L'Union patronale répond aux critiques
«Personne n'est forcé à devenir boucher, ce n'est pas un mauvais métier!»

Un professeur d'université critique sévèrement le marché du travail suisse. «Il y a de nombreux mauvais métiers en Suisse, que personne ne veut vraiment faire», dit-il. L'Union patronale suisse ne voit pas cela d'un bon œil.
Publié: 11.02.2023 à 06:10 heures
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Dernière mise à jour: 11.02.2023 à 09:35 heures
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De «mauvaises professions»? Simon Wey, économiste en chef de l'Union patronale suisse, ne veut pas en entendre parler. Selon lui, c'est faire preuve de mépris à l'égard de ce travail.
Photo: Zvg
Martin Schmidt

L’Union patronale suisse veille à l’emploi et à la prospérité du pays. Et le patronat s’en félicite depuis des décennies. Mais quelqu’un vient de gâcher la fête: Philippe Wampfler a récemment critiqué sévèrement le marché du travail suisse. «Il y a en Suisse de nombreux mauvais métiers, que personne ne veut vraiment faire», clame-t-il. Philippe Wampfler est enseignant, auteur et chargé de cours à l’Institut des sciences de l’éducation de l’université de Zurich.

Celui-ci est convaincu que de nombreuses personnes n’exercent leur métier que par contrainte économique. Il cite notamment le travail de boucher, ou le secteur du nettoyage.

Le problème, selon lui, est lié aux salaires, aux horaires de travail, à la charge physique, ou encore au manque de possibilités d’évolution dans le métier. «Nous devons nous demander davantage si certaines conditions de travail sont compatibles avec la dignité humaine», estime-t-il.

Possibilités d’insertion et tremplin

Les réactions ne se sont pas faites attendre. «Il est présomptueux d’affirmer que de nombreux travailleurs font les prétendus 'mauvais métiers' uniquement pour des raisons économiques», rétorque Simon Wey, économiste en chef de l’Union patronale suisse (UPS). C’est carrément «mépriser ces emplois importants, sans l’exercice desquels il manquerait un rouage dans l’économie».

Simon Wey met en garde contre le fait de «stigmatiser certains emplois comme étant de 'mauvais emplois'. Selon les personnes, l’évaluation des bons et des mauvais emplois est totalement différente. Et cela dépend aussi de l’employeur. Les entreprises font beaucoup pour que leur offre soit de plus en plus attrayante, tant sur le plan physique que sur celui du contenu.»

L’économiste en chef voit également dans une partie des emplois critiqués des possibilités idéales d’entrer sur le marché du travail. Ces postes pourraient être un «tremplin pour gravir les échelons dans le système de formation suisse – en grande partie perméable, ou pour faire carrière».

«Ce n'est pas une obligation»

Mais le professeur Philippe Wampfler nourrit justement de grandes réserves à l’égard du métier de boucher. «Peu de gens verraient dans la mise à mort et la transformation industrielle d’animaux une activité qui a du sens», suppose-t-il.

Des déclarations particulièrement «frappantes», pour Philipp Sax, vice-directeur de l’Union professionnelle suisse de la viande (UPSV): «Les professionnels ne travaillent pas chez nous par obligation, sinon, ils quitteraient rapidement la branche.»

Mais celui-ci n’est pas tellement surpris par la critique: «Les métiers artisanaux ne jouissent pas actuellement de l’estime qu’ils méritent. Il y a dans l’esprit de certains une image complètement dépassée de notre travail.» Selon lui, les métiers de la filière de la viande sont clairement divisés. L’abattage des animaux n’est qu’un des nombreux domaines. Il y a aussi le travail dans l’affinage, la vente ou la gestion d’événements.

Le secteur carnivore polit son image

Malgré cela, la branche a de grandes difficultés à trouver du personnel qualifié ou de la relève. «Après un recul de plusieurs années, nous avons pu stabiliser le nombre d’employés au cours des dernières années», souligne toutefois Philipp Sax.

C’est peut-être parce que le secteur a revu les profils professionnels il y a des années, et a lancé une offensive de recrutement et de charme. Les lieux visés sont les écoles, ou encore les salons. La branche organise également des manifestations d’information et incite ses membres à organiser des journées portes ouvertes et des cours de découverte. Ces mesures semblent porter leurs fruits. Ainsi, les femmes sont nettement plus nombreuses à opter pour une formation dans la filière de la viande.

Et de nombreux arguments favoriseraient le choix d’un tel emploi, selon Philipp Sax: «Les employés mettent la main à la pâte dans la production de denrées alimentaires et bénéficient d’une grande sécurité de l’emploi ainsi que de bonnes possibilités de promotion.»

La plupart préfèrerait ne travailler que trois jours

Pour lutter contre la grave pénurie de main-d’œuvre qualifiée, l’Union patronale souhaite notamment agir sur les conditions cadres pour les mères et les travailleurs âgés. Ceux-ci devraient travailler davantage en termes de volume, ou alors plus longtemps.

La réalité et les envies sont pourtant différentes: le volume de travail par personne a continuellement baissé de plus de 10% au cours des 30 dernières années. Et la plupart des gens ne travailleraient volontiers que trois jours par semaine, s’ils étaient libérés de toute pression économique. C’est ce qu’a révélé récemment une enquête de l’institut de recherche Sotomo.

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