Dès que le sujet de l'électromobilité est abordé, la discussion tourne autour des terres rares. Leur exploitation provoquerait des dégâts écologiques monumentaux pour être utilisées dans les batteries de voiture. Elles seront bientôt épuisées, dit-on souvent. Mais tout cela est-il exact? Blick s'est penché sur la question.
Tout d'abord, «terre rare» est un terme trompeur: ces terres ne sont pas si rares que cela. Les 17 éléments connus sous le nom «métaux des terres rares» (l'appellation correcte) sont en réalité aussi courants que le cuivre. On ne les trouvait autrefois que dans des matériaux rares, le terme est resté.
Rien qu'en 2020, 240'000 tonnes ont été extraites. On estime toutefois que les réserves connues seraient de l'ordre des 120 millions de tonnes. Par ailleurs, on soupçonne que des réserves plus importantes encore pourraient se trouver dans des endroits jusqu'ici peu accessibles, comme le Groenland. La Chine possède les plus grands gisements connus. L'Australie, le Brésil, l'Inde, la Russie, les États-Unis et le Vietnam disposent également de gisements importants.
Convertisseur catalytique et moteur électrique
Les terres rares sont utilisés dans les smartphones, les téléviseurs à écran plasma et les appareils à rayons X, les disques durs et les casques d'écoute, les tubes fluorescents et les lampes LED, etc. On les retrouve également dans les voitures... à essence, notamment dans les convertisseurs catalytiques et les filtres à suie. Quant aux voitures électriques, elles ne sont pas présentes dans la batterie, contrairement aux idées reçues. Elles se trouvent dans le moteur lui-même.
La terre rare la plus importante pour une voiture est le néodyme, utilisée pour les aimants puissants du moteur électrique. Mais ce n'est de loin pas sa seule utilisation: le néodyme est également présent dans les disques durs, les haut-parleurs, les éoliennes et les smartphones. Chaque smartphone en contient environ 0,4 gramme, chaque moteur de voiture électrique jusqu'à trois kilos.
Un jeu de marché cynique
Les prix fluctuent parce que la Chine joue au poker. En tant que pays disposant des plus grandes réserves de terres rares, la Chine a été la première à pratiquer le dumping pour contraindre les autres pays à cesser leurs activités. En position de que quasi-monopole, la Chine a ensuite fait grimper le prix du néodyme à 230 francs et aimait menacer de pénurie en cas de conflit commercial. L'ironie de ce jeu cynique est que cela a rendu l'exploitation du néodyme à nouveau intéressante pour d'autres pays. Le prix a dès lors baissé et devrait maintenant se stabiliser, selon les experts. Même si la Chine produit encore 80% du néodyme dans le monde à l'heure actuel.
Le fait est que, alors que ces terres rares sont souvent mises en relation avec les voitures électriques, elles sont utilisées dans une kyrielle d'autres pays, tandis que les constructeurs automobiles s'en passent très bien: BMW n'utilise pas du tout de terre rare dans son modèle, pas plus que Renault pour sa «Zoe» ou Nissan pour son «Ariya». La différence est dans le type de moteur: ceux à aimant permanent fonctionnant avec néodyme présentent des avantages en termes de rendement. Ceux qui sont dotés d'aimants extérieurs, sans néodyme, possèdent des avantages en terme de navigation. Les constructeurs s'en passent pour de multiples raisons, de l'incertitude des prix aux difficultés d'approvisionnement en passant par l'image écologique.
En Chine, l'environnement souffre
Car la Chine a renforcé sa position de premier fournisseur de terres rares au détriment de l'environnement et de la population: alors que des réglementations strictes s'appliquent dans les pays occidentaux, d'énormes quantités de boues toxiques, dont certaines sont même radioactives, se sont retrouvées dans la nature en Chine (le gouvernement a promis d'améliorer la situation, mais le degré de respect des nouvelles réglementations est considéré comme incertain). Sans parler des conditions de travail dans l'industrie minière chinoise.
Alors que personne ne s'y intéresse lors de l'achat d'un smartphone, ce débat resurgit lorsque l'on parle des voitures électriques. C'est pourquoi, comme pour le lithium ou le cobalt (qui ne sont pas des terres rares) utilisés dans les batteries, les fabricants s'attachent à rendre les chaînes d'approvisionnement écologiquement et socialement responsables, à rechercher des alternatives et à faire des recherches sur le recyclage. Et cela fonctionne : Les aimants en néodyme recyclés sont 96% aussi bons que ceux considérés comme neufs.
(Adaptation par Jocelyn Daloz)