Le Centre qui méprise ouvertement le MCG et l'UDC, le MCG qui tacle explicitement le Centre (y compris dans nos colonnes), le PLR qui essaie tant bien que mal de concilier ces trois entités... Ce n'était pas gagné d'avance.
Après l'annonce de la grande alliance de la droite pour le second tour des élections genevoises au Conseil d'Etat, en début de semaine, quatre membres du Centre et une élue PLR ont déposé leur démission ce jeudi, révèle la «Tribune de Genève».
Ainsi, Sophie Buchs, ancienne conseillère municipale PDC carougeoise, qui a également été secrétaire générale du parti, a quitté les centristes du bout du Léman — de concert avec quatre autres membres, dont l'identité n'a pas été révélée par le journal local. Du côté du PLR, c'est Françoise Saudan, ancienne conseillère aux États (entre autres), qui a claqué la porte.
En cause: le mécontentement face à cette entente avec l'UDC et le MCG. Françoise Saudan a été la seule démissionnaire à s'exprimer explicitement face aux médias. Dans une lettre publiée dans le quotidien «Le Temps» jeudi, elle explique: «Il fut un temps où j’étais fière d’appartenir à l’Entente de centre droit […]. Il fut un temps où ces partis de centre droit ne foulaient pas aux pieds leurs convictions pour de petits calculs électoraux et ne se seraient jamais abaissés à conclure des alliances contre nature avec des formations qui ne partagent pas nos valeurs d’accueil et d’ouverture à l’Europe, et qui tiennent des discours d’une violence à l’égard de nos voisins français que je récuse simplement.»
Elle ajoute qu'il est «d’autant plus étonnant de constater que cette alliance a aussi comme justification d’exclure Pierre Maudet, en raison de prétendues valeurs éthiques qui ne retiennent nullement aujourd’hui les partis de l’Entente de se compromettre avec des formations dont les valeurs sont aux antipodes d’un centre droit libéral et humaniste.»
D'autres départs à venir?
Les présidents des deux partis respectifs ont commenté ces départs dans la «Tribune de Genève». «Oui, nous avons des démissions et des commentaires de gens qui ne sont pas contents, mais je ne dirais pas qu’il y a une vague de départs», commente le président du Centre, Jacques Blondin.
Au politicien de confesser que l'appréhension de ses troupes face à une alliance avec le MCG et l'UDC est un problème à gérer: «Nous sommes conscients que nous avons maintenant un gros travail d’information et de communication à faire auprès de nos membres, car on ne peut pas se lancer dans une campagne pendant un mois sans leur soutien.»
Du côté du grand parti bleu, son président Bertrand Reich affirme ne pas être inquiet de voir d’autres personnalités démissionner. Il explique dans les colonnes de la «Tribune de Genève»: «Je ne m’attends pas à une vague de départs, parce que tout cela était en quelque sorte déjà annoncé. Ça fait deux ans que je demande une grande alliance de droite. Certes, sans le MCG, mais dans l’ensemble, ce n’est pas une surprise.»
La grogne monte
Bien que le PLR ne compte aujourd'hui qu'un départ, et que son président n'en attend apparemment pas d'autres, un certain mécontentement se fait aussi sentir chez les membres libéraux-radicaux.
La députée au Grand Conseil Joëlle Fiss, réélue le 2 avril, s'est par exemple fendue d'un post Facebook pour le moins à charge contre ses nouveaux «alliés». Elle écrit notamment: «Par souci de transparence, je tiens à dire que je ne voterai pas pour un conseiller d’Etat UDC. Même s’il y a des points d’accord sur plusieurs questions, telles que la fiscalité, la fonction publique, l’économie, le congé parental, la mobilité — impossible pour moi de cocher cette case, qu’importe la candidature. Mon parti le sait. J’ai pu m’exprimer sur cette question à plusieurs reprises.»
Contactée par Blick, Joëlle Fiss se montre plus nuancée à l'autre bout du fil: «Je suis en parfaite adéquation avec le PLR sur absolument tous les sujets, excepté cette alliance avec l'UDC. Mais, quoi qu'il en soit, je soutiendrai un gouvernement de droite.» Voit-elle venir d'autres départs, en plus de Françoise Saudan? «Pas forcément, non», rétorque la politicienne.
De telles dissensions internes vont-elles coûter son succès à cette grande alliance? Réponse au second tour des élections, le 30 avril prochain.