Les experts sont unanimes: la consommation de réseaux sociaux serait aussi dangereuse que la consommation d'alcool. Car les réseaux sociaux seraient programmés de façon à rendre les gens – et plus particulièrement les jeunes – dépendants. Alors pourquoi ne pas interdire ou réglementer leur accès, comme c'est le cas pour l'alcool et le tabac?
Plusieurs pays ont déjà franchi le pas. En novembre dernier, le gouvernement australien a interdit aux jeunes de moins de 16 ans l'accès à Snapchat, Instagram, TikTok, Facebook et d'autres réseaux. La Grande-Bretagne et les Pays-Bas veulent également introduire une limite d'âge, tandis que la Norvège souhaite la fixer à 15 ans.
«Pour les enfants, c'est une surcharge»
La Suisse aussi est en pleine réflexion à ce sujet. Sous l'impulsion de l'association «NextGen4Impact», une pétition en ligne a justement été lancée. Adressé au Conseil fédéral et au Parlement, le texte demande l'introduction d'une limite d'âge à 16 ans, une vérification obligatoire de l'âge par les plateformes ainsi qu'une stratégie nationale de prévention dans les écoles. A ce jour, la pétition a recueilli plus de 7300 signatures.
Le temps passé devant l'écran ne cesse de croître chez les garçons, tout comme le cyberharcèlement qui a fortement augmenté. Sans parler de la désinformation en ligne, avance la conseillère nationale de l'Union démocratique du centre (UDC), Nina Fehr Düsel, qui soutient la pétition. Bien que de nombreux adultes ne sachent pas utiliser correctement les réseaux sociaux, «pour les enfants, c'est une surcharge». De nombreux parents essaient d'imposer des limites de temps, mais souvent en vain, car elles peuvent être facilement contournées.
Des études ont montré que les réseaux sociaux augmentaient le risque de dépression et même de pensées suicidaires d'environ 70%, surtout chez les filles. «Nos enfants grandissent dans un monde où les likes, les filtres et les comparaisons façonnent leur image – souvent même avant qu'ils n'aient appris qui ils sont vraiment», déplorent les pétitionnaires. Cette pression constante entraîne chez beaucoup une crise silencieuse «que nous ne pouvons plus ignorer», soutiennent-ils.
Le Conseil fédéral veut analyser la situation
Les revendications trouvent une oreille attentive auprès du Conseil fédéral, qui a signifié sa volonté de protéger les enfants et les jeunes des effets nocifs des réseaux sociaux. Il se dit prêt à examiner une limite d'âge à partir de 16 ans ainsi qu'une interdiction des téléphones portables dans les écoles. C'est ce qui est ressorti de ses réponses aux interventions parlementaires déposées fin février par les deux conseillères aux Etats Vert-e-s, Maya Graf et Céline Vara.
Le Conseil fédéral se dit «prêt à analyser la situation plus en détail dans un rapport». La mise en œuvre pratique d'une éventuelle interdiction devrait également être étudiée. L'Australie a dû relever plusieurs défis afin de s'assurer que les jeunes ne puissent pas indiquer un âge erroné. En Suisse, un contrôle de l'âge pourrait éventuellement se faire via l'E-ID, qui est en cours d'élaboration. Mais d'ici là, le chemin est encore long.