Y aura-t-il un contre-projet?
Le Centre croit dur comme fer au déplafonnement AVS des couples mariés

Le Centre veut supprimer le plafonnement AVS des couples mariés. La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider a présenté un contre-projet à ses collègues. Mais ses arguments, qui ne font pas l'unanimité, font les affaires du président du Centre, Gerhard Pfister.
Publié: 21.08.2024 à 06:04 heures
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Dernière mise à jour: 21.08.2024 à 06:43 heures
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Le président du Centre Gerhard Pfister veut, avec son parti, supprimer le plafond AVS des couples mariés.
Photo: Keystone
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Ruedi Studer

Le Conseil fédéral va-t-il à nouveau jouer gros? Lors de la campagne pour la 13e rente AVS, il a sous-estimé l'état d'esprit de la population et a renoncé à un contre-projet. Les électeurs ont finalement approuvé l'initiative avec 58% de oui.

Un scénario qui pourrait se répéter avec l'initiative AVS proposée par le Centre. Le parti de Gerhard Pfister veut supprimer la pénalisation du mariage dans l'AVS. Car les couples mariés reçoivent aujourd'hui au maximum 150% d'une rente de vieillesse, soit 3675 francs par mois au maximum. Les concubins, en revanche, reçoivent deux rentes individuelles séparées, soit au maximum 4900 francs au total.

Du point de vue du Centre, il s'agit d'une discrimination qui doit être abolie. «Celui qui veut se marier doit pouvoir le faire sans inconvénient, déclare Gerhard Pfister à Blick. Il est difficile d'expliquer pourquoi cette injustice doit perdurer.» Après le net oui à la 13e rente AVS, le président du parti s'étonne que le Conseil fédéral renonce à un contre-projet. Il estime que l'initiative a de bonnes chances d'aboutir.

Baume-Schneider veut un contre-projet

Il n'est pas seul dans ce cas. Le Département de l'intérieur d'Elisabeth Baume-Schneider craint un oui dans les urnes et donc un nouvel échec. «Il est très probable que l'initiative soit acceptée par le peuple», peut-on lire dans des documents internes à l'administration que Blick a obtenus en vertu de la loi sur la transparence.

Il faut dire que l'initiative aborde un problème face auquel la nécessité d'agir ne peut guère être contestée. «Il serait très risqué de ne pas présenter de contre-projet», ont averti les fonctionnaires de Baume-Schneider à l'Office fédéral des assurances sociales.

C'est pourquoi la conseillère fédérale socialiste a voulu opposer un contre-projet indirect à l'initiative du Centre. Le plafond des couples mariés devait ainsi passer à 170%.

Un système «dépassé»

Deux réflexions ont guidé Elisabeth Baume-Schneider dans sa décision. Elle considère que le plafond pour les couples mariés est «dépassé», tel que cela est stipulé dans le projet de document de discussion. Actuellement, les rentes sont déjà plafonnées lorsqu'un couple gagne plus de 88'200 francs par an. Ainsi, l'année dernière, 374'000 couples sur 422'000 ont reçu une rente plafonnée, soit près de 90%.

Au sein de la population, ce plafonnement n'est pas compris et est perçu comme injuste, indique aussi le document. De plus, les avantages dont bénéficiaient jusqu'à présent les personnes mariées risquent de diminuer, par exemple en raison de l'augmentation de l'activité professionnelle des femmes ou de la réduction prévue de la rente de veuve. L'argumentation maintenue par le Conseil fédéral, selon laquelle les personnes mariées sont mieux protégées que les personnes non mariées et que l'on ne peut donc pas parler d'inégalité de traitement, «n'est plus pertinente».

Une rente plus élevée pour les bas revenus

Mais pour des raisons de politique financière, le plafond ne devrait pas tomber tout de suite. Alors que l'initiative du Centre coûterait plus de 3,7 milliards de francs en 2030, ce montant ne serait que de 2,4 milliards de francs avec un plafond plus élevé. Les bas et moyens revenus, qui ont gagné ensemble jusqu'à 120'000 francs, devraient ainsi se réjouir d'une rente plus élevée. Pour les revenus supérieurs, une meilleure rente n'est «ni nécessaire ni compatible avec les objectifs financiers».

Pour le financement, Elisabeth Baume-Schneider a évoqué des cotisations salariales plus élevées de 0,3% ou une solution combinée de cotisations salariales et de TVA. Une alternative possible pourrait être une rente AVS indépendante de l'état civil pour les nouveaux retraités.

Les conseillers fédéraux UDC ne veulent pas du contre-projet

Mais au Conseil fédéral, Elisabeth Baume-Schneider n'est pas soutenue. La majorité ne veut pas entendre parler d'un contre-projet. Bien que l'UDC souhaite également supprimer la pénalisation du mariage dans l'AVS, ce sont justement les deux conseillers fédéraux du parti qui ont clairement fait savoir, dès la consultation des offices, qu'ils n'étaient pas favorables à un contre-projet.

Le financement de la 13e rente AVS n'est même pas encore clarifié que l'on discute déjà de la prochaine augmentation des cotisations, a critiqué le département du conseiller fédéral Albert Rösti. Il indique que le net rejet de l'initiative sur les primes a montré que la population n'était pas prête à approuver d'autres projets «dont le financement n'est pas clarifié et qui affaiblissent le pouvoir d'achat de la population jeune et active».

Contre-projet du Parlement?

Quoi qu'il en soit, Elisabeth Baume-Schneider doit désormais présenter le projet relatif à l'initiative d'ici au mois de mars 2025. Reste à savoir si le Parlement suivra ou s'il élaborera lui-même un contre-projet.

De son côté, la gauche se montre favorable à une nouvelle extension de l'AVS. Autant d'éléments qui confortent le Centre, qui compte bien faire aboutir son initiative: «Un retrait de l'initiative est peu probable, assure Gerhard Pfister. D'autant plus qu'elle est capable de réunir une majorité auprès du peuple et des cantons.»

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