L’affaire Lüscher est-elle en train de devenir une affaire Burkart? Le président du PLR est très exposé depuis les révélations de Blick quant aux blagues racistes et sexistes du conseiller national genevois dans un groupe WhatsApp interne au parti.
Ce sont les déclarations de Thierry Burkart, samedi dernier à la radio SRF, qui ont lancé la polémique pour de bon en Suisse alémanique. Refusant de se prononcer sur les propos sulfureux de son collègue du National, le chef de file libéral-radical a préféré annoncer des représailles si le lanceur d’alerte venait à être retrouvé.
«Je n’ai pas été étonné par les écrits de Christian Lüscher, mais par l’absence de condamnation de Thierry Burkart, oui», déclarait en substance une élue PLR sous couvert d’anonymat à Blick, en début de semaine.
L’Argovien a fini par lâcher du lest. Dans la «NZZ», Thierry Burkart confesse que «ce n’était pas la meilleure communication» de sa part. «J’aurais dû dire que ni le racisme, ni le sexisme n’ont une place au PLR», admet celui qui tient le gouvernail libéral-radical depuis huit mois.
«Règlements de comptes au PLR»
Un rétropédalage tardif que le journal zurichois accompagne d’une formule plutôt acide: «Respectons l’aveu de Thierry Burkart. Mais tout le monde le sait: dans l’échelle des valeurs d’un officier militaire tel que lui, la confiance, la fiabilité et l’intégrité sont les plus importantes.» Une manière de dire que la traque à la «taupe» de s’interrompra pas.
Le président du PLR a aussi droit à une pleine page ce vendredi dans les journaux du groupe ESH. Dans un article intitulé «Règlements de comptes au PLR», les médias régionaux romands restituent le climat délétère qui règne au sein du parti avant l’assemblée des délégués prévue ce samedi dans les Alpes uranaises.
Car l’«affaire Lüscher» n’est pas le seul caillou dans la chaussure de Thierry Burkart. Des propos échangés lors d’une séance de la fraction PLR sous la Coupole ont été diffusés par la presse alémanique. Une fuite qui matérialise les tensions entre les soutiens de l’ancienne présidente, Petra Gössi, qui avait amorcé un virage vert au PLR, et ceux du nouveau patron, qui avait milité contre la loi CO2. «Quand celle-ci a été refusée par les votants, Petra Gössi a démissionné», rappellent les journaux d’ESH.
Pour un retour au nucléaire?
Thierry Burkart doit non seulement diriger une fraction divisée sur plusieurs sujets, mais il fait l’objet d’attaques régulières de la «Weltwoche», proche de l’UDC, qui l'a pris en grippe. La ligne de l'Argovien n’est pas toujours très claire: il est «imprévisible» (selon la «NZZ») sur le dossier européen, ce qui n’aide pas son camarade de parti et ministre des Affaires étrangères, le président de la Confédération, Ignazio Cassis.
Le chef de file du PLR a bien tenté de calmer le jeu dans un papier de position sur l’énergie, intitulé «Moins de polémique, davantage de courant», mais une phrase subtilement glissée a eu un effet boomerang: Thierry Burkart évoque des «centrales nucléaires de nouvelle génération». «Veut-il un retour au nucléaire? Lui, l’Argovien, canton où se trouvent les centrales encore en activité?», se demande le journal zurichois. Et ce alors que la Suisse a décidé de sortir du nucléaire en 2011, sous l'impulsion de… l’Argovienne Doris Leuthard.
Depuis dix jours, c’est donc Thierry Burkart qui se retrouve sous les projecteurs. Quid de Christian Lüscher? Le Genevois, outre ses explications initiales dans Blick, ne s’est pas exprimé publiquement. Ce sont le vice président du parti, Philippe Nantermod, et le chef de groupe, Damien Cottier, qui ont volé au secours du vétéran sous la Coupole — après plus de quinze ans à Berne, il ne se représentera pas — sur Twitter.
Christian Lüscher, «comme un jeune trader»
Épargné à Berne, l’avocat genevois en prend pour son grade dans la presse. «C’est une personnalité du Parlement. Il a tellement confiance en lui-même qu’il a essayé de faire réviser la Loi sur la circulation routière simplement parce qu’il a écopé d’une amende de 40 francs pour avoir parqué son scooter sur un trottoir», écrit la «NZZ». La même référence a servi à «L’Illustré» dans un éditorial acerbe.
«Parfois, poursuit le quotidien zurichois, il se comporte comme un banquier de Wall Street dans les années 1980. En tout cas en ce qui concerne son vocabulaire et sa façon de s’adresser aux gens. Désormais, toute la Suisse a pu s’en apercevoir.»