Dès son arrivée au pouvoir, le président américain a durci le ton avec ses partenaires européens. Il a averti l’Europe, le 20 janvier, qu’elle doit acheter davantage de produits américains, ainsi que du pétrole et gaz, ou souffrir de nouveaux tarifs douaniers.
Face à cette nouvelle administration très offensive, les dirigeants de multinationales suisses comme UBS, Novartis ou Zurich Insurance Group se montrent relativement admiratifs. Réunis à Davos, les CEOs de ces groupes, très présents sur les marché américain, ont cité les Etats-Unis comme un modèle supérieur à l’Europe, critiquée pour son manque de dynamisme.
Moins de réglementations: positif pour UBS
Lors d’une table ronde au Forum économique de Davos, le CEO d’UBS, Sergio Ermotti, a ainsi fait l'éloge du dynamisme américain et appelé l'Europe à s’en inspirer. «Les Etats-Unis savent comment sortir des crises et redémarrer rapidement, et c’est ce que nous devons apprendre, en particulier en Europe: comment utiliser les crises pour se réinventer», a déclaré le Tessinois le 22 janvier.
Pour UBS, la tendance de la nouvelle administration à freiner les réglementations va dans le bon sens. «Il est important pour nous de ne pas voir apparaître de nouvelles régulations non nécessaires sur le marché américain», a déclaré Sergio Ermotti à CNBC en marge de Davos.
Pour UBS, le marché américain reste essentiel: la moitié de la fortune gérée par le groupe pour le compte de sa clientèle privée, ainsi que la moitié du revenu de cette division, provient de la région «Amériques». Le marché américain représente par ailleurs le tiers des avoirs gérés pour le compte de la clientèle institutionnelle. UBS compte en outre un gros actionnaire américain: le géant BlackRock, qui détenait 5% du capital de la plus grande banque suisse à fin 2023.
Novartis ne craint pas Robert Kennedy Jr.
Sergio Ermotti n’est pas le seul à citer les Etats-Unis en exemple. Le CEO de Novartis a également estimé le 21 janvier à Davos que l’Europe doit davantage suivre le modèle américain. «L’ère Trump 2.0 est un grand moment pour l’Europe», a déclaré à CNBC le CEO de Novartis, Vas Narasimhan, en marge du Forum. «L’Europe doit, elle aussi, réduire les réglementations et doper sa compétitivité. Elle doit décider maintenant, dans un monde où les Etats-Unis déréglementent fortement et cherchent à accroître leur compétitivité, si elle va continuer à s’asseoir sur ses mains, à ajouter d’autres réglementations, ou si elle va enfin devenir plus compétitive et pro-innovation. C’est le moment d’agir.»
Par ailleurs, Vas Narasimhan a relativisé les risques posés par la nomination de Robert F. Kennedy Jr. comme ministre de la santé. Pourtant, ce dernier, antivax déclaré, avait accusé l’industrie pharma de «corruption» et d’ «empoisonnement de masse». Mais bien au contraire, le CEO de Novartis, qui s’est gardé de critiquer le nouveau secrétaire à la Santé, voit dans l’arrivée de la nouvelle administration une aubaine. Selon Bloomberg, le secteur pharma entend obtenir l’annulation des réglementations de l’ère Biden, jugées hostiles à l’innovation, et d’autres qui ont réduit le prix de certains médicaments dans le cadre de Medicare.
Les Etats-Unis représentent le plus gros marché pour Novartis, qui y écoule 40% de ses ventes annuelles, contre 30% pour le marché européen. Près du quart des employés du géant bâlois travaillent aux Etats-Unis, car le groupe y a développé d’importantes activités de recherche et développement.
Lors de son discours offensif au Forum de Davos le 23 janvier, le président Donald Trump a annoncé «la plus importante vague de déréglementations dans l’histoire des USA», des «baisses d’impôts massives», et l’émergence des Etats-Unis comme « superpuissance manufacturière», et «capitale mondiale de l’IA et de la crypto.» Il a également incité agressivement toutes les entreprises du monde à venir fabriquer leurs produits aux Etats-Unis, auquel cas elles profiteront d'avantages fiscaux imbattables. Dans le cas inverse, elles encourront des tarifs douaniers.
Zurich Assurance mise sur le marché américain
L’effet Trump s’est aussi reflété dans le discours du CEO de la Zurich Insurance Group, Mario Greco. «Alors qu’on entre dans l’ère Trump 2.0 d’America First, l’Europe devra mieux défendre ses intérêts économiques», a-t-il déclaré à Davos. «L’Europe a toujours été à la traine des Etats-Unis. Dans un monde qui s’accélère, avec beaucoup d’innovation, l’Europe soit se réveiller. Et j’espère qu’elle prend ces évolutions au sérieux.»
Il a évoqué tous les développements dans l’IA et dans le digital. « L’Europe n’a pas investi, comme les Etats-Unis et la Chine l’ont fait. Enfin, il reste difficile de lancer son entreprise et de faire des affaires en Europe. Alors je le répète, l’Europe doit se réveiller.» Le patron du géant zurichois a ajouté que l’Europe était devenue trop préoccupée avec les réglementations et freinait son progrès, en particulier dans les nouvelles technologies.
L’Amérique du Nord est le deuxième plus gros marché du groupe Zurich pour les produits d’assurance après l’Europe, et l’un des plus prometteurs selon son manager régional, qui a annoncé une bonne dynamique de croissance en 2023. Zurich emploie 18'000 personnes sur ce marché et y génère 33 milliards de chiffre d’affaires annuel. En termes de bénéfice opérationnel, avec 5 milliards de dollars publiés pour 2023, c’est la région numéro un pour la compagnie d'assurances, devant l’Europe.