«Je suis en route pour la Suisse, où ma vie prendra fin»
Pourquoi le prix Nobel Daniel Kahneman a-t-il choisi de mourir en Suisse?

Le célèbre psychologue américano-israélien et prix Nobel d'économie Daniel Kahneman a décidé de recourir au suicide assisté en Suisse le 27 mars 2024. Comment a-t-il passé ses derniers jours et pourquoi a-t-il pris une telle décision?
Publié: 26.03.2025 à 09:14 heures
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Le prix Nobel d'économie Daniel Kahneman a décidé de se recourir au suicide assisté peu après son 90e anniversaire.
Photo: imago/ZUMA Press
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Jessica von Duehren

Daniel Kahneman était un maître de la psychologie. Avec son livre «Système 1/Système 2: Les deux vitesses de la pensée», il a changé notre compréhension des décisions que nous prenons. Le décès de cet ancien professeur de l'Université de Princeton fut, elle aussi, e fruit d'une décision: il est mort par suicide assisté, en Suisse, le 27 mars 2024.

Il y a un an, les nécrologies ne mentionnaient pas ce qui avait motivé sa décision. Mais le «Wall Street Journal» a récemment publié les extraits d'une lettre d'adieu que Daniel Kahneman avait envoyée à ses proches quelques jours avant sa mort. On peut y lire comment il a passé ses dernières heures et pourquoi il a décidé de tirer sa révérence de cette façon.

Les derniers jours de Daniel Kahneman

A la mi-mars 2024, le psychologue, qui avait remporté le prix Nobel d'économie en 2002, profitait encore de Paris avec son amie Barbara Tversky et sa famille. Ils se sont promenés dans la ville, ont visité quelques musées et ont même pu assisté à un ballet. Plusieurs de ses proches racontent que Daniel Kahneman était alors plein de joie de vivre, et qu'il l'a été jusqu'à la veille de sa mort.

Vers le 22 mars, toujours selon le «Wall Street Journal», il a commencé à écrire un mail personnel à ses amis proches: «Ceci est une lettre d'adieu que je vous envoie à vous, mes amis, pour vous dire que je suis en route pour la Suisse, où ma vie prendra fin le 27 mars.» Le professeur à la retraite s'est rendu seul en Suisse. Comme le rapporte CH Media, Daniel Kahneman avait choisi l'organisation d'aide au suicide Pegasos, dans le hameau de Roderis de la commune de Nunningen, dans le canton de Soleure.

Ruedi Habegger, créateur de Pegasos, avait décidé de déplacer la chambre funéraire de Liestal, dans le canton de Bâle-Campagne, à Nunningen car «c'est ici, niché dans une nature magnifique, en dehors d'une zone densément peuplée, que l'on peut partir en toute discrétion».

Une grande peur de la démence

Lorsqu'il est décédé, Daniel Kahneman venait d'avoir 90 ans. Il n'était pas mourant, ni dément, bien au contraire. Il travaillait encore sur des projets de recherche. Mais il craignait le déclin inévitable de son mental et voulait partir «avant de se perdre lui-même». Et il avait de bonnes raisons d'être inquiet: sa femme, Anne Treisman, est décédée en 2018, après une longue période de démence. Sa mère avait également perdu la mémoire.

Dans sa lettre d'adieu, il explique: «J'ai pris cette décision parce que je voulais justement éviter cet état à tout prix.» Certains de ses proches étaient au courant de son projet et ont essayé de le faire changer d'avis. «Il a probablement eu la mort la mieux planifiée que j'ai jamais vue», confie l'un de ses amis. 

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