Cette année, les Chambres fédérales n'ont eu de cesse de serrer la vis sur la question de l'asile. En juin dernier, le Parlement a d'abord décidé que les demandeurs d'asile érythréens ayant été déboutés seraient à l'avenir expulsés vers un pays tiers comme le Rwanda. Plus tard dans l'année, le Conseil des Etats a exprimé sa volonté de limiter le statut de protection S, afin qu'il ne s'applique plus automatiquement à tous les réfugiés ukrainiens. Enfin, le Conseil national s'est prononcé à l'automne en faveur d'une suppression du droit au regroupement familial pour les personnes admises à titre provisoire.
Pas de quoi impressionner le conseiller fédéral Beat Jans pour autant. En effet, alors que nos voisins tentent, eux aussi, d'endiguer les flux migratoires par de nouveaux durcissements, le ministre socialiste de l'Asile fait cavalier seul et défend un assouplissement du droit d'asile. Selon des informations de Blick, Beat Jans aurait même demandé à ses collègues du Conseil fédéral d'œuvrer pour une extension du statut de protection S aux personnes admises à titre provisoire. C'est ce que révèle l'enquête de Blick. Il s'agirait alors d'admettre provisoirement des personnes dont la demande d'asile a été rejetée, mais dont le retour semble impossible ou illégal.
Sur l'asile
Un projet qui fait grincer des dents
Mais dans les autres départements, l'idée n'a pas du tout été bien accueillie. Plusieurs sources indépendantes le confirment. Il n'y a donc pas eu de proposition formelle au Conseil fédéral. Une discussion intense s'est ensuivi, un tel assouplissement étant porteur d'enjeux importants. En effet, les prestations sociales augmenteraient et le regroupement familial serait rendu nettement plus facile. La Suisse serait encore plus attractive en tant que lieu de refuge pour les demandeurs d'asile, a-t-on pu entendre du côté des plus sceptiques.
Un autre point de friction trouve ses origines dans un débat qui anime la Berne fédéral en ce moment. En effet, le Conseil fédéral a la ferme intention de faire des économies pour assainir les finances fédérales. Une augmentation des dépenses d'asile est donc totalement inacceptable pour le gouvernement.
D'autant plus que Beat Jans a déjà sollicité il y a quelques jours un crédit supplémentaire de 185 millions pour les réfugiés d'Ukraine. Motif: les 1,2 milliards alloués jusqu'à présent ne suffisent plus, ceci parce que le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) table désormais sur une moyenne de 63'500 personnes titulaires d'un statut S et au bénéfice de l'aide sociale, alors que le budget prévoyait initialement 50'000 personnes.
En proposant d'étendre le statut de protection S, Jans se réfère à un récent rapport rédigé par l'ancien conseiller d'Etat et conseiller national socialiste argovien Urs Hofmann sur mandat de l'ancienne ministre de la Justice Karin Keller-Sutter. Or, dans ce dossier, Hofmann demande lui aussi que le statut S devienne un modèle pour les personnes admises à titre provisoire. Le «statut juridique doit être harmonisé», assure-t-il.
Net refus du Conseil fédéral
Mais les sept sages n'ont visiblement guère goûté à la proposition du ministre socialiste. Selon des sources proches du Conseil fédéral, les autres départements ont opposé une claire fin de non recevoir au Département de la justice (DFJP). Le gouvernement a toutefois chargé le DFJP d'examiner les moyens possibles pour harmoniser le statut juridique des personnes en quête de protection.
Dans le protocole, il aurait été précisé que Beat Jans ne devait en aucun cas créer de nouvelles incitations. Des limites étroites lui ont été imposées, raconte-t-on sous la coupole.
Sur l'asile
Les plans d'extension n'ont pas non plus été bien accueillis par les partis. Les dirigeants du PLR estiment qu'ils sont en contradiction totale avec les préoccupations du moment. Le Centre parle lui d'une «blague absolue»: «Cela annulerait complètement le concept de statut de protection. Celui-ci n'est conçu que pour réagir à des événements extrêmes comme la guerre en Ukraine.»
Pour le camp bourgeois, Beat Jans s'est fait l'auteur d'une évaluation totalement erronée de la situation de l'asile. «Il ne semble pas être bien conseillé à ce sujet», entend-on au Palais fédéral. «Les cantons et les communes sont déjà sous pression aujourd'hui – et Jans veut ouvrir encore plus les portes de l'asile. Cela ne passe pas.»
*Dans une version antérieure de l'article, il était écrit que Beat Jans avait demandé une proposition formelle avec l'extension du statut S au Conseil fédéral. Ce n'est pas le cas, est intervenu jeudi le DFJP. Il s'agissait simplement d'une variante parmi d'autres, proposée dans un document correspondant.
Le 3 octobre 2024, «Blick» a rapporté que le conseiller fédéral Beat Jans avait demandé au Conseil fédéral d'étendre le statut de protection S aux personnes admises à titre provisoire. Cela est contraire aux faits. Sur la base des travaux d'un groupe d'évaluation, le DFJP avait déjà proposé, lors de la consultation des offices, de maintenir le statut de protection S et l'admission provisoire. Seules des adaptations ponctuelles devaient être examinées. Le Conseil fédéral a approuvé ces propositions par décision du 20 septembre 2024.
Le 3 octobre 2024, «Blick» a rapporté que le conseiller fédéral Beat Jans avait demandé au Conseil fédéral d'étendre le statut de protection S aux personnes admises à titre provisoire. Cela est contraire aux faits. Sur la base des travaux d'un groupe d'évaluation, le DFJP avait déjà proposé, lors de la consultation des offices, de maintenir le statut de protection S et l'admission provisoire. Seules des adaptations ponctuelles devaient être examinées. Le Conseil fédéral a approuvé ces propositions par décision du 20 septembre 2024.