Les tarifs élevés de l’essence au printemps, plus de 2,30 francs pour le sans-plomb 95, ont fait recette. Les prix au litre ont depuis, certes, quelque peu baissé, mais les différences de coûts entre les stations-service ont un impact considérable. Et le porte-monnaie des automobilistes s’en ressent. Le Touring Club Suisse (TCS) estime que cela suffit.
Sur les carburants
Jusqu’à présent, il n’existait pas en Suisse – contrairement à nos pays voisins – d’outil de comparaison des prix de l’essence. Cela va maintenant changer, comme l’annonce Jürg Wittwer, directeur général du TCS.
Monsieur Wittwer, pourquoi le TCS lance-t-il un radar des prix de l’essence?
Jürg Wittwer: De nombreux membres du TCS, mais aussi des non-membres, ont demandé un outil de comparaison des prix lorsque les prix de l’essence étaient particulièrement élevés au printemps. De là est née l’idée de mettre quelque chose sur pied. Après six mois de développement, nous sommes maintenant prêts avec notre solution.
Le Parlement suisse discute de la mise en place d’une plateforme publique de comparaison des prix de l’essence. Une décision à ce sujet devrait être prise prochainement. Pourquoi le TCS lance-t-il cela dès sa propre plate-forme?
Nous prenons au sérieux les problèmes financiers de la population suisse et voulions y remédier activement. Nous avions déjà cette idée en tête avant le débat politique. Si la Confédération lance un outil de comparaison des prix, nous verrons plus loin. La mise en œuvre d’un outil étatique prendra de toute façon encore un certain temps, et d’ici là, nous pouvons combler une lacune.
Vous considérez-vous comme un complément ou comme un concurrent d’une éventuelle plateforme étatique de prix de l’essence?
Nous nous pencherons sur la question lorsqu’il sera clair que l’État interviendra et sous quelle forme. Si les informations sur les prix sont effectivement accessibles au public, nous pourrions les intégrer dans notre application. Mais ce n’est que de la spéculation. Comme je l’ai dit, nous voulons nous attaquer ici et maintenant au problème de l’absence d’aperçu des prix de l’essence en Suisse.
Lancez-vous simplement une plateforme utilisable à court terme?
Non, nous visons une utilité à long terme pour tous. Nous intégrerons d’autres fonctionnalités après les premiers retours d’information. Nous ne savons pas encore lesquelles.
Contrairement au printemps, les prix à la pompe ont à nouveau légèrement baissé. Votre radar de prix de l’essence est-il encore nécessaire?
Le prix de l’essence s’est peut-être un peu détendu. Mais la population suisse souffre de l’inflation et de la hausse des coûts de l’énergie ou de la santé. Nous offrons une possibilité de faire face à l’augmentation des coûts en permettant de faire le plein à un prix plus avantageux. Il n’y a en principe aucune raison de payer plus pour quoi que ce soit en raison d’un manque d’information. En ligne, nous pouvons aujourd’hui comparer tous les prix, des chaussettes aux assurances. Pourquoi le carburant devrait-il être une exception?
Vous ne répondez pas à la question!
Il est clair que l’intérêt public est plus grand lorsque le prix de l’essence est élevé. Mais notre radar des prix de l’essence est également utile lorsque le prix n’est plus aussi élevé. Chaque centime économisé compte. C’est pourquoi notre plate-forme sera aussi populaire lorsque le prix de l’essence ne sera plus un sujet d’actualité.
Quelles différences de prix avez-vous déjà détectées avec la nouvelle application?
Jusqu’à présent, les collaborateurs du TCS ont saisi plus de 25’000 données sur la plate-forme. Nous avons découvert des différences de prix allant jusqu’à 30 centimes par litre. Cela pèse vite dans la balance. Bien sûr, il n’est pas toujours judicieux de se rendre dans une autre station-service pour de petites différences. La «règle des cinq» s’applique: un prix inférieur de 5 centimes par litre ne vaut la peine que si le détour est inférieur ou égal à 5 kilomètres par trajet et si le plein est d’au moins 50 litres.
