Un siège vert'libéral au Conseil fédéral. La phrase a beau être une rime, elle n'amuse pas Thierry Burkart, dont le parti (le PLR) serait visé en premier lieu. «Ils n'occupent aucun siège au Conseil des États et ne comptent presque aucun élu dans les exécutifs cantonaux. Où est leur légitimité à être représentés au Conseil fédéral?», interroge l'Argovien.
Si l'homme fort du PLR sort du bois, c'est parce qu'il a été directement visé par Jürg Grossen, son homologue des Vert'libéraux. Dans une interview à la «NZZ am Sonntag», le président des «Grünliberale» l'assure: si son parti obtient 10% des voix et donc une part de sièges correspondant au Parlement, il revendiquera un siège au Conseil fédéral.
«Le parti vert'libéral a sa place au gouvernement», tonne Jürg Grossen. Les Verts aussi veulent un siège? Pas de problème pour le Bernois: «Il y a de la place à la fois pour eux et pour nous», assure-t-il. Pas question, en revanche, d'un conseiller fédéral commun entre les Verts et les Vert'libéraux, qui représenterait toutes les nuances de vert. «Nous sommes alliés sur la politique énergétique et environnementale, mais c'est tout, tonne Jürg Grossen. Personne ne demande par exemple au PS et aux Verts de se partager un siège pour un 'conseiller fédéral syndical', ni au PLR et à l'UDC pour un représentant de l'automobile...»
«Le PLR est surreprésenté depuis longtemps»
Ce qui est clair, c'est que si les objectifs sont remplis, c'est un siège PLR que les Vert'libéraux viseraient. «Ce parti est davantage sous pression que le PS, explique Jürg Grossen. Cela fait très longtemps qu'il est surreprésenté.» Comme l'UDC et le PS, les libéraux-radicaux comptent deux poulains au Conseil fédéral (actuellement Karin Keller-Sutter et Ignazio Cassis). Le Centre, grâce à Viola Amherd, n'en a qu'un.
Si l'on en croit le président des Vert'libéraux, la formule magique du Conseil fédéral devra être entièrement adaptée à l'issue des élections fédérales de 2023. Dans son esprit, tous les partis devraient obtenir un siège au Conseil fédéral, sauf l'UDC qui en obtiendrait deux. «Ce serait mathématiquement la meilleure chose à faire», avance Jürg Grossen, qui anticipe un transfert de siège du PS vers les Verts.
Pas si vite, avertit Thierry Burkart. «Si les Verts'libéraux accèdent au Conseil fédéral à la place d'un PLR, il y aurait un net glissement vers la gauche de notre exécutif fédéral», observe l'Argovien. Au Conseil national, le PVL vote dans trois-quarts des cas avec la gauche et les Verts, rappelle-t-il.
Malgré cette remise au clair, le président du PLR n'est pas du tout inquiet. «Les sondages montrent que nous sommes en progression», souligne Thierry Burkart. Et d'insister sur le «bon travail» des deux ministres libéraux-radicaux: «Il n'est pas du tout dans l'intérêt du pays et de sa stabilité de se passer de leurs services.»
Les partis gouvernementaux font bloc
De toute façon, il ne serait pas conforme à la culture politique suisse de révoquer des membres du Conseil fédéral en exercice. C'est avec cet argument que les partis établis au Conseil fédéral avaient déjà repoussé les velléités des Verts de siéger au gouvernement, en 2019. D'un point de vue purement mathématique, le parti écologiste aurait déjà eu un droit légitime à un siège à l'issue des dernières élections fédérales. Mais la candidature de l'ex-présidente du parti Regula Rytz n'avait eu aucune chance face à Ignazio Cassis.
Ce scénario pourrait bien se répéter en défaveur des Verts et des Vert'libéraux en 2023. Jusqu'à présent, les autres partis n'ont signalé aucun intérêt à céder un peu de leur pouvoir.