Réforme de l'armée
Les jeunes du Centre veulent un service citoyen

La ministre de la défense Viola Amherd veut résoudre le problème du personnel de l'armée par une réforme du service obligatoire. La proposition d'obligation pour tous, femmes et hommes, d'effectuer leur service civique suscite de nombreuses discussions.
Publié: 28.07.2021 à 07:11 heures
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Dernière mise à jour: 28.07.2021 à 09:05 heures
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Thomas Süssli, le chef de l'armée serait à court de soldats pour gonfler ses rangs.
Photo: Thomas Meier
Daniel Ballmer, Louise Maksimovic (adaptation)

L’armée suisse serait en pénurie de soldats. Chaque année, ses effectifs s’amoindrissent et des milliers de jeunes s’en détournent. Dans une interview à Blick fin 2020, le chef de l’armée, Thomas Süssli, se désolait: «D’ici la fin de la décennie, il nous manquera environ un quart de nos effectifs!». En chiffres, cela représente 30’000 soldats.

Le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) recherche actuellement une solution pour pallier la pénurie. Le «Tages-Anzeiger» rapporte qu’elle aurait élaboré quatre variantes pour le futur service obligatoire.

Selon les sources dont dispose Blick, quatre propositions seraient envisagées.

1. Un service de sécurité obligatoire

C’est l’option qui se rapproche le plus de la situation actuelle: les hommes suisses resteraient soumis à leur obligation de service, tandis que les femmes et les étrangers en seraient toujours exemptés. Le service civil et la protection civile seraient fusionnés en une organisation de protection civile. Les forces armées ne recruteraient en priorité que le nombre de personnes nécessaires pour atteindre le nombre effectif de 140’000 membres dans les rangs de l’armée. Le reste servirait dans la protection civile.

2. Le modèle norvégien

Si ce modèle est retenu, les femmes suisses seraient également soumises au service militaire obligatoire et devraient suivre une orientation obligatoire. Elles ne devraient toutefois pas être obligées de servir dans l’armée bien que la manoeuvre ait pour but de les motiver à servir dans l’armée ou la protection civile. Les étrangers résidant en Suisse pourraient également être amenés à réaliser un service volontaire à l’avenir. Le service civil au sens actuel du terme serait donc caduc. En Norvège, ce système a été introduit en 2015.

3. L’obligation d’un service civil pour toutes et tous

Dans ce cas de figure, tous les citoyens et toutes les citoyennes suisses seraient obligés de servir. Le service civil serait remplacé par un service dans les secteurs social, sanitaire ou environnemental. Cela concernerait toutes les personnes qui ne font partie ni de l’armée, ni de la protection civile. Avec cette option, on pourrait déployer dans ces secteurs six fois plus de conscrits par rapport à aujourd’hui.

4. L’extension du service civil obligatoire

Cette option changerait un certain nombre de choses. Tous les citoyens suisses devraient effectuer une forme de service, mais personne ne serait obligé d’effectuer ce service dans l’armée ou la protection civile. Parmi les services possibles, on peut citer «les mandats politiques au niveau communal, le service dans les corps de pompiers, les bureaux dans les associations, le service auprès des Samaritains ou l’engagement dans les fonctions sportives». Pour pouvoir équiper l’armée de manière adéquate, on dépend de «l’attractivité des incitations et des services».

Cette réforme concernerait principalement les jeunes électeurs. Mais ces derniers ne voient pas d’un bon œil ces propositions.

Les jeunesses de parti divisées

Sarah Bünter est clairement en faveur d’un service des citoyens. La présidente du Parti des Jeunes du Centre, est solidaire avec la ministre de la Défense Viola Amherd qui appartient au même parti. «Nous sommes favorables à un service obligatoire pour les hommes et les femmes qui soit pensé de manière plus large», déclare-t-elle. Sarah Bünter fait référence à l’initiative populaire pour un «Service Citoyen», qui doit être lancée en août et qui est soutenue par la jeunesse de son parti. Elle est convaincue qu’en augmentant l’attrait autour du service citoyen en le diversifiant ce ne sera plus un problème de maintenir les effectifs requis au sein de l’armée. «Le prestige de la formation dans l’armée doit retrouver un autre statut à l’avenir, également dans la profession.»

Le président des Jeunes Libéraux-Radicaux, Matthias Müller, est de son côté plutôt sceptique: «L’ancien système de milice, qui est orienté à juste titre vers la politique de sécurité, a fait ses preuves», dit-il. Il ne voit aucune raison de le réformer.

Les jeunes socialistes ont un avis encore plus tranché. «Selon nous, plutôt que d’étendre le service obligatoire, il faudrait tout simplement l’abolir», appelle Sandro Covo, un membre du comité exécutif de la Jeunesse socialiste (JS).

La JS s’oppose aux quatre propositions de réforme. Ils sont également contre le service civil obligatoire, «parce que nous refusons le travail forcé».

Les Jeunes UDC reconnaissent de leur côté les problèmes de personnel dans les rangs de l’armée et de la protection civile. C’est là qu’il faut investir les efforts, estime leur secrétaire général, Lukas-Fritz Hüppin.

Des officiers alarmés

En mai, le DDPS a organisé une consultation sur ces propositions. Lors d’un atelier, ces propositions ont été présentées à des représentants de l’économie, de la société civile et de la Société suisse des officiers (SSO) en plus des jeunes partis. L’armée y aurait toutefois rencontré peu de compréhension selon certains dires.

Beaucoup ont remis en question le fait même que l’armée soit en pénurie de recrues. L’évaluation indique qu’à part la SSO, «les participants à l’atelier n’ont pas perçu le recrutement futur en personnel pour les forces armées et la protection civile comme un problème». «J’ai été un peu choqué par ce constat», a déclaré le président de la SSO, Stefan Holenstein.

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