Mais des solutions existent!
Le château d'eau suisse se fissure

La Suisse est considérée comme le château d'eau de l'Europe. Mais pour combien de temps encore? Le stress hydrique augmente dans notre pays. Les problèmes se multiplient, mais les solutions existent.
Publié: 12.08.2023 à 15:00 heures
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Dernière mise à jour: 12.08.2023 à 15:05 heures
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En Suisse, la gestion de l'eau doit s'adapter à de nouveaux défis.
Photo: Keystone
Tobias Bruggmann, Sophie Reinhardt

Impossible de passer devant le Palais fédéral à Berne sans remarquer les nombreuses fontaines qui animent la «Bundesplatz». Le jeu d'eau devant le cœur de la politique helvétique symbolise l'usage que fait notre pays de l'or bleu. La Suisse est considérée comme le château d'eau de l'Europe – environ 150 milliards de mètres cubes coulent à travers le territoire. Pas moins de 6% des réserves européennes d'eau douce sont stockées dans la petite Suisse.

Mais les murs du château se fissurent. Les glaciers fondent à toute vitesse, la pluie ne tombe pas assez et la neige se fait de plus en plus rare. «Sur une année, nous continuerons à disposer de suffisamment d'eau», déclare l'hydrologue Rolf Weingartner. Mais il avertit: «Il y aura toutefois une redistribution saisonnière de l'eau, plus pendant le semestre d'hiver, moins pendant le semestre d'été.»

Augmentation inévitable des conflits

Or, c'est justement en été que les exploitations agricoles doivent irriguer leurs champs. Les lacs de stockage doivent être remplis pour la production d'électricité. Les eaux du Rhin doivent permettre le transport de marchandises et le tourisme dépend de nos lacs bleus. La population transpire, doit boire davantage et se rafraîchir.

«À l'avenir, l'utilisation de l'eau en Suisse générera davantage de conflits, déclare Manuela Brunner, chercheuse en hydrologie à l'EPFZ et à l'Institut pour l'étude de la neige et des avalanches (SLF) à Davos. Il y a deux grands domaines de conflits: la production d'énergie et l'agriculture.»

Pour ce qui est de la production d'électricité, il est principalement question d'énergie hydraulique. La gestion des ressources dans ce domaine incombe aux pouvoirs publics qui distribuent des concessions aux exploitants. La quantité d'eau qui peut être prélevée est régulée: une grande partie peut être transformée en électricité, mais pas la totalité. De l'eau doit être injectée dans les rivières tout au long de l'année afin de garantir les débits résiduels, explique Manuela Brunner. Un débit résiduel est important pour que les organismes vivants dans les rivières, comme les poissons, puissent survivre.

Agriculture ou terrain de golf?

L'agriculture a également besoin d'eau. Un besoin qui entre en concurrence avec ceux des particuliers et des entreprises. En cas de pénurie, que faudrait-il prioriser entre laver sa voiture, arroser un terrain de golf ou produire, par exemple, un T-shirt? La situation n'est pas simple, relève l'experte: «Les communes et les cantons doivent décider qui doit recevoir quelle quantité d'eau.» Ici aussi, les considérations écologiques jouent un rôle, les agriculteurs ne peuvent pas utiliser n'importe quelle quantité d'eau.

L'émergence de conflits autour de l'utilisation d'eau dépend beaucoup du lieu, explique Manuela Brunner: «Sur le Plateau, le risque de pénurie est nettement plus élevé que dans les Alpes.» Les effets du changement climatique s'y feraient également davantage sentir, selon l'experte. De son point de vue, différentes solutions sont possibles.

  • Déplacer l'eau dans l'espace ou faire des réserves: «Pour cela, il faudrait construire des réservoirs supplémentaires ou aménager des canaux artificiels», explique Manuela Brunner. Mais d'autres problèmes émergeraient alors: «De telles constructions sont liées à des coûts élevés et ne sont pas forcément durables.»
  • Consommer moins d'eau: «Si la quantité est réduite, l'ensemble du système sera moins sollicité. C'est déjà nécessaire.»
  • Fixer des priorités: «Ce n'est que lorsque les deux premières solutions ne peuvent pas être réalisées qu'il faut fixer des priorités.» Cela se produit déjà en partie aujourd'hui, par exemple lorsque les communes interdisent de laver sa voiture. Même si les cantons et les communes doivent procéder à cette priorisation, une chose est claire: «L'approvisionnement en eau potable passe toujours en premier.»

Une meilleure planification s'impose

Se rabattre sur les eaux souterraines n'est qu'une solution limitée. En effet, la qualité de l'eau diminue. Les pesticides polluent l'eau potable, qui doit être traitée à grands frais.

L'hydrologue Rolf Weingartner demande donc une meilleure planification: «Nous avons instamment besoin d'une gestion de la consommation, notamment pour les périodes d'urgence.» Des réservoirs artificiels, tels que des barrages, pourraient également aider à stocker l'eau disponible en abondance en hiver, afin de la mettre à disposition lorsque cela est nécessaire.

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