«Nous ne devons pas être la faille de sécurité de l'Europe»
Trump coupe les vivres à l'Ukraine: qu'est-ce que cela signifie pour la Suisse?

Le président américain Donald Trump suspend l'aide militaire à l'Ukraine. Mais qu'est-ce que cela signifie pour la politique de sécurité et d'asile de la Suisse? Et comment réagit-on au Palais fédéral?
Publié: 05.03.2025 à 09:45 heures
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La conseillère nationale PLR Jacqueline de Quattro exprime son inquiétude. Selon elle, la migration est une arme pour Poutine.
Photo: keystone-sda.ch
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Tobias Bruggmann, Joschka Schaffner, Sophie Reinhardt et Sven Altermatt

Le président américain Donald Trump prend les choses au sérieux: le gouvernement américain suspend provisoirement l'aide militaire à l'Ukraine. L'aide sera donc suspendue jusqu'à nouvel ordre et fera l'objet d'un examen. Les conséquences pourraient être dramatiques. Pour la Suisse aussi? Blick s'est renseigné au Palais fédéral et fournit des réponses.

Comment la Suisse doit-elle réagir?

Les avis divergent à ce sujet. Pour Fabian Molina, spécialiste des affaires étrangères au Parti socialiste (PS), une chose est claire: «Il est décisif pour la sécurité de la Suisse et de l'Europe que Poutine ne gagne pas cette guerre. Nous avons donc tout intérêt à soutenir l'Ukraine». Selon lui, la Suisse doit sortir de sa réserve en matière de soutien à l'Ukraine. «La neutralité nous permet de développer l'aide humanitaire, la semaine prochaine le Conseil national devra s'en occuper».

Le conseiller national du Parti libéral-radical (PLR) Hans-Peter Portmann affirme que pour l'Europe, cela doit être «un appel au réveil». «Les dividendes de la paix, dont la Suisse et l'Europe ont longtemps profité, ne seront plus valables».

Roland Rino Büchel, membre de l'Union démocratique du centre (UDC) en charge de la politique étrangère, voit les développements actuels avec légèreté. «La manière de procéder de Trump est typique pour lui: il frappe d'abord et discute ensuite.»

Qu'en est-il la diplomatie suisse?

La diplomatie suisse reste calme jusqu'à présent. Après l'esclandre entre Trump et Zelensky vendredi, la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter n'a réaffirmé que ce week-end l'engagement pour une paix juste en Ukraine. La Suisse reste déterminée à soutenir une paix juste et durable, a-t-elle écrit sur la plateforme X. La Suisse condamne «l'agression de la Russie contre un Etat souverain».

Trop faiblard? La conseillère nationale des Vert-e-s Sibel Arslan souhaite que le Conseil fédéral présente maintenant des mesures sur la manière dont la Suisse entend se comporter dans ce conflit et sur la manière de réagir à la démonstration de force de l'administration Trump.

Pour la conseillère nationale PLR Jacqueline de Quattro, il est toutefois clair que «nous devons simplement continuer à nous montrer solidaires».

Qu'est-ce que cela signifie pour la défense nationale?

Sur le fond, les parlementaires sont d'accord: les développements actuels ne sont en aucun cas favorables à la sécurité de l'Europe et de la Suisse. Les partis ne sont toutefois pas d'accord sur la manière dont la Suisse doit y réagir. Pour le conseiller national UDC Mauro Tuena, une chose est claire: la Suisse doit rester neutre. «Nous ne devrions pas être obligés de suivre l'Europe en ce moment, dit-il. Une armée forte concentrée sur la défense de notre pays sera peut-être plus importante que jamais.»

Jacqueline de Quattro, demande elle aussi une Suisse capable de se défendre elle-même dans le «pire des cas». «Nous ne devons pas être la faille de sécurité de l'Europe», dit-elle. Une adhésion à une alliance de défense comme l'OTAN est certes exclue, mais l'armée suisse doit tout de même collaborer davantage avec l'UE.

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La Suisse doit faire partie de l'architecture de sécurité européenne, car elle en profite également
Elisabeth Schneider-Schneiter, conseillère nationale du Centre
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La conseillère nationale du Centre Elisabeth Schneider-Schneiter est également de cet avis: «La Suisse doit faire partie de l'architecture de sécurité européenne, car elle en profite également». Et même dans le camp de gauche, l'exigence perce. «La guerre menace la sécurité de l'Europe et nous avons besoin d'une réponse européenne», déclare par exemple Sibel Arslan.

Y aura-t-il plus de réfugiés?

Interrogé par Blick, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) écrit qu'il a pris connaissance des dernières déclarations des Etats-Unis. «En l'état actuel des choses, le SEM ne pense pas que cette annonce aura des conséquences immédiates sur le nombre de demandes d'asile et de protection en Suisse».

Mais à plus long terme, les réfugiés pourraient bien être plus nombreux, selon les politiciens. «Personne en Ukraine ne veut vivre sous l'occupation russe, c'est pourquoi il faut s'attendre à une augmentation du nombre de réfugiés si le Kremlin continue à annexer le pays. En outre, moins d'Ukrainiens pourront rentrer chez eux si la guerre ne prend pas fin», explique le conseiller national socialiste Fabian Molina.

Jacqueline de Quattro qualifie la migration «d'arme de Poutine». «Plus il y a d'arrivées, plus le soutien diminue. On le remarque déjà au sein du peuple suisse», dit-elle. «La Suisse doit bien sûr être à la hauteur de sa tradition humanitaire. Mais la Confédération doit être plus sélective. Il y a aussi des profiteurs qui viennent d'autres pays que l'Ukraine dans le sillage de la guerre.»

Qu'est-ce que cela signifie pour l'acquisition d'avions de combat?

Les parlementaires doutent également de la fiabilité du prix fixe d'environ 6 milliards de francs pour les avions de combat F-35 en provenance des Etats-Unis. Les politiciens en charge de la sécurité demandent au «Tages-Anzeiger» un nouvel examen du deal. Le F-35 devient de plus en plus un risque pour la Suisse en termes de finances mais aussi de politique de sécurité, a déclaré à «20 Minutes» la conseillère nationale PS Sarah Wyss, présidente de la commission des finances.

«Un partenaire contractuel fiable ne se comporte jamais de cette manière, a-t-elle déclaré. La Suisse devrait envisager de résilier complètement le contrat F-35. Je demande en outre au Conseil fédéral des réponses sur la manière dont on pourrait éventuellement se retirer du contrat d'acquisition et sur les conséquences que cela aurait, y compris sur le plan financier.»

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