Quelle est l’importance du prix de l’essence dans le budget des consommateurs suisses?
Tout dépend de la situation. Un petit calcul s’impose: Un Suisse parcourt en moyenne environ 12’000 kilomètres par an. Avec une consommation moyenne de sept litres aux 100 kilomètres et environ deux francs par litre, on arrive à des frais d’essence d’environ 1700 francs. C’est bien sûr moins que les grands postes de dépenses comme le loyer ou la santé. Mais c’est aussi un domaine où il est facile d’économiser – avec ce calcul, environ 250 francs par an.
La plate-forme vous permet-elle de faire baisser le prix de l’essence?
La plate-forme permet ce qui est habituel depuis longtemps sur Internet pour la plupart des produits, à savoir un aperçu des prix. Celle-ci exerce toujours une pression sur les prix et est judicieuse sur le plan économique. Dans ce sens, il est tout à fait souhaitable d’avoir une influence positive sur le prix de l’essence.
Comment le TCS en profite-t-il lui-même?
En tant qu’association, nous agissons différemment des entreprises privées. Nous faisons ce que nous considérons comme judicieux et juste pour nos membres et pour la Suisse. Et nous espérons que l’association sera récompensée pour son investissement et son engagement.
Pourquoi la Suisse a-t-elle eu tant de mal jusqu’à présent à assurer la transparence des prix des carburants?
C’est une bonne question. Peut-être que pour diverses raisons, les Suisses devaient jusqu’à présent être moins attentifs au prix de l’essence. Nous parlons de différences de centimes. Mais sur une année entière, cela peut représenter beaucoup d’argent.
La plate-forme n’est toutefois utile que si les données sont actuelles. Avec une plate-forme participative, ne risque-t-on pas – compte tenu des 3300 stations-service en Suisse – d’avoir des lacunes ou d’afficher des prix obsolètes?
Je suis convaincu que cela fonctionnera. De tels modèles participatifs correspondent à l’esprit du temps. Il se peut que les indications ne soient pas toujours actuelles dans les stations-service éloignées. Mais dans les régions à forte densité de population, nous pourrons très rapidement couvrir les prix. Au début, c’est un problème d’œuf et de poule. Nous continuerons donc d’alimenter nous-mêmes les données. Mais je n’ai aucun doute sur le fait que beaucoup participeront.
Comment évitez-vous que la plate-forme soit utilisée de manière abusive, c’est-à-dire que des indications de prix erronées soient saisies intentionnellement?
Nous avons pris ce risque en compte. On ne peut pas saisir n’importe quelles données, il faut être physiquement présent lors de la saisie. Cela est garanti par une localisation. En outre, plus le nombre d’utilisateurs actifs est élevé, plus les données erronées sont rapidement démasquées. Si dix utilisateurs saisissent un prix de 1,90 franc par litre pour une station-service et qu’un seul indique 1,30 franc, la situation est claire. La masse définit pour ainsi dire la qualité des indications.
Et si le pompiste saisit des prix erronés?
Nous encourageons également les stations-service à saisir elles-mêmes leurs prix. Si un pompiste donne délibérément de fausses indications, cela sera vite découvert. En cas de récidive, nous pourrions rendre ces stations-service invisibles dans l’application.
Pourquoi n’y a-t-il pas de stations-service de l’autre côté de la frontière? Ce serait pourtant utile.
D’une part, il existe déjà des applications de comparaison de prix à l’étranger, l’information est donc disponible. D’autre part, nous voulions nous concentrer sur la Suisse.
Vous souhaitez en fait que la population suisse ait le réflexe d’actualiser le prix actuel dans l’application à chaque fois qu’elle fait le plein. Créez-vous des incitations à cet effet?
Pour chaque saisie de données, des points sont attribués et peuvent être utilisés dans des jeux-concours avec des prix à gagner. Les utilisateurs assidus peuvent ainsi gagner des bons pour le prix de l’essence.