Ses mains caressent prudemment l'épaisse fourrure grise, puis les yeux de Ruth s'emplissent de larmes: «Ça me fait penser à mon enfance. À six ans, je montais exactement le même âne. Mais il était beaucoup plus sauvage, pas aussi tendre.» Elle regarde la bête avec amour: «J'aimerais tant te garder.»
Ruth vit à l'établissement médico-social Bru, à Grandson (VD), un lieu pour les personnes âgées et les personnes souffrant d'un handicap psychosocial ou physique. Peu avant Noël, Ruth et les autres pensionnaires ont reçu la visite de Ticœur et Pipo.
Les deux ânes sont habitués aux caresses. «Mais ils ont leur propre volonté, ils ne sont pas obligés de faire quoi que ce soit», explique Florence Scheidegger, organisatrice d'événements chez Ânes à louer. Elle se rend régulièrement dans des EMS situés à moins d'une heure de route, afin que Pipo et Ticœur ne soient pas trop loin.
Les deux ânes conviennent particulièrement bien à ces déplacements. «Ils sont plutôt petits et ont l'habitude de côtoyer des personnes très différentes», explique Florence Scheidegger. «Ils n'ont surtout pas peur des fauteuils roulants et des cannes.»
Les ânes déclenchent des émotions
Cela fait quatre ans que l'organisatrice a emmené Pipo voir son père à la maison de retraite pour la première fois. «Quand j'ai vu les émotions que cela provoquait, ça m'a tellement touchée que j'en ai eu les larmes aux yeux». Mais pourquoi les ânes ont-ils un tel impact ? «C'est grâce au calme qu'ils dégagent.» De plus, les ânes ont été socialisés pendant des années. «Bien sûr, le caractère joue aussi un rôle. Tous les ânes ne peuvent pas effectuer ces visites».
Avant que la rencontre entre l'homme et l'animal ne commence, les ânes sont revêtus de leur «uniforme de travail», un harnais avec une selle en bois munie de crochets permettant de fixer des sacoches de selle ou d'asseoir un enfant.
«Cela permet aussi à quelqu'un qui ne marche plus très bien de s'y accrocher», explique Florence Scheidegger. Mais cet uniforme est également important pour les ânes, afin qu'ils sachent que l'intervention va commencer: «Ils s'adaptent lorsqu'ils sont à proximité de personnes affaiblies, c'est-à-dire de personnes âgées, en situation de handicap ou de jeunes enfants. Les ânes savent toujours à qui ils ont affaire.» En dehors de tels groupes de personnes, ils sont plus volontaires, selon la propriétaire. «Chez moi, ils profitent de la moindre distraction pour se nourrir.»
La patience a ses limites
Une vingtaine de résidents se sont rassemblés à l'extérieur pour accueillir la visite à quatre pattes. Quelques-uns observent la scène à distance, puis finissent par se joindre aux caresses de la fourrure épaisse. «Au début, nous avons essayé de structurer davantage les visites, mais je préfère m'adapter à la situation», explique Florence Scheidegger. La patience stoïque des ânes a toutefois ses limites. Au bout d'une heure maximum, ils en ont assez et partent brouter dans la petite prairie d'à côté jusqu'à ce que le transporteur les ramène chez eux.
Question à Bettina Mutschler d'Ani.Motion, coach en thérapie assistée par l'animal
Les ânes étaient déjà présents dans la crèche de Marie et Joseph. Madame Mutschler, qu'est-ce qui rend ces animaux si spéciaux?
Les ânes sont à la fois volontaires et très sociaux. Dans le troupeau, ils sont très proches les uns des autres, mais il n'y a pas de hiérarchie. Il n'y a donc pas de chef qui décide, ils sont tous égaux. C'est différent des chiens ou des chevaux, avec qui je dois jouer au chef.
Pourquoi des animaux aussi têtus conviennent-ils si bien pour les thérapies?
Parce qu'ils sont honnêtes dans leurs réactions. Lorsqu'un âne vient de lui-même et se laisse caresser, les patients ont l'impression que c'est particulièrement vrai, qu'ils sont reconnus et vus. Pour une visite en maison de retraite, les ânes offrent la plus grande surface de câlins possible. Ils ne sont pas effrayés comme les chevaux, car ils sont profondément détendus et calmes. Cela se transmet, et c'est pourquoi les gens n'ont pas peur d'eux.
Pourquoi cela fait-il du bien de toucher les animaux?
Dans les EMS, les gens sont constamment pris en charge et se retrouvent dans un rôle de dépendance, contrairement à ce qu'ils ont généralement vécu durant leur vie. Lorsqu'ils caressent ou nourrissent des animaux, ils peuvent donner quelque chose et sont autonomes. De plus, les caresses produisent de l'ocytocine, l'hormone des câlins, qui réduit le stress.
