Depuis des années, le marché du logement en Suisse a été caractérisé par une surabondance de l'offre. Il y avait 75'000 logements vacants il y a deux ans encore, notamment en raison des taux d'intérêt historiquement bas. Une incitation à construire et à investir des capitaux dans le marché locatif.
Le vent a-t-il soudain tourné? C'est ce que montre l'étude «Immobilier Suisse 2e trimestre» de Raiffeisen. Selon la banque, le marché est entré dans une nouvelle ère. En 2021, le nombre de nouveaux ménages dépassait pour la première fois depuis 2009 le nombre de nouvelles constructions. Les logements vacants ont donc diminué, et ce n'est qu'un début. «Les constructions auront beaucoup de mal à répondre à la demande», avance Martin Neff, économiste en chef de Raiffeisen.
Qu'est-ce qui explique cette nouvelle donne? D'abord, les nouvelles constructions ont été ralenties: le secteur a appuyé sur le frein en raison du nombre de logements vacants. De l'autre côté, la demande est en forte augmentation.
Vieillissement, individualisation et guerre en Ukraine
Comment l'expliquer? Longtemps, c'est l'immigration qui conditionnait les évolutions du marché. Désormais, ce n'est plus le cas — c'est le vieillissement de la population et la tendance forte à l'individualisation qui influencent les prix en premier lieu. En clair: comme les gens ont tendance à habiter dans des logements avec de moins en moins d'occupants, la demande n'est plus directement liée à la population.
À cela s'ajoutent les conséquences de la guerre en Ukraine. Depuis l'invasion russe, plus de 48'000 personnes ont trouvé refuge en Suisse. Ces Ukrainiens, pour l'écrasante majorité des femmes, ont été hébergés dans un premier temps dans des logements collectifs et chez des particuliers, mais ils devraient bientôt chercher à se loger sur le marché régulier du logement. Cette guerre pourrait donc avoir des conséquences à moyen terme, selon Martin Neff.
En outre, en raison de la hausse des taux d'intérêt, il n'est plus forcément plus avantageux d'être propriétaire que locataire, relève Raiffeisen. C'est une règle presque gravée dans le marbre du marché suisse de l'immobilier qui est en train d'évoluer. Les Suisses continuent de vouloir accéder à la propriété, malgré les taux élevés, mais il n'y a pas assez d'offre. Les prix devraient donc continuer d'augmenter.
(Adaptation par Adrien Schnarrenberger)