Non, non, toutes ces lumières ne sont pas celles des sous-sols d’une discothèque. Il s'agit de la première image du nouveau télescope James Webb montrant plusieurs galaxies de l’espace. Le président américain Joe Biden avait présenté l’image en avant première dans la nuit de lundi a mardi en saluant la performance technique de l'appareil.
Une partie des éloges peuvent être attribués à Adrian Glauser. L’astrophysicien de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) a travaillé pendant plus de 20 ans sur ce télescope: «Pour moi, cette image a une signification très spéciale, c’est une satisfaction extrême.» L’image est à couper le souffle: «C’est exactement pour cela que nous avons développé le télescope.»
Des galaxies très actives
Il est l’un des rares à avoir pu voir le cliché avant sa publication. L’astrophysicien a la réponse à une question que beaucoup se posent: mais que signifient les différentes couleurs? «Les couleurs proviennent en premier lieu des filtres du télescope.»
Les filtres de couleurs ont été choisis de manière à pouvoir visualiser les différents processus physiques qui ont lieu dans les galaxies. «La couleur rouge signifie que la galaxie est très éloignée ou qu’elle produit encore de jeunes étoiles.» Dans les galaxies jaunes et bleues, d’autres processus physiques complexes seraient en cours.
Le télescope fonctionne parfaitement
Voir des objets situés jusqu’à treize milliards d’années-lumière à travers un télescope lancé dans l’espace par une fusée, c’est du grand art au niveau de l’ingénierie. «Et je peux témoigner que le télescope fonctionne parfaitement, même mieux qu’espéré», jubile Adrian Glauser.
Mais les images du télescope James Webb ne sont pas simplement belles, elles ont aussi une valeur inestimable pour la science. Les données récoltées dans l’espace par l'appareil aident à comprendre comment l’Univers s’est formé.
D'autres images dévoilées
La NASA avait, jusque-là, gardé soigneusement secret des clichés pris par l'appareil afin de faire monter le suspense. Après la déclaration de Joe Bide, les images de deux nébuleuses, de très photogéniques et gigantesques nuages de gaz et de poussières ont également été publiés.
La nébuleuse de la Carène, située à environ 7600 années-lumière, illustre la formation des étoiles. Elle en abrite de nombreuses massives, faisant plusieurs fois la taille de notre Soleil.
La nébuleuse de l'anneau austral est elle une nébuleuse dite planétaire (bien qu'elle n'ait rien à voir avec les planètes): il s'agit d'un immense nuage de gaz entourant une étoile mourante.
Autre cible: le Quintette de Stephan, groupement de galaxies en interaction entre elles.
Analyse d'une exoplanète
Le dernier objet cosmique dont l'observation a été révélée mardi est une exoplanète, c'est-à-dire une planète en orbite autour d'une autre étoile que notre Soleil, l'un des axes de recherche principaux de James Webb.
Elle n'a pas été à proprement parler photographiée, mais analysée par spectroscopie, une technique utilisée pour déterminer la composition chimique d'un objet lointain. En l'occurrence, WASP-96 b, une planète géante composée essentiellement de gaz.
En combinant les données obtenues précédemment grâce à d'autres télescopes et celles par James Webb, «nous serons probablement capables de détecter de la vapeur d'eau» dans son atmosphère, a estimé auprès de l'AFP José A. Caballero, astronome au Centro de Astrobiologia en Espagne et spécialiste des exoplanètes.
Et s’il y avait une vie extraterrestre?
«Il est très, très peu probable que le télescope James Webb puisse découvrir une autre forme vie», estime Adrian Glauser. Il n’est tout simplement pas prévu à cet effet. Mais «le télescope peut apporter une contribution importante à la découverte de la vie extraterrestre», estime l'astrophysicien. Grâce au télescope, les astronomes pourront chercher et définir quelles planètes pourrait accueillir la vie.
Adrian Glauser n'est pas le seul à se réjouir de ces publications. Des chercheurs du monde entier ont réservé du temps d'observation avec James Webb, dont le programme pour sa première année de fonctionnement a déjà été minutieusement déterminé par un comité de spécialistes, et rendu public.
Le télescope a assez de carburant pour fonctionner pendant 20 ans. Quelque 20'000 personnes ont travaillé sur ce projet à travers le monde, en faisant de ce téléscope une immense collaboration internationale.
(Adaptation par Mathilde Jaccard avec ATS)