Vols annulés, retards massifs...
Swiss et Easyjet à bout de nerfs face aux décisions et aux taxes excessives de Skyguide

Easyjet et Swiss sont en colère contre le contrôle aérien public Skyguide. Il serait trop cher et inefficace. Swiss exige des changements d'ici Pâques. Que compte faire le conseiller fédéral en charge de l'affaire, Albert Rösti?
Publié: 13.04.2025 à 06:01 heures
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Actuellement, les retards deviennent fréquents à l'aéroport de Zurich.
Photo: Sven Thomann
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Raphael Rauch

Les liens entre le Département des transports dirigé par le conseiller fédéral Albert Rösti et la compagnie aérienne Swiss sont particulièrement étroits. Son épouse, Theres, travaille comme hôtesse de l’air pour Swiss. L’an dernier, le logo de la compagnie figurait même sur la carte de vœux officielle du ministre, c'est vous dire.

Mais malgré ces relations personnelles, Skyguide, l’entreprise d’Etat en charge du contrôle aérien suisse, placée sous la tutelle du département d'Albert Rösti, fait actuellement des vagues. La cause? Une forte hausse des taxes en fin d’année, qui fait bondir les coûts de compagnies comme Easyjet et Swiss. Les redevances de survol du territoire suisse ont grimpé de 38%, tandis que les taxes d’arrivée et de départ à Zurich et Genève ont augmenté de 24%.

La direction de Swiss s’en offusque: «Pour nous, l’augmentation des coûts n’est pas en rapport compréhensible avec la prestation fournie. Nous attendons qu’en cas d’augmentation des taxes, la qualité et les prestations de service soient au rendez-vous.» Même son de cloche chez Easyjet: «Les hausses de taxes sont disproportionnées et augmentent bien plus que la moyenne dans d'autres pays.» 

Retards et annulations

Ce n’est pas tout! De nouvelles structures mises en place par Skyguide pour «minimiser le nombre de violations de l’espace aérien et augmenter la sécurité» ralentissent la cadence à l’aéroport de Zurich. La phase d’introduction, entamée le 20 mars, doit durer quatre semaines. L'entreprise évoque «la plus grande modification de l’espace aérien de Zurich depuis plusieurs décennies.»

Résultat: retards à la chaîne et vols annulés. Swiss indique avoir dû supprimer «une poignée de vols» depuis la mise en place du nouveau dispositif. En moyenne, les décollages sont retardés de 30 minutes. «Nous comptons sur Skyguide pour lever complètement cette réduction dès la semaine prochaine et garantir à nouveau les capacités normales pour les vacances de Pâques, période de forte affluence», déclare la compagnie.

Skyguide promet «une pleine capacité dès Pâques»

Ce souhait pourrait bien se réaliser: «Nous sommes actuellement à 90% de la capacité normale, et si tout se passe comme prévu, nous serons probablement de retour à pleine capacité avant Pâques», annonce Skyguide. L’entreprise publique défend par ailleurs ses tarifs élevés: «Les investissements exigés par la Confédération doivent être financés par les redevances des usagers. Une augmentation des redevances est donc inévitable.»

Skyguide rejette aussi les comparaisons internationales, notamment avec la France: «L’Etat français finance la formation des futurs contrôleurs aériens à hauteur de 700'000 francs par personne. Skyguide doit assumer seule ces coûts. Nous ne nous battons pas ici à armes égales.» Et contrairement à la France, il n’y a pas de grèves en Suisse.

L'objectif d'économie n'est pas atteint

Au-delà des tensions actuelles, Albert Rösti doit gérer d’autres difficultés liées à Skyguide: selon le dernier rapport annuel de la Délégation des finances, l’entreprise n’a pas atteint ses objectifs d’économie l’an dernier. En 2024, sept incidents ont déjà eu un impact sur le trafic aérien, allant de l’inondation du bâtiment genevois à des pannes de données.

Autre sujet sensible: le projet de «Virtual Center», censé permettre à Skyguide de gérer le trafic aérien indépendamment de son implantation géographique. Initialement prévu pour l’an dernier, son lancement a été repoussé à 2031. Depuis 2024, la surveillance de Skyguide a été renforcée, avec des réunions hebdomadaires avec l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC).

Qu’en pense le responsable? Le Département d'Albert Rösti indique: «Pour le conseiller fédéral, la sécurité est la priorité absolue.» Mais pas question de faire des concessions sur les coûts! «Dans ses objectifs stratégiques, le Conseil fédéral attend de Skyguide qu’elle réalise un résultat équilibré et qu’elle augmente son efficacité sans mettre en péril la sécurité. Pour le Conseil fédéral, il est en outre important que les coûts des services de la navigation aérienne soient supportés en premier lieu par les usagers.» Autrement dit, par les compagnies aériennes, et donc, in fine, par les passagers.

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