L'émotion était forte dans la salle du Tribunal criminel de Genève mardi, au second jour du procès du meurtre des Charmilles. Les amis et la famille du Portugais de 22 ans poignardé à mort sont revenus sur les événements du 19 janvier 2019, au petit matin.
Parents, frère, cousin, amis: sept personnes sont parties plaignantes dans cette affaire. Les quatre jeunes qui se trouvaient dans le parking souterrain lors de la rixe ont tous eu peur pour leur vie. L'agresseur leur a fait comprendre qu'ils risquaient gros s'ils s'approchaient de leur ami, mortellement blessé, ou s'ils utilisaient leur téléphone.
Un jeune pas agressif
Blessé au bras, un des jeunes a affirmé que son ami n'était pas agressif en s'approchant du jeune de 18 ans pour lui demander pourquoi il avait «planté» son couteau. Même son de cloche du cousin du défunt, qui a raconté que le second coup de couteau est parti immédiatement. «J'ai tout de suite compris qu'il était dans un très mauvais état», a-t-il expliqué, la voix étranglée par l'émotion.
Répondant aux questions de son avocat, il a indiqué avoir compris que celui qu'il considérait comme un petit frère était mort quand les ambulanciers ont cessé de s'activer autour de lui et que l'autre blessé a crié. Il a pu l'embrasser trois fois le front: «Une fois pour sa mère, une fois pour son père et une fois pour son frère.»
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«Assez de souffrances»
Le chagrin de cette famille est tel que le père n'a pas souhaité s'exprimer devant la cour. En larmes, la mère a évoqué «un enfant adorable, souriant, blagueur», «un fils présent», «un confident». «On m'a arraché une partie de moi. Ce n'était pas une maladie, pas un accident. Quelqu'un l'a tué, c'est très dur à avaler», a-t-elle déclaré.
Elle souhaite «que justice soit faite et que cela serve de leçon.» Sans colère dans la voix, elle a dit, en parlant du principal prévenu: «Qu'il ne fasse plus de mal à personne. Il y a déjà pas mal de familles qui ont souffert.» Son fils aîné a indiqué avoir du mal à trouver un sens à ce qui leur arrive. «Sans ce procès, c'est difficile de faire le deuil. J'ai hâte que ça se termine», a-t-il conclu, plus de cinq ans après le drame.
L'émotion n'est pas retombée dans l'après-midi quand des témoins se sont succédé à la barre pour évoquer le défunt. Compagne, meilleure amie de sa mère, amis d'enfance: ils ont, eux aussi, décrit un être aimant, joyeux, généreux et travailleur, qui voulait «mener sa vie au meilleur» et qui «n'a jamais levé la main sur qui que ce soit».
Violence incompréhensible
Plusieurs personnes liées aux trois prévenus ont aussi été entendues, dont les parents du meurtrier présumé qui a fondu en larmes à l'arrivée de son père. Ce dernier a d'emblée déclaré: «J'aimerais présenter mes excuses à la famille. Je voulais écrire, mais je n'en ai pas eu le courage. Je suis profondément triste et marqué. Ce qui s'est passé est terrible.»
Selon lui, son absence inexpliquée a «créé un vide terrible» chez son fils de 14 ans qui a «trouvé refuge auprès d'un groupe plus fort que lui», avant de «basculer dans la violence» et de «commettre l'irréparable» en agressant violemment deux hommes à St-Jean quand il avait 16 ans. Un fils qui lui a raconté qu'il fait des cauchemars, pense au jeune qu'il a tué et «se demande comment il a pu en arriver là».
Cette violence est tout aussi incompréhensible pour sa mère et sa sœur qui l'ont décrit comme un garçon gentil et drôle, avant qu'il ne bascule. Le procès se poursuit mercredi avec le réquisitoire du procureur et les plaidoiries des avocats.