Souriez, vous serez filmé!
Voici comment les CFF vont vous pister

Les CFF vont installer un système de suivi des pendulaires. Ces caméras, déclarées anonymisantes, seront notamment capables de traquer le direction d'un regard ou de détecter le port du masque. Est-ce vraiment sans risque pour la protection des données?
Publié: 17.11.2021 à 12:54 heures
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Dernière mise à jour: 17.11.2021 à 14:00 heures
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

Rien n’arrête le progrès, ni les CFF… à part peut-être un trou dans le sol. Après le chaos du blocage entre Genève et Lausanne, la compagnie fait à nouveau parler d’elle. En cause, une nouvelle acquisition: un système de capteurs pour pister les pendulaires sera installé dans 20 à 50 gares, dont les noms sont encore inconnus, indique «Le Temps».

C’est le site alémanique «Inside IT», spécialisé dans l’informatique, qui a repéré cette information. Les CFF ont signé un contrat de 10,2 millions de francs à l’entreprise zurichoise Analysis Simulation Engineering, spécialisée dans l’analyse de données, en particulier dans le domaine du transport. Cette firme travaille déjà pour les CFF: ses systèmes équipent par exemple les gares de Berne, Bâle, Lenzbourg et Zurich Hardbrücke. Dans ces endroits, 17 zones de 40 à 700 mètres carrés sont sous surveillance numérique.

Pour quoi faire?

Cette haute technologie aura un but bien précis. Contactés par «Le Temps», les CFF affirment que l’objectif est de «permettre une circulation optimale des clients dans les gares, assurer la sécurité et la meilleure capacité possible des espaces de circulation et des structures des gares», selon un porte-parole. Jusqu’à présent, ces appareils ont déjà servi au comptage des flux de personnes dans les gares. Désormais, il s’agit surtout d’avoir recours au système massivement.

Grâce à des capteurs perfectionnés et des algorithmes capables d’analyser les données, la firme zurichoise à l’origine de ces détecteurs affirme pouvoir effectuer des distinctions très fines. Ses systèmes peuvent par exemple faire la différence entre des employés et des clients par les mouvements, ou analyser dans quelle direction regardent ces personnes et si elles portent ou non un masque, tout en gardant les données anonymes.

«Nous avons à disposition plusieurs types de capteurs, plus ou moins adaptés à des lieux sombres, par exemple. Et nous pouvons aussi repérer des bagages, ce qui peut être utile pour détecter des objets laissés à l’abandon et qui pourraient constituer un danger», détaille Uri Schtalheim, directeur de Analysis Simulation Engineering, interrogé par «Le Temps».

Est-ce dangereux pour la protection des données?

Face à de telles installations, la question de la protection des données se pose comme une évidence. «Aucun de nos systèmes ne permet d’identifier les personnes ou de croiser les données avec d’autres sources», affirme Uri Schtalheim, toujours dans «Le Temps». «Aucune image n’est enregistrée, dit de son côté le porte-parole des CFF. Seuls le nombre et la position des personnes sont pris en compte, et il est impossible d’en tirer des données personnelles.»

Le préposé fédéral à la protection des données a examiné ces analyses. Selon sa porte-parole, «les CFF nous ont confirmé qu’il s’agit de données absolument anonymes. La saisie de ces données sert à la sécurité dans les gares. Les CFF le font depuis 2019». «Nos systèmes ne sont pas capables de saisir des données personnalisées», insiste encore Uri Schtalheim.

Pas les premiers, pas les derniers

Des systèmes de surveillance comparables existent déjà dans d’autres secteurs. Swisscom, par exemple, vend ses données anonymes, recueillies grâce aux signaux de la téléphonie mobile – qui donnent des résultats similaires aux capteurs des CFF. Cela permet, par exemple, de déterminer la quantité de touristes présents à un endroit donné et à un moment précis, ou encore à la Confédération de calculer le temps de trajet moyen de la population suisse dans le cadre de la lutte conte le Covid. Les secteurs de la publicité, du tourisme et du commerce de détail sont naturellement les acheteurs en tête de file dans ce genre de cas.

Outre le géant Google, qui vend les données des utilisateurs de ses applications qui l’autorisent à suivre leurs mouvements, la Coop s’y est également mise. Comme l’avait révélé «Le Temps», ce printemps, l’entreprise introduisait des scanners à main (destiné à enregistrer ses achats) dotés de micro et de caméra. A l’époque, l’on craignait qu’ils ne soient utilisés pour pister les clients. «Non, les micros et les caméras ne sont pas activés sur ces scanners», assurait mardi une porte-parole du distributeur au quotidien.

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