Bernard Pichon ne prend «jamais de vacances, ni de retraite», mais le Vaudois de 78 ans est presque toujours en déplacement. Depuis 22 ans, l’ancien producteur-journaliste de la RTS s’est spécialisé dans la chronique de voyage. Il enchaîne ainsi trois destinations par mois en moyenne, sans jamais se départir de son esprit critique.
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Ces derniers mois, il a arpenté la Thaïlande, les Canaries, la Nouvelle-Zélande, le nord de l’Allemagne, mais aussi, en Suisse, la région des Trois-Lacs. Prochainement, il mettra le cap sur la commune grisonne de Silvaplana, puis embarquera sur un bateau de croisière reliant le Japon à Taïwan.
Prévoyez un budget
Son premier conseil d'expert pour de beaux voyages? Verser mensuellement, tout au long de l’année, un certain montant dans une cagnotte vacances. «Difficile d’établir un budget poste par poste pour ses vacances tant cela varie selon la destination, le mode de transport, le logement ainsi que la situation personnelle, les habitudes et préférences. Et puis, le puzzle d’offres et de tarifs est devenu si varié ces dernières années!»
Si vous prenez l'avion, soyez souples
Le spécialiste commence par aborder le thème délicat de l’avion qui constitue souvent un gros poste dans le budget, car les tarifs ont augmenté, selon son estimation, en moyenne de 25% depuis l’avant-Covid. Faut-il réserver ses places très tôt ou, au contraire, attendre les offres de dernière minute? À cette question, il n’y a plus de réponse simple. D’autant que l'impact environnemental entre aussi de plus en plus en ligne de compte.
La règle de base pour faire de bonnes affaires reste toutefois d’avoir un maximum de souplesse sur les dates et les saisons. «En novembre, par exemple, mois creux par excellence, beaucoup de logements et d’avions sont vides et les prix s’en ressentent, explique Bernard Pichon. Certains jours de semaine également, les prix sont systématiquement plus bas, aussi bien pour ce qui est du jour de réservation que du jour d’utilisation effectif. En cherchant bien, on peut obtenir des rabais substantiels sur les logements et les transports, mais il faut être malin, avoir un peu de temps et de chance.»
Les algorithmes compliquent la recherche: tenant compte de l’offre et de la demande, le prix peut monter ou descendre de manière significative en quelques heures seulement. «Sans compter que l’adresse IP de votre ordinateur peut être repérée lors d’une première recherche et faire que vous soyez ensuite confronté à des tarifs 'personnalisés' adaptés en conséquence… Pour esquiver ce piège, il faut être capable de masquer son adresse IP ou, plus simplement, de changer d’ordinateur au fil de ses recherches, ce qui n’est guère pratique.»
Le Vaudois mentionne le «skiplagging», une étonnante pratique que les compagnies d’aviation détestent. Elle consiste à acheter un vol avec escale, mais à descendre à l’escale: «Par exemple, pour aller de Genève à New York, mieux vaut parfois prendre un vol Genève – Chicago faisant escale à New York, et descendre à New York. La chose se révèle souvent plusieurs dizaines de pourcents moins chers que d’acheter simplement un vol direct vers la même destination. Mais il faut alors ne pas avoir de bagages en soute et donc voyager léger, ce qui reste une contrainte.»
Si vous prenez le bateau, essayez le last minute
En ce qui concerne les croisières, Bernard Pichon rappelle que dans ce domaine, le «last minute» demeure très bon marché. «Il est aussi toujours très rentable d’acheter ses billets directement chez le croisiériste, au port. Même si l’incertitude que cela implique n’est évidemment pas facile à gérer pour les familles.» Il existe de nombreux sites internet vendant des billets à prix cassés afin d’éviter à l’armateur d’avoir des cabines vides le jour J: «Ce dernier espère s’y retrouver en vendant à bord, à ses clients captifs, quantité de prestations optionnelles. Mais, si on a la discipline de s’en tenir aux prestations de base, on peut voyager bon marché, parfois au prix de 300 francs pour une semaine! Je connais une retraitée londonienne qui passe tous ses hivers d’une croisière à l’autre et cela lui coûte moins cher que de rester seule chez elle et d’y payer son chauffage.»
