Un juge d'instruction parisien a décidé d'enquêter sur deux plaintes de l'association Foodwatch visant le géant veveysan de l'alimentation Nestlé et le groupe Sources Alma concernant le traitement de leurs eaux minérales.
Confirmant partiellement une information des médias Radio France et Le Monde, une source proche du dossier a indiqué à l'AFP que le magistrat instructeur est passé outre les réquisitions du parquet de Paris, qui l'estimait incompétent territorialement et lui demandait donc de ne pas enquêter, et a décidé mercredi de se pencher sur ce scandale.
Foodwatch avait déposé cet automne à Paris deux plaintes avec constitution de partie civile contre les pratiques de Nestlé et du groupe Sources Alma (Cristaline, St-Yorre...). L'association de consommateurs CLCV avait aussi porté plainte contre X.
«Foodwatch accueille avec une grande satisfaction l'annonce de l'ouverture d'une information judiciaire dans ces affaires», a réagi l'avocat de l'association, Me François Lafforgue. «Nous demandons maintenant à la justice pénale de faire toute la lumière sur les agissements frauduleux des producteurs d'eaux minérales naturelles, et de dégager toutes les responsabilités, à quelque niveau que ce soit», a ajouté cet avocat spécialisé en droit de l'environnement.
Macron nie «l'entente»
Début février, Radio France et Le Monde ont publié des éléments accusant la présidence et les services du Premier ministre d'avoir cédé au lobbying du groupe Nestlé (Perrier, Hépar, Contrex, Vittel), en laissant le groupe commercialiser des eaux non conformes à la réglementation et à risque pour la santé, malgré les recommandations d'interdiction des autorités sanitaires.
Emmanuel Macron a réagi à cette affaire en affirmant qu'il n'y avait eu ni «entente» ni «connivence» avec Nestlé. «Je ne suis pas au courant de ces choses-là. Il n'y a de l'entente avec personne, il n'y a pas de connivence avec qui que ce soit», a-t-il assuré en marge d'un déplacement en région parisienne.
Systèmes interdits de microfiltration
Début 2024, visé par de premières révélations, Nestlé Waters avait reconnu avoir eu recours à des systèmes interdits de microfiltration pour maintenir la «sécurité alimentaire» de ses eaux minérales. «Toutes nos eaux aujourd'hui sont pures à la source», a affirmé à l'AFP le 7 février Muriel Lieneau, directrice générale de Nestlé Waters, filiale du géant suisse de l'agroalimentaire.
Dans un dossier relatif à ses eaux vosgiennes, le groupe a accepté en septembre 2024 de payer à Epinal une amende de 2 millions d'euros pour échapper à un procès. Les révélations de presse avaient conduit le Sénat à lancer en novembre une commission d'enquête. Un premier rapport sénatorial d'octobre 2024 pointait déjà l'«opacité» des pouvoirs publics et des industriels dans ce dossier.