soit le plus favorisé du couple ou au contraire le plus près de ses sous, Mélanie Gaudet met en garde contre trois comportements qui, même avec les meilleures intentions, risquent de mettre en péril votre histoire naissante et vous explique à l’inverse comment mettre en place une communication claire et respectueuse, gage d’harmonie et d’authenticité.
1: Éviter le sujet
On le sait tous, quand on est en couple depuis peu, la phase de séduction bat son plein et avec elle, la tentation de polir certains aspects de notre personnalité. Un réflexe naturel qui peut néanmoins pousser à mettre les choses sous le tapis et taire un éventuel inconfort, d’un côté comme de l’autre. Or, selon Mélanie Gaudet, il n’est pas possible de faire fi de différences objectives sans prendre le risque de prétériter la relation: «Lorsque l’on identifie une telle différence, il est important de la verbaliser et de la clarifier pour être au fait de la réalité de chacun, mais aussi de mettre des mots sur les sentiments ressentis de part et d’autre face à cette situation».
Pour ce faire, la médiatrice propose de parler de soi avant d'inviter l’autre à échanger: «Je suis inquiet car je n’ai pas le même train de vie que toi et ne viens pas du même milieu», «Ça me stresse de ne pas pouvoir mettre assez d’argent de côté chaque mois pour mon épargne, mais en même temps j’ai peur de ne pas correspondre à tes «attentes». «Qu’en penses-tu? Comment pourrait-on accorder nos deux modes de vie, nos deux réalités, pour qu’on se sente plus confortables l’un et l’autre?». Et d’ajouter: «C’est un bon test pour présager de la solidité du couple et de la compatibilité des personnes: Est-ce que je suis écouté quand je fais part d’une difficulté? Est-ce que mon partenaire est capable de se mettre à ma place? Suis-je capable d’envisager de baisser mon train de vie et donc de faire preuve de flexibilité dans la relation?».
2: Payer systématiquement pour les deux
Lorsqu’on a plus de moyens que son ou sa chérie et qu’on se trouve dans cette phase formidable de début d’une romance, il peut être tentant de dire: «Ne t’en fais pas, je m’en occupe» au moment de régler l’addition ou de prévoir votre premier week-end en amoureux. Que l’on agisse par culpabilité, pour éviter de devoir adapter son train de vie ou tout simplement pour faire plaisir à l’autre, Mélanie Gaudet vous met en garde: «C’est une solution de facilité qui coupe court à toute discussion et qui peut engendrer, même de manière involontaire, un sentiment de dénigrement du partenaire «entretenu» ainsi qu’un risque pour la personne qui paie de nourrir un ressentiment qui pourrait ressortir à l’occasion d’une dispute».
À la place, la spécialiste suggère d’instaurer un système équitable: «Si on convient qu’une répartition des coûts des sorties au prorata de ce que chacun gagne, cela permet à la personne la moins aisée de se sentir impliquée dans le choix des loisirs et de se sentir «légitime» à exprimer son avis». En effet, si on ne sort jamais son porte-monnaie, il peut être difficile d’expliquer à son ou sa chérie que ce soir, on aimerait plutôt manger italien que thaï ou encore de prendre ce dessert qui nous fait envie.
Selon la spécialiste, une autre piste à explorer consiste également à se demander «quel est le minimum acceptable pour nous en termes de sorties et loisirs pour ne pas avoir l’impression de vivre reclus?» et d’ensuite revoir son train de vie à la baisse: «Chacun doit faire un pas vers l’autre!», conclut Mélanie Gaudet.
3: Négliger le non-mesurable
Comme le chante Angèle, «Tout le monde il veut seulement la thune», au point même parfois d’oublier qu’il existe d’autres manières de contribuer au couple qu’au moyen de deniers sonnants et trébuchants: Vous travaillez à 100% depuis peu et lui est encore à l’uni? pourquoi alors ne pas envisager un échange de bons procédés consistant pour lui à s’occuper des courses la semaine lorsqu’il n’y a pas cours et pour vous, à régler la prochaine addition dans votre resto? «Ce genre d’accord entre les partenaires permet de mettre en place un système au cas par cas et entièrement réversible qui s’apparente à un troc», indique Mélanie Gaudet.