À la place des deux autres, prenez le train
Le train de nuit se développe beaucoup ces dernières années, comme entre Zurich et Berlin. «Nos voisins autrichiens sont en avance en la matière. Ils développent des wagons confortables avec petit lavabo et plateau déjeuner. Et, si ces offres restent encore plus chères qu’un vol low-cost, c’est plus écologique et parfois moins chronophage sur des vols courts ou moyen-courriers, car on évite les fastidieux allers-retours depuis l’aéroport jusqu’aux centres-villes.»
Question tarif, le covoiturage et les FlixBus sont imbattables sur les courts à moyens trajets: «Aller à Turin depuis Lausanne ou Genève peut se faire pour 20 francs presque symboliques si on utilise par exemple le fameux site BlaBlaCar. C’est sympa, car c'est l’occasion de faire des rencontres et peu générateur de CO2. Et puis la version bus offre souvent plusieurs liaisons par jour. C’est le cas entre Genève et Lyon.»
Faites baisser le budget logement
Pour ce qui est des hébergements et de l'alimentation, Bernard Pichon recommande de privilégier les hôtels all inclusive: «Toutes les dépenses y sont maîtrisées. On en trouve de très abordables, même en pleine saison, aux Canaries ou en Turquie.» Dans un tout autre genre, il préconise le logement conventuel, soit dans une communauté religieuse: «C'est parfois un peu rustique, mais souvent très chaleureux.»
Autre option avantageuse, mais nécessitant un bon discernement: le logement chez l’habitant, où des repas à bon prix sont souvent possibles, ou en hôtel de charme. «On en trouve facilement qui sont bien moins chers que des hébergements classiques tout en étant souvent plus originaux.»
Le spécialiste attire encore l'attention sur le fait qu’on ne trouve plus systématiquement les meilleurs prix d’hôtel sur les comparateurs en ligne, mais souvent directement sur le site de l’établissement. Pour maîtriser les coûts des repas, il recommande encore Airbnb ou les appart-hôtels disposant traditionnellement d’une cuisine afin d'éviter de se rendre au restaurant tous les jours.
Bernard Pichon regarde aussi d’un œil intéressé l’arrivée sur le marché d’EasyJet Holidays. «Cette offre, qui a cartonné en Grande-Bretagne, fait peur aux pros du tourisme en Suisse où elle vient d’être lancée. Elle propose des logements haut de gamme à bon prix tout en proposant de s’y rendre en low cost.»
Anticipez le coût de la vie
Pour établir son budget vacances, il est important de bien avoir conscience du coût de la vie dans le pays de destination. «On sait que le Japon est un pays assez cher, mais moins par exemple que la Norvège. Visiter ce pays en voiture de location peut impliquer jusqu’à 150 francs de ferry et de ponts payants par jour, sans parler des tarifs prohibitifs des places de parc...»
Ne négligez pas les solutions traditionnelles
Le travail sur mesure effectué par les agences de voyage reste un plus, pour celui qui est surnommé le Pichon Voyageur: «Il est certes plus cher sur le moment, mais plus qualitatif au final. Et il se révèle parfois même plus rentable, par exemple en cas d'annulation, car les professionnels ont des assurances pour cela, alors qu’un particulier pas forcément.»
Et le professionnel des voyages de conclure: «Partir exige du temps de préparation. Mais cette phase se révèle parfois presque aussi belle que les vacances elle-même, car on rêve, un peu comme on le ferait avant un rendez-vous amoureux, et l’expérience finale n’en sera que plus belle!»
En collaboration avec Large Network