En quoi cela est-il différent des câlins avec les humains?
Dans notre société, on ne fait généralement des câlins qu'en couple, mais le partenaire fait souvent défaut, surtout quand on est âgé. Dans ce contexte, le toucher est souvent sexualisé. Un animal a quelque chose d'innocent, on peut le câliner sans retenue, à condition qu'il le veuille aussi.
Question à Bettina Mutschler d'Ani.Motion, coach en thérapie assistée par l'animal
Les ânes étaient déjà présents dans la crèche de Marie et Joseph. Madame Mutschler, qu'est-ce qui rend ces animaux si spéciaux?
Les ânes sont à la fois volontaires et très sociaux. Dans le troupeau, ils sont très proches les uns des autres, mais il n'y a pas de hiérarchie. Il n'y a donc pas de chef qui décide, ils sont tous égaux. C'est différent des chiens ou des chevaux, avec qui je dois jouer au chef.
Pourquoi des animaux aussi têtus conviennent-ils si bien pour les thérapies?
Parce qu'ils sont honnêtes dans leurs réactions. Lorsqu'un âne vient de lui-même et se laisse caresser, les patients ont l'impression que c'est particulièrement vrai, qu'ils sont reconnus et vus. Pour une visite en maison de retraite, les ânes offrent la plus grande surface de câlins possible. Ils ne sont pas effrayés comme les chevaux, car ils sont profondément détendus et calmes. Cela se transmet, et c'est pourquoi les gens n'ont pas peur d'eux.
Pourquoi cela fait-il du bien de toucher les animaux?
Dans les EMS, les gens sont constamment pris en charge et se retrouvent dans un rôle de dépendance, contrairement à ce qu'ils ont généralement vécu durant leur vie. Lorsqu'ils caressent ou nourrissent des animaux, ils peuvent donner quelque chose et sont autonomes. De plus, les caresses produisent de l'ocytocine, l'hormone des câlins, qui réduit le stress.
En quoi cela est-il différent des câlins avec les humains?
Dans notre société, on ne fait généralement des câlins qu'en couple, mais le partenaire fait souvent défaut, surtout quand on est âgé. Dans ce contexte, le toucher est souvent sexualisé. Un animal a quelque chose d'innocent, on peut le câliner sans retenue, à condition qu'il le veuille aussi.
Raphaël est particulièrement ému par la visite des animaux. Le hasard veut que ce résident du foyer fête ce jour-là son anniversaire et il est émerveillé par ce cadeau. «Cela fait 15 ans que je n'ai pas caressé un tel animal», dit-il doucement. Chez lui aussi, les émotions débordent. Il raconte qu'il vivait autrefois dans une ferme et à quel point le lien avec les animaux lui manque.
Le contact avec les animaux «fait du bien au cœur»
Mais alors pourquoi ne pas adopter de résident à quatre pattes de façon permanente? «Nous avons un chat», nous confie Michaël Schöpf, qui dirige le service Accompagnement de la maison de retraite. «Mais il n'en fait qu'à sa tête». Un cinéma privé, un jardin où l'on cultive ses propres légumes et divers ateliers assurent la convivialité au quotidien.
C'est la première fois que l'établissement reçoit une visite animale, organisée dans le cadre du projet «Grizzly» de la Protection suisse des animaux (PSA). «Nous nous rendons environ toutes les deux semaines dans différentes maisons de retraite et de soins», explique la responsable Fabienne Häberli. En plus des ânes, des chiens et des alpagas rendent également visite à des résidents.
Pour les personnes âgées et tout particulièrement pour les personnes atteintes de démence ou de la maladie d'Alzheimer, le contact régulier avec les animaux est extrêmement précieux et utile. «Ils y répondent généralement très bien et peuvent souvent mieux s'ouvrir à un animal qu'en échangeant avec les autres personnes», nous explique Fabienne Häberli.
Il est donc important que les personnes âgées puissent, dans la mesure du possible, emmener leurs animaux de compagnie avec elles en EMS. Selon un sondage de la PSA, 83% des maisons de retraite et des établissements médico-sociaux sont prêts à accueillir des animaux. Les chats sont les plus appréciés, suivis des poissons, des chiens et des oiseaux.
Selon Fabienne Häberli, «avec son propre animal de compagnie, on emporte aussi un peu de son propre foyer. Pour les seniors, c'est un soutien émotionnel. Les animaux font du bien au cœur, assurent une proximité et structurent le quotidien».