Le financement fait débat
Le réseau de pistes cyclables sera amélioré... mais avec quel argent?

Y aura-t-il bientôt un «vrai» réseau de pistes cyclables en Suisse? La Confédération y travaille. Mais pour la faitière de défense des intérêts des cyclistes Pro Velo, le projet ne va pas assez loin. Son financement fait également débat.
Publié: 11.04.2025 à 10:26 heures
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Pro Velo réclame des voies cyclables sûres pour les vélos.
Photo: Keystone
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Nastasja Hofmann

De nombreux suisses profitent des premiers week-ends ensoleillés de l'année pour organiser une sortie à vélo. En semaine aussi, la petite reine séduit de plus en plus, surtout en milieu urbain. Selon une étude de gfs.Bern sur la mobilité en ville, 67% de la population urbaine possède un vélo. Conformément à cette tendance, les associations et les organisations réclament depuis des années un réseau de pistes cyclables mieux développé. 

Entrée en vigueur depuis le premier janvier 2023, la nouvelle loi fédérale sur les voies cyclables offre de nombreuses perspectives d'amélioration aux cyclistes. Pour aider les cantons et les communes à la mettre en œuvre, l’Office fédéral des routes (OFROU) a publié un «manuel des voies express cyclables». 

Ce fascicule a pour objectif de développer les infrastructures cyclables en s'inspirant des modèles danois et néerlandais. Insuffisant toutefois pour la faitière de défense des intérêts des cyclistes Pro Velo, qui réclame de «vraies voies cyclables» et qui estime à ce titre que les recommandations du manuel ne vont pas assez loin. 

De «vraies voies cyclables»? Impossible

Les «voies express cyclables» ont été introduites afin de proposer une alternative aux pistes cyclables traditionnelles. Dans les quartiers résidentiels, «il n’est la plupart du temps ni possible ni souhaitable d’aménager des pistes cyclables séparées du trafic motorisé», explique l'OFROU.

Dans ces endroits, l'office fédéral propose de «faire passer les voies express cyclables par des 'rues cyclables'» – autrement dit, par des routes classiques – et recommande à ce titre de limiter la vitesse maximale des véhicules à 30 km/h, de limiter le trafic motorisé et de donner la priorité aux cyclistes aux carrefours.

Cette proposition n'est pas du goût de Pro Velo, qui réclame une signalisation distincte pour les voies cyclables. C'est-à-dire, des zones sans voitures, avec une interdiction de dépassement par les véhicules autorisés, et une priorité intégrale pour les cyclistes. Une vision nettement plus ambitieuse que celle de l’OFROU.

Des cantons en manque de moyen

Interpellé par ces critiques, l’OFROU répond que «la Suisse ne dispose actuellement d’aucune réglementation spécifique sur les voies cyclables. Le manuel va aussi loin que le cadre légal actuel le permet.» L’Office rejette ainsi les reproches de Pro Velo, qui estime que les voies cyclables ne respectent pas les exigences de la nouvelle loi.

S'agissant de la mise en œuvre de la loi, les cantons seraient sur la bonne voie, affirme l'OFROU. Presque tous assurent qu’ils auront rempli leurs obligations de planification dans le délai de cinq ans fixé par la législation.

Hasan Candan, conseiller national du Parti socialiste (PS) et vice-président de Pro Velo, estime lui aussi que les cantons sont dans une dynamique positive. Toutefois, selon une enquête, les cantons déplorent un «manque de moyens financiers et de personnel comme problèmes au niveau de la mise en œuvre», comme il le constate. 

La question du financement fait débat

Tout le monde s'accorde sur un point: l'infrastructure cyclable doit être améliorée. La grande question: avec quel argent? Jusqu’à présent, les cyclistes ne contribuent pas directement au financement du développement des infrastructures. Pro Velo demande toutefois à la Confédération de puiser dans le Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA) afin de doubler au minimum les dépenses alloués aux infrastructures cyclables. 

Hasan Candan souhaite également remettre en question certains mécanismes, comme la redistribution exclusive des recettes de la taxe sur les carburants et de la vignette autoroutière au réseau routier. La tendance ne semble toutefois pas aller dans ce sens, bien au contraire.

Les cyclistes à nouveau taxés?

La Confédération envisage en effet de faire payer les cyclistes eux-même. Comme l'a révélé Blick, une étude a été commandée en vue d'un « financement plus équitable des infrastructures cyclables», incluant l'éventualité d'une taxe à l'adresse des cyclistes. Une motion de la conseillère nationale de l'Union démocratique du centre (UDC) Nina Fehr Düsel propose même le retour de vignette pour les vélos, abandonnée jadis à cause de sa lourdeur administrative. 

Pro Velo rejette catégoriquement toute idée de financement via une taxe ou un rétablissement de la vignette. Selon Hasan Candan, un financement équitable doit prendre en compte les coûts engendrés par des facteurs externes comme les émissions de CO₂ ou les problèmes de santés liés à la pollution.

«Le vélo est bon pour la santé, respectueux du climat et il rapporte 25 centimes par kilomètre parcouru à la collectivité», argumente-t-il. Les recettes du secteur des transports devraient donc bénéficier davantage aux infrastructures cyclables, estime-t-il. La question du financement reste néanmoins ouverte. Un retour à la vignette vélo semble peu probable. Les propositions concrètes pour un financement dit «équitable» ne sont, elles, pas attendues avant 2026. 

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