Nous sommes en Juillet 2022. Une trentenaire emporte pour environ 1323 francs de courses à la Migros du Glattzentrum, à Zurich. Son caddie déborde de viande: des entrecôtes bio, des tranches de bœuf, et de la viande hachée.
Mais au moment de scanner elle-même ses articles, elle n'enregistre que 40 francs de course... avant de tomber sur le contrôle aléatoire et se faire démasquer.
Avant cela, un détective du magasin avait observé comment la mère de deux jeunes enfants avait réorganisé dans son chariot de sorte que la viande chère soit dissimulée. Elle a comparu devant le tribunal compétent la semaine dernière.
La jeune femme de 31 ans a été condamnée à 3150 francs d'amende. Une sanction assortie d'une interdiction de faire ses courses dans le magasin dans lequel le vol a été commis.
Mais il ne s'agit pas d'un cas isolé. En Suisse, on vole tout ce qu'on peut. 2002 a même été l'année de tous les records: 19'781 vols ont été enregistrés par la statistique criminelle cette année-là, soit une hausse de 20% par rapport 2021 et un record par rapport à 2009.
Le fromage et la viande fraîche sont les plus volés
Officiellement, on parle de vol quand la valeur de la marchandise dérobée dépasse les 300 francs. Sous ce seuil, la décision de porter plainte est laissée à l'appréciation du magasin. En outre, certains cantons ont opté pour une procédure simplifiée, sans plainte.
La viande et l'électronique font partie des produits les plus volés en Suisse. Ailleurs dans le monde, c'est surtout le fromage qui figure en tête de liste. En particulier les variétés de parmesan, qui restent très convoitées. Parfois même revendues. C'est ce qui ressort d'un rapport du Centre for Retail Research britannique, pour lequel 1187 chaînes de commerce de détail dans 43 pays ont été étudiées. Le vol de fromage est tellement répandu que plus de 4% de la production mondiale sont volés.
Perte annuelle de 300 millions de francs
En Suisse, les commerces perdent chaque année des centaines de millions de francs à cause de ce genre de délits. Certes, ni Coop, ni Migros, ni Aldi, ni Lidl ne communiquent de chiffres actuels. Mais en juin 2022, un porte-parole de Migros a déclaré à «20 minutes»: «1% des sommes dues en caisse libre-service n'est probablement pas scanné.» Cela représenterait 300 millions de francs par an.
Et l'inflation pourrait encore aggraver le problème. En Grande-Bretagne, les vols signalés par la police ont augmenté de 16% en 2022. Ils ont ainsi atteint leur plus haut niveau depuis 45 ans, tout comme l'inflation. Les supermarchés britanniques ont ainsi commencé à sécuriser le cheddar et le beurre avec des cadenas.
Qu'en est-il en Suisse? Lidl constate une légère augmentation des vols ces derniers temps. La viande est particulièrement concernée. Depuis l'été dernier, le discounter sécurise tous les produits de ces rayons. Même les moins chers, comme les filets d'agneau à 10 francs. Migros et Aldi enregistrent quant à eux des chiffres constants. Coop n'a donné aucune information.
Des détectives pour traquer les voleurs
La hausse de la petite délinquance préoccupe cependant tout le monde. Car c'est surtout aux caisses de self-check-out, sur lesquelles les discounters misent de plus en plus, que les vols ont lieu. Pour des raisons évidentes: en cas de contrôle, on peut toujours déclarer les articles comme «oubliés». Mais ce genre d'escroquerie n'apparaît guère dans les statistiques.
De fait, les commerces ont durci leur démarche. La coopérative Migros de Zurich a installé fin décembre 2022 des barrières aux caisses en libre-service qui ne s'ouvrent qu'après avoir scanné le ticket de caisse: Ceci dans six magasins et à titre d'essai. Des barrières sont également utilisées chez Aldi et Lidl. Selon le «St. Galler Tagblatt», Migros veut également améliorer la sécurité du système de self-scanning, mais ne donne pas plus de précision.
Des caméras de surveillance sont déjà utilisées à grande échelle. Coop et Migros emploient même du personnel interne et externe comme détectives de magasin. Plusieurs postes de ce type ont été proposés par les deux géants du commerce de détail. Lidl et Aldi effectuent également des contrôles aléatoires.
Les détaillants soulignent toutefois que les «personnes honnêtes et aimables» constituent la majeure partie de leur clientèle. Mais si on interroge les clients eux-mêmes, la situation est différente. Selon une enquête, près de la moitié des 1500 personnes interrogées a déjà volé une fois.