Les droits des personnes handicapées doivent être renforcés. Une nouvelle loi-cadre sur l'inclusion, la contribution d'assistance étendue, la protection de l'égalité dans le secteur privé, ou encore la reconnaissance de la langue des signes est en projet. Le Conseil fédéral oppose à l'initiative pour l'inclusion un paquet de mesures législatives.
Lors de sa dernière séance de l'année vendredi, le gouvernement a pris quatre décisions en faveur de l'égalité des personnes en situation de handicap. S'il recommande de rejeter l'initiative populaire «Pour l'égalité des personnes handicapées», il va soumettre au Parlement un contre-projet «plus concret et plus rapide à mettre en oeuvre», informe-t-il lundi.
L'initiative pour l'inclusion déposée en septembre dernier veut garantir l'égalité effective dans tous les domaines de la vie et à tous les niveaux de la législation. Le Conseil fédéral soutient les revendications du texte, mais estime qu'il offre une «grande marge d'interprétation», a déclaré Elisabeth Baume-Schneider devant les médias.
Si l'initiative est acceptée, cela pourrait provoquer des incompréhensions, voire une insécurité juridique, selon la cheffe du Département fédéral de l'Intérieur (DFI). Pour répondre plus rapidement et plus concrètement aux revendications des initiants, le gouvernement privilégie un contre-projet en deux volets.
En Suisse, 1,7 million de personnes vivent en situation de handicap. Pour Elisabeth Baume-Schneider, «force est de constater que leur inclusion complète dans la société n'est pas encore une réalité». L'initiative pour l'inclusion oblige à se poser d'une manière «plus holistique des questions sur ce qu'est une société inclusive», compte tenu de la proportionnalité et de la répartition des compétences, selon elle.
Inclusion dans le domaine du logement et de l'AI
Le contre-projet se compose d'une part une loi-cadre sur l’inclusion ciblée sur le domaine du logement, d'autre part d'une révision partielle de l’AI prévoyant des modifications dans les domaines des moyens auxiliaires et de la contribution d’assistance.
La loi nouvelle loi-cadre sur l'inclusion met d'abord l'accent sur le logement, une priorité: il s'agira notamment d'améliorer l'offre en logements aménagés abordables et d'harmoniser les pratiques dans les cantons. La nouvelle loi cadre pourra par la suite être étendue à d'autres domaines.
Le second volet du contre-projet touche à l’assurance-invalidité (AI): il vise à améliorer l’accès aux moyens auxiliaires modernes - tels que les appareils auditifs et les prothèses. La contribution d’assistance – qui permet au bénéficiaire d'engager une aide régulière à domicile – doit aussi être étendue aux personnes dont la capacité d’exercice des droits civils est restreinte.
Le DFI doit élaborer pour fin mai 2025 un projet comprenant l’avant-projet de loi sur l’inclusion et la modification de l’AI.
Révision de la loi prévue
A ce dispositif s'ajoute une nouvelle mouture de la révision partielle de la loi sur l’égalité pour les personnes handicapées dans les domaines du travail et des services. Le Conseil fédéral a adopté vendredi dernier le message correspondant. Il ne fait pas formellement partie du contre-projet, mais anticipe certains aspects de l'initiative populaire.
Cette révision – très critiquée lors de la consultation – élargit la protection contre les inégalités aux rapports de travail dans le secteur privé. Il oblige les employeurs à mettre en place des aménagements «raisonnables», par exemple des horaires flexibles. Le gouvernement a défendu une approche «pragmatique».
La révision propose encore d'ancrer dans la loi la reconnaissance des trois langues des signes suisses (suisse allemande, française et italienne) et de promouvoir leur utilisation dans la vie quotidienne. Le DFI préparera un Plan d'action d'ici fin 2025.
Réactions mitigées
Les organisations du domaine du handicap saluent le contre-projet et les améliorations dans la révision de loi sur l'égalité des personnes handicapées, tout en soulignant que le chemin est encore long. Agile attend du Conseil fédéral qu’il implique en amont les personnes en situation de handicap et leurs organisations pour l’élaboration de la loi sur l’inclusion.
La faîtière Inclusion Handicap déplore que la situation «intenable» en matière d'accessibilité aux transports publics ne soit toujours pas résolue: elle exige de fixer des objectifs contraignants dans la loi. Des mesures concrètes pour promouvoir la langue des signes manquent, regrette-elle aussi.
Pour la Fédération suisse des sourds, la reconnaissance des langues des signes «ne doit pas rester symbolique». Elle demande de reconnaître les langues des signes pour ce qu’elles sont: des langues.