Nous sommes à Martigny (VS), un dimanche matin d'avril. La ville se réveille doucement, mais des voyageurs ne sont pas près de dormir. A la gare, l'ambiance est à la fête. Environ 200 jeunes ivres prennent le premier train du matin reliant Sion à Genève après avoir festoyé toute la nuit. Ils hurlent et bousculent les autres voyageurs matinaux.
Peu après, la situation dégénère: des bagarres éclatent sur le trajet et des couteaux menacent. Une contrôleuse se retrouve seule face à la foule, sans aucun moyen d'agir. Le train s'arrête finalement à Lausanne, où des agents de la police des transports des CFF prendront en charge les voyageurs apeurés. Quant aux fêtards, ils se sont volatilisés.
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L'exemple est extrême, mais n'est pas un cas isolé. Pour le Syndicat du personnel des transports (SEV), de tels incidents sont alarmants. Les CFF ne devraient pas laisser une seule personne à bord des trains, malgré la présence assurée de deux agents de train pour les liaisons tardives et matinales. Ces incidents traduisent le manque de personnel et ses graves conséquences: les agents de train et les voyageurs sont livrés à eux-mêmes sans protection face aux passagers violents.
La Verte Greta Gysin critique le laxisme de la procédure
Cette situation inquiète également la conseillère nationale des Vert-e-s Greta Gysin. Elle renvoie au rapport d'activité de l'année dernière de CFF Security et de la police des transports, dans lequel il est question d'une propension et d'un recours visiblement croissants à la violence. «Le nombre d'agressions, notamment contre le personnel des transports publics, témoigne de cette tendance extrêmement inquiétante, souligne l'élue. Le sentiment de sécurité dans les gares et les trains est pour la première fois en léger recul.»
La Verte exige un durcissement de la procédure. Elle est convaincue que les entreprises de transport elles-mêmes, les corps de police cantonaux et les Ministères publics traitent encore trop souvent les délits officiels contre le personnel des transports publics comme des bagatelles. Selon la loi sur les chemins de fer et le transport de voyageurs, la plupart des délits contre le personnel des transports publics doivent être poursuivis d'office, mais «la poursuite pénale des auteurs est négligée», pointe l'élue.
De plus, la police des transports des CFF a récemment fermé et centralisé des bases, notamment le long de «lignes difficiles», critique encore Greta Gysin. L'effectif de la police des transports reste au même niveau depuis des années. Cette dernière examine actuellement quels moyens et ressources lui sont véritablement nécessaires pour accomplir ses tâches.
La tendance à la violence augmente, admettent les CFF
Mais les responsables ne veulent pas entendre parler de négligence. Toutefois, ni les CFF, ni l'Office fédéral des transports, ni les corps de police interrogés n'ont pu fournir à Blick des données spécifiques sur les délits de violence dans les transports publics. D'une manière générale, on constate que le ton s'est durci et que la tendance à la violence a augmenté, admet un porte-parole des CFF. Selon la police cantonale argovienne, des altercations, des agressions ou des vols existent dans les transports publics, mais il n'y a pas de tendance alarmante à la hausse.
La conseillère nationale Verte n'est pas rassurée pour autant. Dans une intervention qu'elle vient de déposer, Greta Gysin demande au Conseil fédéral de veiller à ce que la police des transports dispose des ressources nécessaires pour protéger le personnel des transports publics et les passagers. Parallèlement, les corps de police et les Ministères publics devraient s'attaquer sérieusement aux délits poursuivis d'office et punir les auteurs de manière appropriée – pour que les malfaiteurs ne s'en tirent pas aussi facilement la prochaine fois.