L’affaire a bouleversé la Suisse. Ce lundi 17 mars, l’horrible histoire de Lisa, une enfant de 8 ans, fait son retour devant la justice. En première instance, sa mère, Erika M.* avait été condamnée. L'heure de son procès en appel a sonné.
Dans un podcast du journal «Die Zeit», récemment publié, l'accusée a pris la parole pour critiquer la justice et la police. Le journal l’avait rencontrée en prison en avril 2024. La mère continue de clamer son innocence. Elle y explique notamment pourquoi elle s’était contredite devant le Tribunal régional Berne-Mittelland et comment son ADN s’est retrouvé sur l’arme du crime, une pierre de huit kilos.
Annuler le verdict de perpétuité
Le mardi 1er février 2022, Lisa est retrouvée morte près d’une cabane dans les arbres, dans la forêt de Könizberg à Niederwangen (BE), non loin de son domicile. La police a retrouvé l’enfant avec de graves blessures à la tête et les secours ont tenté de la réanimer, en vain.
Le lendemain, sa mère est arrêtée et depuis, Erika M. est derrière les barreaux. Le 13 juin 2024, le Tribunal régional Berne-Mittelland l’avait reconnue coupable de meurtre et l’avait condamnée à la réclusion à perpétuité, un verdict qu'elle tente désormais de faire annuler devant le Tribunal cantonal bernois.
Seize éléments à charge
La première instance avait alors suivi l’argumentation du ministère public, l’accusation avait présenté 16 éléments à charge. «Nous avons vu un très grand nombre de preuves», avait déclaré le président du tribunal.
Le juge avait notamment évoqué les traces d’ADN d’Erika M. retrouvées sur l’arme du crime, qui, selon la défense, auraient été déposées plusieurs jours auparavant lors d’un jeu dans la forêt. «Ces traces n’ont été trouvées que sur un seul côté. Soit l’ADN adhère mal à cette pierre, soit l’accusée ment.»
Il avait également souligné que l’accusée avait menti sur la fréquence de ses visites à la «cachette», qui est ensuite devenue la scène du crime. «Selon les données de son téléphone portable, elle ne s’y est rendue que deux fois: le soir du crime et une semaine auparavant.»
Une cabane pour sa fille
Le juge évoque comme mobile la difficulté de continuer sa vie en tant que mère célibataire: «Peut-être qu'elle est arrivée à la conclusion qu’il serait plus simple de reconstruire une relation amoureuse sans sa fille. Ou bien a-t-elle voulu s’en débarrasser parce que la vie de mère célibataire était trop éprouvante.»
Ce lundi, devant le Tribunal supérieur, l’avocat d’Erika M. développe donc sa ligne de défense, que l'accusée avait déjà esquissée dans le podcast susmentionné. Pour chaque élément à charge, elle proposait une version alternative en sa faveur ou contestait les résultats de l’enquête.
Dans ce podcast en cinq épisodes, Erika M. raconte également comment son compagnon l’a quittée par WhatsApp, peu après Noël, de manière inattendue. Elle explique aussi que sa fille a souffert de cette séparation. «J’ai donc décidé de construire avec elle une cabane dans les arbres. C’était son rêve depuis longtemps», confie-t-elle. C’est justement près de cette cabane que la fillette a perdu la vie.
La journaliste de «Die Zeit» avait rendu visite à Erika M. en prison, et elle y avait évoqué le jour du drame. En fondant en larmes elle se souvenait: «Après l’école, elle est allée voir une amie. Mais quand j’ai voulu avoir des nouvelles quelques heures plus tard, elle n’était en fait jamais arrivée chez elle», raconte-t-elle dans le podcast. Elle explique alors avoir cherché Lisa avec sa propre mère. «Nous sommes finalement allées à la cabane dans les arbres. C’est là que j’ai vu sa veste. Et puis tout ce sang.»
Elle n'a pas tenté de réanimer sa fille
Lorsque la journaliste lui reproche l'observation du policier selon laquelle elle se trouvait à 15 ou 20 mètres de sa fille blessée lorsqu'ils sont arrivés, elle s'énerve. «C'est de la connerie», s'emporte-t-elle. Elle n'aurait pas non plus tenter de réanimer son enfant. «J'étais totalement sous le choc. Je ne comprends pas ce reproche. Je n'étais juste pas capable de le faire», se défend-elle.
Lors de l'énoncé du jugement, le président du tribunal régional de Berne-Mittelland a vu les choses différemment, et a qualifié le comportement d'Erika M. de «crassement égoïste». Et d'ajouter: «Seule une peine de prison à vie est appropriée». Le tribunal régional avait considéré qu'il était prouvé qu'Erika M. avait tué sa fille de manière ciblée. On saura le 24 mars si la Cour suprême de Berne est du même avis.
*Nom anonymisé