Il est au rendez-vous chaque matin. Que ce soit depuis son bureau, en déplacement ou directement depuis le Palais fédéral, le conseiller national UDC et rédacteur en chef Roger Köppel se lève tôt chaque jour de la semaine pour proposer à ses lecteurs son commentaire matinal sur la situation du monde. Son format vidéo quotidien est le (plus ou moins bien)-nommé «Weltwoche daily».
Le politicien journaliste a commis un impair la semaine dernière, et l’une de ses présentations matinales pourrait bien lui coûter cher. Roger Köppel a effectivement divulgué face caméra des informations confidentielles du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Il a ainsi violé un secret de commission, auquel il est astreint en tant que membre de la Commission du conseil national de politique extérieure. C'est ce que relatait dimanche la «NZZ am Sonntag».
Citation d’un document confidentiel
Roger Köppel a fait état d’une descente des services secrets intérieurs russes (FSB) le 22 mars à Moscou. Les fonctionnaires avaient perquisitionné une filiale de l’horloger de luxe suisse Audemars Piguet et saisi des montres d’une valeur de plusieurs millions de francs.
Le conseiller national UDC s’est appuyé sur une note d’information du DFAE partagée à la commission pour appuyer son propos. Il a lu mot pour mot ce qui était écrit dans le document classé confidentiel. Outre le paragraphe sur la rafle de montres, Roger Köppel a cité d’autres passages du document du DFAE: un passage de son émission qui enfreint manifestement la loi sur le Parlement.
La commission veut discuter de l’incident
Les violations du secret des commissions ne sont pas rares. Il peut arriver que les membres du Parlement mentionnent de temps en temps des éléments de la commission dans des conversations confidentielles, parfois par inattention, parfois pour en tirer des avantages politiques personnels ou encore pour nuire à autrui. Les journalistes utilisent ces informations pour leur travail. Mais il est extrêmement rare qu’un parlementaire viole le secret de la commission en public, en direct devant une caméra.
Interrogé, Roger Köppel lui-même nie avoir commis une violation du secret de la commission. Mais il n’explique pas non plus pourquoi, selon lui, il n'aurait rien à se reprocher.
Son collègue de parti Franz Grüter, président de la Commission de politique extérieure du Conseil national, a une autre opinion. Il confirme que Roger Köppel a lu un document officiel et il indique que l’incident sera abordé lors de la prochaine séance début avril. Lorsqu’on lui demande ce qu’il pense de l’action de son collègue de parti, le conservateur se contente de cette déclaration laconique: «J’en appelle toujours au respect du secret de la commission.»
Roger Köppel risque gros
Pour l’animateur du «Weltwoche daily», cette infraction pourrait entraîner une procédure disciplinaire et même, en théorie, une procédure pénale. En arriver à cette dernière éventualité reste toutefois peu probable: le document lu en direct était bien confidentiel, mais sa divulgation n’aurait pas eu de conséquence directe sur la sécurité du pays. Roger Köppel pourrait même échapper à une procédure disciplinaire, qui pourrait mener à un blâme ou à une exclusion temporaire de la Commission.
Une procédure disciplinaire devrait être ouverte par le bureau du Conseil national, dans lequel siègent, outre la présidente du Conseil national Irène Kälin, les présidents des groupes parlementaires.
Abolir le secret?
L’UDC porte depuis longtemps un regard critique sur le secret des commissions. Il y a tout juste un an, le conseiller national Andreas Glarner avait déposé une intervention demandant la suppression partielle de ce principe. Il ne s’agissait ici toutefois que des votes au sein des commissions et non des documents dont disposent les membres des commissions.
La violation manifeste du secret de la commission par Roger Köppel serait donc restée interdite, même avec l’aboutissement de la proposition de son collègue de parti.
(Adaptation par Louise Maksimovic)