Accepteriez-vous de vous faire opérer par un médecin qui se sent fatigué, usé et épuisé ? Probablement pas. Pourtant, deux tiers des médecins-assistants et chefs de clinique se sentent «le plus souvent ou souvent fatigués». C'est la conclusion de la dernière enquête menée par l'Association suisse des médecins-assistants et chefs de clinique (ASMAC).
La cause de cet épuisement est toute trouvée: La moitié du corps médical travaillerait plus de 50 heures par semaine. Certes, le nombre d'heures de travail diminue en moyenne, étant donné que de plus en plus de médecins travaillent à temps partiel. Mais deux tiers des personnes interrogées déclarent effectuer plusieurs heures supplémentaires. Dans deux tiers des cas, le droit du travail est enfreint, selon les résultats de l'enquête.
Opération après deux heures de sommeil
Ce qui est nouveau, ce sont les conséquences sur les médecins: 52% indiquent qu'ils pensent à arrêter. Lors de la dernière enquête, il y a trois ans, ce chiffre était encore de 39%.
La frustration du corps médical s'est manifestée de manière impressionnante l'été dernier à l'hôpital d'Einsiedeln, dans le canton de Schwytz: sept médecins-assistants ont donné leur démission.
Des médecins-assistants d'autres hôpitaux se sont, eux aussi, confiés à Blick sur leurs conditions de travail. «Il m'est arrivé de travailler de 6h30 à 22h», se souvient le médecin Thomas R.*. Mais la nuit, il était tout de même d'astreinte. «On ne dort qu'une ou deux heures et on opère ensuite pendant des heures». Ce chirurgien expérimenté en a eu assez à un moment donné. Il a quitté son poste et occupe désormais un emploi de bureau dans une caisse d'assurance maladie.
Lutte contre la bureaucratie
Un autre chiffre inquiète: 60% des personnes interrogées durant l'enquête indiquent que des patients ont déjà été mis en danger à cause d'une fatigue excessive.
Le problème serait lié à la bureaucratie croissante dans le secteur de la santé. «Pour beaucoup, c'est surtout la charge des tâches administratives qui est fatigante et frustrante, car ils ont surtout choisi ce métier pour s'occuper des patients», déclare Anna Wang, présidente de l'ASMAC Zurich.
Une table ronde aura lieu le 9 juin prochain en présence de l'ASMAC, de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), de l'association des hôpitaux H+, de la Conférence des directeurs de la santé, de l'Institut suisse pour la formation médicale postgraduée et continue (ISFM) et de la Fédération des médecins (FMH) afin d'obtenir de trouver une solution.
* Nom connu de la rédaction